« Vivre avec une hépatite B » : une enquête des États généraux de l’hépatite B en France métropolitaine
et d’outre-mer

// “Living with hepatitis B”: A survey by the General Estates of Hepatitis B in mainland and overseas France

Carmen Hadey (carmen.hadey@soshepatites.fr), Pascal Mélin
SOS Hépatites et Maladies du foie, Montreuil
Soumis le 15.09.2021 // Date of submission: 09.15.2021
Mots-clés : VHB | VHD | Hépatite | Perception | Maladie chronique | Éducation thérapeutique | Qualité de vie
Keywords: HBV | HDV | Hepatitis | Perception | Chronic disease | Therapeutic education | Quality of life

Résumé

Introduction –

En France, l’hépatite chronique B concerne plus de 130 000 personnes. On sait pourtant peu de choses sur la perception de cette maladie par les patients eux-mêmes, encore moins sur celle de l’hépatite delta (D), surinfection de l’hépatite B.

Méthodes –

Initié par les États généraux de l’hépatite B (EGHB), un questionnaire a été soumis, du 30 septembre 2019 au 15 juillet 2020, à 205 porteurs chroniques du virus de l’hépatite B, accueillis par des acteurs associatifs et de santé volontaires, en France métropolitaine (83%, 170 répondants) et dans les départements et régions d’outre-mer (17%, 35 répondants) par écrit, par téléphone ou par Internet.

Résultats –

Avant le dépistage positif, 81% des répondants ne se sentaient pas concernés par la maladie, et 53% disent qu’ils ne connaissaient pas l’hépatite B. L’enquête fait également ressortir un impact psychologique, social et professionnel de l’hépatite B : près de 60% des répondants déclarent vivre difficilement l’incertitude sur l’évolution de la maladie, 50% disent qu’elle a un impact sur leur moral, 30% sur leur vie de famille, 29% sur leur vie sexuelle et 30% sur leur vie professionnelle.

Discussion-Conclusion –

L’impact de l’hépatite B sur la vie quotidienne doit être pris en compte et incite à renforcer l’information et le suivi des patients et de leur entourage.

Abstract

Introduction –

In France, chronic hepatitis B affects more than 130,000 people. However, little is known about the perception of this disease by the patients themselves, even less for hepatitis delta (D), superinfection of hepatitis B.

Methods –

Initiated by the General Estates of Hepatitis B (EGHB), a survey was conducted from 30 September 2019 to 15 July 2020 on 205 chronic carriers of the hepatitis B virus, identified through community and volunteer health associations, in metropolitan France (83%, 160 respondents) and the French overseas departments and regions (17%, 35 respondents). The survey was administered either in printed form, by phone or online.

Results –

Until tested, people do not feel concerned by hepatitis B: 81% of respondents did not feel concerned by the disease before testing positive, 53% said they had no prior knowledge about hepatitis B. The survey also highlights the psychological, social and professional impact of hepatitis B: nearly 60% of respondents said that they struggle with the uncertainty about how the disease will evolve, 50% said that it has an impact on their morale, 30% on their family life, 29% on their sex life and 30% on their professional life.

Discussion-Conclusion –

The impact of hepatitis B on daily life must be taken into account and highlights the need for more information and monitoring of patients and their families.

Introduction

En France, la prévalence de l’hépatite chronique B a été estimée en 2016 à 0,30% (IC95%: [0,13-0,70]) de la population adulte de 18 à 75 ans, soit 135 000 personnes environ [58 224-313 960] 1. Au stade chronique, l’hépatite B peut rester longtemps asymptomatique avant d’évoluer vers une cirrhose et/ou un carcinome hépatocellulaire 2. Les traitements antiviraux disponibles visent à prévenir la survenue de cette cirrhose ou de ses complications, mais ne sont recommandés que dans certaines circonstances (fibrose hépatique, cirrhose, virémie importante, immunodépression, etc.) et ne parviennent que rarement à éliminer le virus 3. Selon l’OMS entre 12 à 25% des personnes vivant avec le virus de l’hépatite B sont éligibles au traitement 4. En France, la surinfection de l’hépatite B par le virus de l’hépatite delta (VHD) concerne environ 4% des patients vivant avec l’hépatite B 5.

