La tuberculose maladie en France en 2018. Faible incidence nationale, forte incidence dans certains territoires et groupes de population

// Tuberculosis in France in 2018: Low national incidence, high incidence in certain geographical areas and population groups

Jean-Paul Guthmann (jean-paul.guthmann@santepubliquefrance.fr), Stella Laporal, Daniel Lévy-Bruhl
Santé publique France, Saint-Maurice, France
Soumis le 21.10.2019 // Date of submission: 10.21.2019
Mots-clés : Tuberculose | Épidémiologie | Surveillance | Groupes à risque | France
Keywords: Tuberculosis | Epidemiology | Surveillance | Risk groups | France

Résumé

La situation de la France au regard de la tuberculose est marquée par une baisse constante des cas notifiés depuis des décennies. Cependant, les données nationales cachent une situation hétérogène marquée par d’importantes disparités. À partir des données de la déclaration obligatoire (DO), nous décrivons brièvement les principales caractéristiques épidémiologiques de la tuberculose maladie en France en 2018, et faisons un focus sur les territoires et les groupes plus particulièrement atteints. En 2018, 5 092 cas de tuberculose maladie ont été déclarés, soit un taux de déclaration de 7,6 cas/100 000 habitants. Les taux de déclaration les plus élevés ont été observés en Guyane (25,7/100 000), en Île-de-France (16,1/100 000) et à Mayotte (11,5/100 000). Le taux de déclaration était près de 17 fois plus important chez les personnes nées à l’étranger que chez celles nées en France (respectivement 40,1/100 000 et 2,4/100 000). Le taux de déclaration était de 249/100 000 dans la population sans domicile fixe et de 76,0/100 000 chez les détenus. Malgré l’amélioration globale de la situation concernant l’épidémiologie de la tuberculose en France, les fortes incidences dans certains territoires et groupes de population nécessitent la poursuite des actions de lutte et la plus grande vigilance. Une adaptation des mesures tenant compte des situations épidémiologiques particulières est nécessaire, afin d’atteindre l’objectif d’élimination de la tuberculose en France et en Europe.

Abstract

The situation regarding tuberculosis (TB) in France is characterized by a steady decline in the number of TB cases notified, since several decades. However, the national situation does not accurately reflect the heterogeneous situation of the country marked by important differences across geographical areas and populations. Based on mandatory notification data, we briefly describe the main epidemiological characteristics of tuberculosis disease in France in 2018, and focus on the territories and groups most affected by the disease. In 2018, 5,092 cases of tuberculosis disease were reported, yielding a notification rate of 7.6 cases/100,000 population. The highest notification rates are observed in French Guiana (25.7/100,000), Île-de-France (16.1/100,000) and Mayotte (11.5/100,000). The notification rate is nearly 17 times higher among the foreign-born than among those born in France (40.1/100,000 and 2.4/100,000 respectively). The notification rate is 249/100,000 among the homeless population and 76.0/100,000 among prisoners. Despite the overall improvement in the situation regarding the epidemiology of tuberculosis in France, the high incidence in certain territories and population groups requires continued control actions and surveillance. Control measures must be adapted to take into account the specific epidemiological situations in order to achieve the objective of eliminating tuberculosis in France and Europe.

Introduction

La tuberculose figure parmi les dix principales causes de décès et est la cause de décès la plus fréquente par un agent infectieux. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), environ 10 millions de personnes ont contracté la tuberculose en 2017, et 1,5 million sont décédées 1. Les enfants de moins de 5 ans sont particulièrement à risque de développer des formes graves, avec par conséquent un risque plus élevé de mort ou de séquelles. La situation en France n’est pas comparable à celle de l’ensemble du monde. Avec une tendance décroissante de son incidence depuis des décennies 2 et, depuis 2004, moins de 6 000 nouveaux cas de tuberculose maladie déclarés chaque année, soit un taux annuel de déclaration inférieur au seuil de 10 nouveaux cas pour 100 000 habitants 3, la France est, comme la plupart des pays de l’Union européenne 4, classée dans le groupe des pays de faible endémie tuberculeuse.