Les porteurs chroniques du virus de l’hépatite B (VHB) doivent donc vivre de longues années avec leur maladie, qui nécessite un suivi médical régulier 6. Quelle perception ont-ils de leur maladie ? Qu’en savent-ils, et d’où tiennent-ils leurs informations ? En parlent-ils avec leur entourage, leur médecin ? Leur qualité de vie se trouve-t-elle affectée ? Les risques de complications à plus ou moins long terme les inquiètent-ils ? Cette « vie avec » l’hépatite B est peu documentée en France 7,8. C’est ce qui a incité les initiateurs des Premiers États généraux de l’hépatite B (EGHB) à lancer cette enquête collective en 2019.

Méthode

Le questionnaire, qui comportait 49 questions fermées ou semi-fermées 9, a été élaboré avec l’aide de la société EmPatient (Empowering Patient), société de conseil spécialisée dans la réalisation d’études et de projets centrés sur les préoccupations des personnes malades. Il a ensuite été discuté, amendé et validé par le comité de pilotage des EGHB (1).

L’enquête a été menée du 30 septembre 2019 au 15 juillet 2020, en métropole et dans certains départements et régions d’outre-mer (Guadeloupe et Guyane, plus un répondant à Mayotte et un autre en Polynésie française), dans les réseaux respectifs des structures associatives et de soins participant aux Premiers EGHB, sous l’égide de la Fédération nationale des pôles de référence et réseaux hépatites et du réseau SOS Hépatites, notamment en Guadeloupe. Son administration a été impactée par la crise sanitaire liée à la Covid-19 (participation des partenaires, et accueil restreint des usagers et des patients).

Grâce au soutien bénévole de l’association ISM Interprétariat, une version anglaise du questionnaire était disponible, ainsi qu’un service de traduction par téléphone (plus de 80 langues de traduction). Trois tranches d’âge ont été proposées : 16-30 ans, 30-60 ans, ou plus de 60 ans. Le questionnaire a été préalablement distribué par SOS Hépatites aux structures partenaires (structures associatives et centres de santé). Elles ont invité leur file active à participer à l’enquête, lors de rendez-vous, en version papier, avec un interlocuteur dans le centre partenaire, mais aussi par téléphone (Numéro Vert national SOS Hépatites) et en ligne. Au total, les réponses au questionnaire de 205 personnes ont été analysées sur 226 réponses saisies (21 personnes n’ont pas dépassé la question n°6, sur 49 questions au total). Le nombre de personnes sollicitées par les partenaires n’était pas connu.

Résultats

Cinquante-sept pour cent des 205 personnes interrogées ont entre 30 et 60 ans ; 67% sont des hommes ; 83% vivent en métropole et 17% dans les départements et régions d’outre-mer (10% en Guadeloupe, 6% en Guyane, 1 personne à Mayotte et 1 en Polynésie française), 49% des répondants sont nés en France ; les autres sont originaires de 33 pays : d’Afrique de l’Ouest (36%), d’autres pays d’Afrique (30%), d’Asie (12%), d’Europe (11%), des Caraïbes (9%) et d’Amérique (2%). Quatre-vingts pour cent des questionnaires ont été renseignés dans leur totalité.

Conditions du dépistage

L’hépatite B a, le plus souvent (59%), été dépistée à l’initiative d’un médecin. Les autres circonstances de dépistage citées étaient : un dépistage en centre anonyme dans 14% des cas, un suivi ou un projet de grossesse pour 6%, un don du sang, un bilan de contrôle de la Sécurité sociale, un dépistage en centre de santé universitaire, un dépistage chez un professionnel à obligation vaccinale, une hospitalisation, un séjour dans des centres d’hébergement de personnes en situation de migration, une initiative personnelle ou encore un dépistage impulsé par des proches (figure 1).

Figure 1 : Qui vous a proposé ou prescrit le dépistage de l’hépatite B ? (Question 11, 186 répondants)
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En raison du mode de recrutement, toutes les personnes interrogées savent qu’elles vivent avec le virus de l’hépatite B. En revanche, seules 41% sont en mesure d’affirmer qu’un dépistage de l’hépatite delta leur a été proposé. Les autres pensent qu’il ne leur a pas été proposé (43%) ou déclarent ne pas avoir cette information (16%).

Suivi et prise en soins

Quatre-vingt-cinq pour cent des répondants confirment avoir bénéficié d’une évaluation initiale (biologie, échographie, tests non invasifs et parfois biopsie du foie, etc.). Concernant le suivi longitudinal des patients, 39% des répondants ont une échographie tous les 6 mois, 26% une fois par an et 9% à une autre fréquence ; 17% ont répondu qu’elle ne leur était jamais prescrite et 9% ne pouvaient répondre.

Une question concernait la catégorie de médecins ou de professionnels médico-sociaux consultés au cours des 12 derniers mois pour l’hépatite B : l’hépatologue vient au premier rang des personnes rencontrées (81%), devant le médecin généraliste (50%), puis l’infirmière, le pharmacien, l’éducateur thérapeutique et le psychologue, dans 10% des cas, chacun.

Traitements

Cinquante-deux pour cent des personnes interrogées reçoivent un traitement contre l’hépatite B, principalement le Ténofovir et l’Entécavir, dans 96% des cas par voie orale et 4% par voie injectable. Le recrutement a donc été réalisé chez des patients bénéficiant déjà d’un suivi médical et/ou social, avec donc une surreprésentation des personnes suivies à l’hôpital et traitées.

Près des trois quarts des personnes non traitées (71%) disent que le médecin leur a expliqué qu’elles n’en avaient pas besoin et 4% auraient préféré en bénéficier. À l’inverse, une personne déclare avoir refusé de suivre un traitement.

Parmi les 95 personnes traitées, 93 ont déclaré avoir des effets indésirables et 35% en décrivent (fatigue, troubles gastriques et intestinaux, santé mentale, vertiges-nausées, etc.). À la question « Si cela vous arrive d’oublier ou de ne pas prendre votre traitement, pour quelle(s) raison(s) », 38% disent souvent oublier de prendre leur médicament quotidiennement ; il s’agit d’un oubli ponctuel dans 71% des cas ou d’un imprévu dans 21% des cas, mais la lassitude (13%) et le manque de motivation (10%) sont aussi cités.

Perception de l’hépatite B

Quatre-vingt-un pour cent des répondants ne se sentaient pas concernés par la maladie avant ce dépistage, 53% disent qu’ils ne connaissaient pas l’hépatite B. Après ce dépistage, 81% des répondants estiment que l’hépatite B est une maladie « grave », voire « très grave » ; 2% considèrent que l’hépatite B « n’est pas vraiment une maladie ».

À la question « Aujourd’hui, qu’est-ce qui est le plus difficile pour vous ? », 12 réponses sont proposées : les réponses le plus souvent retenues sont l’incertitude sur l’évolution de la maladie (citée par 59% des 186 répondants à cette question) ou la peur du cancer (57%), la peur de contaminer d’autres personnes (56%), la peur d’être rejeté (39%) et la peur de mourir (39%) (figure 2).

Figure 2 : Aujourd’hui, qu’est-ce qui est le plus difficile pour vous ? (Question 10, 186 répondants)
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Connaissance de la maladie

Interrogés sur leurs sources d’information sur la maladie, les répondants citent les consultations médicales (77%), lors du dépistage (29%), les recherches personnelles (Internet, etc.) (37%). Quatre-vingt-trois pour cent des patients se sentent bien armés pour prévenir les contaminations, 79% pour suivre l’évolution de la maladie, 65% estiment savoir comment fonctionne le traitement, 67% estiment pouvoir parler de leur infection à leurs proches et 59% à un nouveau partenaire sexuel.