Cependant, les données nationales cachent une situation hétérogène marquée par d’importantes disparités 3, la tuberculose affectant plus particulièrement des personnes vivant dans certains territoires ou dans des conditions sociales ou économiques les mettant à plus haut risque d’être infectées et/ou de développer la maladie. Nous décrivons brièvement dans cet article les principales caractéristiques épidémiologiques de la tuberculose maladie en France en 2018.

L’objectif principal est cependant de mettre l’accent sur les territoires ou les groupes plus particulièrement atteints par cette maladie. Ils sont constitués principalement des populations les plus pauvres, les plus vulnérables socialement, celles qui ont le plus de mal à se loger ou à accéder au système de soins 5. La description de la tuberculose dans ces groupes est traitée de façon synthétique car elle est abordée de façon plus approfondie dans les autres articles de ce numéro du BEH.

Méthodes

La maladie tuberculeuse est à déclaration obligatoire (DO) en France depuis 1964, alors que plus récemment ont été mises en place la notification des infections tuberculeuses latentes chez les enfants de moins de 15 ans (2003) et celle des issues de traitement (2007). Cet article porte sur les données des cas de tuberculose maladie déclarés en France en 2018. L’organisation du dispositif de surveillance de la tuberculose et le rôle des différents acteurs impliqués sont décrits en détail ailleurs 3. En résumé, la fiche de DO est adressée par le médecin ou le biologiste déclarant à l’Agence régionale de santé (ARS) de sa région, qui la saisit sur un logiciel dédié. Des fichiers électroniques régionaux ou départementaux anonymisés sont générés et traités par Santé publique France. Le traitement consiste en la validation des données au cours d’un processus d’apurement où sont notamment exclus les doublons et les cas de tuberculose déclarés, mais finalement non retenus comme étant des cas de tuberculose.

Les indicateurs générés par l’analyse sont le nombre de cas et les taux de déclaration de tuberculose annuels, déclinés par territoire (région et département) et par caractéristiques sociales et démographiques de la population. Dans le calcul des taux, les dénominateurs sont les estimations localisées de population générées par l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) et, pour le calcul des taux chez les personnes nées hors de France, les données du recensement de 2015 de l’Insee.

Le traitement des données est effectué avec le logiciel Stata® version 14.2 et les comparaisons à l’aide du test du Chi2, avec une signification statistique au seuil de 5%. Un cas multirésistant (MDR) est défini comme un cas de tuberculose résistant à l’isoniazide et à la rifampicine. Tous les cas MDR présentés dans nos données ont été confirmés par le Centre national de référence des mycobactéries et de la résistance des mycobactéries aux antituberculeux (CNR-MyRMA).

Résultats

Principales caractéristiques de la tuberculose en France

En 2018, 5 092 cas de tuberculose maladie ont été déclarés, soit un taux de déclaration de 7,6 cas/100 000 habitants. Ce taux était en augmentation comparé à 2017, montrant que la légère tendance à la hausse observée depuis 2016 se poursuivait (figure 1). Cependant, cette variation entre 2017 et 2018 n’était pas statistiquement significative (p=0,40). Parmi ces cas, 82 étaient des cas MDR (1,6%), un nombre stable comparé aux années précédentes, fluctuant autour de 80 à 100 cas par an 6. Les caractéristiques démographiques, cliniques et bactériologiques des cas étaient très comparables à celles des années précédentes 3. Les cas se concentraient chez les hommes (n=3 378, 66%) et chez l’adulte jeune entre 20 et 39 ans (n=2 061, 41%), alors que les enfants de moins de 5 ans représentaient 2,4% (n=120) des cas. L’âge médian était de 38 ans. Les formes pulmonaires (associées ou non à d’autres localisations) représentaient 70% des cas (n=3 584) et les formes exclusivement extra-pulmonaires 29% (n=1 488) des cas. Parmi les formes pulmonaires, 1 652 (46%) personnes avaient un examen microscopique positif, alors qu’il était négatif ou non renseigné, mais avec une culture positive sur prélèvement respiratoire chez 946 (26%) patients. Le nombre de cas de tuberculose pulmonaire considérés comme potentiellement contagieux (cas avec un résultat positif de microscopie ou de culture sur prélèvement respiratoire) était donc de 2 598, soit 72% des cas déclarés avec une localisation pulmonaire. Une localisation méningée (isolée ou associée à d’autres localisations) était signalée chez 106 cas de tuberculose déclarés (2,1%), et une forme miliaire (isolée ou associée à d’autres localisations) chez 132 patients (2,6%).