Une autre série de questions concernait le niveau d’information sur la maladie. Au moins 90% des répondants sont d’accord avec les trois affirmations suivantes : l’hépatite B est liée à un virus présent dans le sang (91%) ; elle peut entraîner une maladie chronique du foie (96%) ; elle peut entraîner un cancer du foie (90%). Quatre-vingt-neuf pour cent étaient d’accord avec l’affirmation selon laquelle le virus peut se transmettre par une relation sexuelle non protégée ou par l’échange de sang entre deux personnes et qu’il est conseillé d’arrêter la consommation d’alcool quand on est infecté.

L’information concernant la survenue possible de douleurs musculaires ou articulaires liées à l’hépatite B est connue chez 45% des patients. Le risque de contamination par la salive perdure à tort puisque 37% des répondants sont d’accord avec l’affirmation « l’hépatite B peut se transmettre par l’échange de salive entre deux personnes », 44% ne sont pas d’accord avec cette affirmation et 19% ne se prononcent pas.

Information des proches

L’existence d’un vaccin contre l’hépatite B est connue de 80% des répondants, 20% n’en connaissent pas l’existence ou ne se prononcent pas. Concernant la question sur la confiance dans le vaccin contre l’hépatite B, 24% des répondants ne se prononcent pas et 7% déclarent ne pas avoir confiance.

Soixante-quatorze pour cent des répondants disent avoir parlé de prévention avec leurs proches (parents, partenaires sexuels, amis, voire collègues de travail), le plus souvent au cours du mois suivant le dépistage. La motivation de cette information est « pour être honnête » (raison approuvée par 73% des personnes concernées), « pour les inciter à se faire dépister » (55%) et/ou « les inciter à se faire vacciner » (50%), « pour avoir leur soutien » (31%) (figure 3).

Figure 3 : Pour quelle raison avez-vous parlé avec vos proches ? (Question 14, 155 répondants)
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Les motivations expliquant le fait que les répondants n’ont pas parlé à leur entourage sont : « par peur d’être rejeté à cause de la maladie » chez 62%, « par peur d’être rejeté à cause des risques de transmission » chez 65%. D’autres raisons sont spontanément évoquées (31%) : « J’ai peur d’inquiéter ma compagne restée au pays » ; « J’ai peur d’inquiéter gravement ma mère » ; « J’ai honte » ; « Je suis abattu psychologiquement » ; « On ne parle pas de la maladie ».

Vie quotidienne

Les difficultés au quotidien les plus fréquemment citées dans la liste proposée (image de soi, moral, vie familiale, vie de couple, vie sexuelle, vie professionnelle, activités physiques, activités sociales, loisirs) sont : un impact sur le moral pour 50% des répondants, et sur l’image de soi 42% (figure 4).

Figure 4 : Les conséquences et répercussions de votre hépatite sur votre quotidien (d’aujourd’hui) (Question 29, 176 répondants)
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L’impact touche la vie de famille (de façon importante ou modérée) pour 30% des personnes, la vie sexuelle pour 29% et la vie professionnelle en général (de façon importante ou modérée) pour 30%.

Le premier soutien cité est le conjoint (46%), puis le médecin (33%), puis la famille ou les amis et d’autres intervenants et structures de soutien (services sociaux, pharmaciens, missions locales, réseaux caritatifs et associatifs, centres d’hébergement, associations de réduction des risques, etc.). Enfin 23% ne citent pas de soutien.

Des dépenses financières spécifiques associées à l’hépatite B (dépassements d’honoraires, pertes de revenu, etc.) sont générées parmi 22% des répondants (14% recevant un traitement et 8% n’en recevant pas), sachant que la prise en charge des dépenses par l’Assurance maladie au titre des affections de longue durée (ALD) est soumise à l’existence d’une indication thérapeutique et que 52% des personnes interrogées reçoivent un traitement).

Besoins d’information

Les trois besoins les plus souvent cités pour mieux gérer l’hépatite B et améliorer le quotidien, sont « être mieux informé sur la maladie en général » (67% des répondants), « être mieux informé sur ce que l’on peut manger et boire » (68%) et « être mieux informé sur le suivi médical » (figure 5).

Figure 5 : Quels sont vos besoins pour mieux gérer votre hépatite B et améliorer votre quotidien ? (Question 35, 168 répondants)
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À la question concernant les attentes universelles par rapport à une association de patients ou à des États généraux de l’hépatite B, les réponses (liste proposée) les plus fréquentes sont : une promotion de la vaccination chez l’adulte (81%), une demande de facilitation de l’accès à l’information (rédaction de brochures sur l’hépatite B (80%), et la mise en place d’un numéro vert dédié (79%).

Discussion-Conclusion

Cette étude a permis de mettre en évidence les besoins et les attentes des patients vivant avec le virus de l’hépatite B.

Limites de l’enquête

Une première limite de cette enquête déclarative est la non-représentativité de la population porteuse du VHB en France dans cet échantillon avec une surreprésentation des personnes suivies à l’hôpital, pour certaines traitées. Ces résultats ne peuvent pas être extrapolés à l’ensemble des porteurs chroniques du VHB en France, que l’on peut supposer moins bien informés et moins bien suivis que ceux de l’enquête.

Par ailleurs, si le panel interrogé reflète une grande diversité de situations en termes d’âge, de sexe, d’origine sociale, de modes de contamination, de conditions de vie et de stade de la maladie, l’effectif étudié s’est révélé trop faible pour une analyse par tris croisés selon ces différents critères. D’autres études sur ce point seraient bienvenues. Cette enquête est néanmoins suffisante pour que l’on puisse en tirer quelques leçons transversales sur le vécu de l’hépatite B, au-delà de ces différences sociales et médicales.

Pistes à approfondir

À l’issue de cette enquête, et en cohérence avec les autres travaux des EGHB, trois enseignements principaux peuvent être retirés en matière de santé publique 7.

La première piste à creuser concerne l’information sur la maladie. L’enquête montre l’importance de l’information donnée au moment du dépistage ou du rendu et dans le cabinet du médecin ; on peut aussi supposer que l’information n’est pas accessible de par la langue du patient (49% des répondants étant nés en France). Elle montre aussi la nécessité d’informer non seulement le patient, mais aussi son entourage, par le biais notamment d’une éducation thérapeutique individuelle et familiale. Le patient doit disposer d’informations fiables, mises à jour et compréhensibles. Le rôle des associations (telles que SOS Hépatites, Aides, Transhépate, Asud, TRT-5 CHV, Hépatites info-service, les associations de support aux personnes migrantes, les réseaux de soins en ville, etc.) doit être renforcé pour accompagner les patients, pour compléter les informations reçues et pour les aider dans leurs difficultés. Le patient peut aussi être un ambassadeur de la prévention et du dépistage de l’hépatite B, mais il a besoin d’aide pour le faire. L’enquête montre enfin l’intérêt qu’il y aurait à informer en amont le grand public sur la maladie, ses conséquences, mais aussi sur l’existence d’un vaccin très efficace, ce dont même certains malades doutent.

La deuxième piste de réflexion porte sur la prise en soins et le suivi après le dépistage. Trop nombreux sont les porteurs chroniques du VHB non dépistés pour le virus de l’hépatite delta. Trop nombreux sont ceux qui ne bénéficient pas d’un suivi régulier au long cours 10. L’ouverture du bénéfice de l’ALD à tous les porteurs chroniques du VHB, et non aux seules personnes justifiant d’un traitement, contribuerait sans doute à lever certains freins financiers. Elle ne dispensera pas d’une approche multidisciplinaire de la prise en soins, avec une vigilance particulière pour les personnes en situation de vulnérabilité sociale et celles vivant avec des formes compliquées de la maladie (cirrhose, carcinome hépatocellulaire, co-infections avec le VIH ou les virus des hépatites C et delta, comorbidités).