Figure 1 : Nombre de cas déclarés et taux de déclaration de tuberculose (pour 100 000 habitants), France, 2000-2018
Agrandir l'image

Formes sévères de tuberculose chez l’enfant

Huit formes méningées ou miliaires ont été notifiées en 2018 chez les enfants de moins de 15 ans, un nombre inférieur à celui de 2017 (15 cas) (figure 2). Ces 8 cas étaient plus fréquemment de sexe masculin (6 cas), 2 d’entre eux étaient âgés de moins d’1 an et 6 avaient plus de 5 ans. Parmi ces 8 enfants, 4 étaient nés en France et 4 à l’étranger (Algérie, Congo, Tchad, Albanie). Ils résidaient en Île-de-France (3 cas) ou en France métropolitaine hors Île-de-France (5 cas).

Figure 2 : Nombre de cas de tuberculose neuroméningée ou miliaire chez l’enfant de moins de 15 ans, France,
2001-2018
Agrandir l'image

Le statut vaccinal BCG de l’enfant et son appartenance à un groupe ayant une indication vaccinale a permis de classer ces enfants selon l’évitabilité potentielle de la maladie par la vaccination. Parmi ces 8 cas, 3 étaient des échecs vaccinaux et n’ont donc pas été évités par la stratégie actuelle de vaccination (une forme méningée isolée, un cas associant une tuberculose génitale, un cas associant une forme pulmonaire et ganglionnaire intra et extra-thoracique). Parmi les 5 autres cas, 2 cas (associant également une localisation pulmonaire) n’étaient pas vaccinés, mais n’avaient pas d’indication vaccinale (ils pouvaient être considérés comme potentiellement évitables par la politique de vaccination universelle qui a prévalu jusqu’en 2007), un cas (forme méningée pure) était considéré comme potentiellement évitable par la stratégie actuelle de vaccination BCG (indication vaccinale BCG, mais non vacciné) et 2 cas (forme méningée pure pour l’un, méningée-miliaire et pulmonaire pour l’autre) ne pouvaient pas être classés en raison d’un statut vaccinal inconnu.

Incidence élevée de tuberculose dans certains territoires ou groupes de population

Tuberculose dans certains territoires

Le nombre de cas et les taux de déclaration variaient selon les régions (figure 3). Excepté dans trois régions, les taux de déclaration étaient inférieurs à 10 cas/100 000 habitants en 2018, seuil considéré par l’OMS pour définir une région de faible endémie tuberculeuse.

Figure 3 : Nombre de cas et taux de déclaration de tuberculose par région, France, 2018
Agrandir l'image

Trois territoires rapportaient, comme au cours des dernières années, les taux de déclaration les plus élevés : la Guyane (25,7/100 000), l’Île-de-France (16,1/100 000) et Mayotte (11,5/100 000). La région Île-de-France concentrait à elle seule plus d’un tiers des cas déclarés (n=1 956) alors que le nombre de cas était faible en Guyane (n=74) et à Mayotte (n=30). En Île-de-France, l’incidence était particulièrement élevée dans certains départements comme la Seine-Saint-Denis (23,6/100 000) et, dans une moindre mesure, Paris (19,1/100 000) et le Val-de-Marne (18,7/100 000).