Enfin, et c’est à notre sens l’un des principaux enseignements de cette enquête, une troisième piste porte sur la nécessaire prise en compte de l’impact de l’hépatite B sur la qualité de vie. Cet aspect, encore trop peu documenté, nous paraît d’autant plus important que les personnes atteintes d’hépatite chronique B sont, plus souvent que d’autres, dans des situations psychologiques et sociales précaires 11. L’accompagnement pluridisciplinaire doit intégrer les difficultés psychologiques, familiales, professionnelles ou sexuelles, que peut provoquer l’hépatite B. Une telle approche ne devrait pas être réservée qu’aux patients déjà intégrés dans une filière de suivi et de soins, mais ouverte à tous les autres, en s’adaptant aux besoins spécifiques des usagers vulnérables. Bien accompagner les patients porteurs du VHB (23% des répondants disent en effet ne bénéficier d’aucune aide ou soutien au quotidien), c’est non seulement les aider à mieux vivre avec leur maladie, mais aussi leur donner les moyens de devenir, à leur tour, des ambassadeurs efficaces de la lutte contre l’hépatite B.

Remerciements

À l’ensemble des participants aux États généraux de l’hépatite B, et en particulier aux membres du comité de pilotage.

Liens d’intérêts

Les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêt au regard du contenu de l’article.

Références

1 Saboni L, Brouard C, Gautier A, Chevaliez S, Rahib D, Richard JB, et al. Prévalence des hépatites chroniques C et B, et antécédents de dépistage en population générale en 2016 : contribution à une nouvelle stratégie de dépistage, Baromètre de Santé publique France-BaroTest. Bull Epidémiol Hebd. 2019;(24-25): 469-77. http://beh.
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2 Pol S. Épidémiologie et histoire naturelle de l’hépatite B. Rev Prat 2005;55(6):599-606.
3 Terrault NA, Lok ASF, McMahon BJ, Chang KM, Hwang JP, et al. Update on prevention, diagnosis and treatment of chronic hepatitis B: AASLD 2018 hepatitis B guidance. Hepatology. 2018;67(4):1560-90.
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6 European Association for the Study of the Liver; European Association for the Study of the Liver. EASL 2017 Clinical practice guidelines on the management of hepatitis B virus infection. J Hepatol 2017;67(2):370-98.
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9 Fédération SOS Hépatites. Première enquête nationale Vivre avec l’hépatite B, États Généraux de l’Hépatite B, 2019. https://soshepatites.org/lancement-de-lenquete-nationale-vivre-avec-lhepatite-b/
10 Causse X, Potier P, Si Ahmed SN, Fontanges T, Cadranel JF, Renou C, et al. Cohorte de surveillance des porteurs inactifs de l’antigène HBs (AgHBs). Dictionnaire des observatoires et études du Centre de Biologie Médicale. 2019. http://www.cbm25.fr/imagesUp/analyses/2237-en_savoir_plus-1.pdf
11 SOS Hépatites et Maladies du foie. Synthèse des Premiers États Généraux de l’Hépatite B. 2021. 67 p. https://
soshepatites.org/wp-content/uploads/2021/12/21-12-17-Premiers-Etats-Generaux-Hepatite-B-SYNTHESE-67p-1.pdf

Citer cet article

Hadey C, Mélin P. « Vivre avec une hépatite B » : une enquête des États généraux de l’hépatite B en France métropolitaine et d’outre-mer. Bull Epidémiol Hebd. 2022;(3-4):57-63. http://beh.santepubliquefrance.fr/beh/2022/
3-4/2022_3-4_3.html

(1) Le comité de pilotage comprend des représentants d’une trentaine d’institutions : associations de patients, institutions de recherche et de santé, etc. Sa composition peut être consultée sur le site de SOS Hépatites et Maladies du foie : https://soshepatites.org/etats-generaux-de-lhepatite-b-les-dates-cles/