Tuberculose chez les migrants en provenance des pays de forte endémie tuberculeuse

En 2018, parmi les 4 787 (94%) cas de tuberculose dont le lieu de naissance était renseigné, 34% étaient nés en France et 66% à l’étranger. La concentration des cas dans les populations d’origine étrangère, en constante hausse, a augmenté d’environ 20 points en 10 ans (figure 4). Parmi les personnes nées à l’étranger, 71% provenaient d’Afrique (52% d’Afrique subsaharienne et 19% d’Afrique du Nord), 13% d’un pays d’Européen, 12% d’Asie et 4% d’Amérique ou d’Océanie. Le taux de déclaration était près de 17 fois plus important chez les personnes nées à l’étranger que chez celles nées en France (respectivement 40,1/100 000 et 2,4/100 000). Les taux de déclaration les plus élevés concernaient les personnes nées en Afrique subsaharienne (150/100 000), taux en constante augmentation (figure 5).
Le taux de déclaration le plus élevé chez les personnes nées à l’étranger était trouvé chez les personnes arrivées en France depuis moins de 2 ans (312/100 000) et il diminuait avec l’allongement de l’ancienneté d’entrée en France (12/100 000 chez les personnes arrivées depuis 10 ans ou plus), sans jamais atteindre le taux des personnes nées en France.

Figure 4 : Proportion de cas de tuberculose en fonction du lieu de naissance, France, 2000-2018
Agrandir l'image
Figure 5 : Taux de déclaration de tuberculose par lieu de naissance, France, 2015-2018
Agrandir l'image

Tuberculose chez les personnes mal logées et les personnes détenues

En 2018, le nombre de cas de tuberculose maladie chez les personnes sans domicile fixe (SDF) était de 356 cas pour un nombre de personnes sans domicile estimé à 143 000 7, soit un taux de déclaration de 249/100 000 dans cette population. Ce taux était en augmentation comparé à 2016 (182/100 000) et 2017 (219/100 000). Un pourcentage élevé de personnes SDF étaient nées hors de France, avec une augmentation significative du pourcentage au cours du temps (2008 : 63% ; 2012 : 78% ; 2018 : 91%, p<0,01). En 2018, une tuberculose maladie a été déclarée chez 54 personnes détenues, pour une population de 71 000 détenus 8, soit un taux de déclaration de 76,0/100 000. Ce taux était de 86,4/100 000 en 2016 et de 96,7/100 000 en 2017. Un pourcentage élevé de personnes détenues étaient nées hors de France (2008 : 58% ; 2012 : 78% ; 2018 : 65%, p=0,09).

Discussion

En 2018, le taux de déclaration de tuberculose en France restait faible, inférieur à 10 cas/100 000, permettant de continuer à classer la France dans les pays de faible endémie tuberculeuse. Ce taux était inférieur à la moyenne dans l’Union européenne 4. Les données épidémiologiques montraient cependant une poursuite de la légère tendance à la hausse observée depuis 2016. Même si le taux de déclaration augmentait de façon très modérée, cette hausse est à remarquer car il s’agit d’une rupture par rapport aux années antérieures où la tendance était à la baisse presque chaque année, avec deux exceptions :
le début des années 1990, avec l’arrivée de l’épidémie de VIH-sida, et le milieu des années 2000, avec la mise en place du « Plan tuberculose » ayant induit une augmentation transitoire du nombre de cas déclarés, très probablement liée à une amélioration du taux de notification. À ces deux occasions, les hausses d’incidence ont été faibles et de courte durée, la tendance repassant à la baisse en 2 ou 3 ans. La poursuite de la surveillance épidémiologique de la tuberculose permettra de savoir si la légère augmentation observée depuis 2016 se poursuit au cours des prochaines années.

On constate cependant une situation épidémiologique hétérogène avec des territoires ou des groupes de population particulièrement affectés, le plus souvent expliqué par la forte densité de population dans certains territoires, les mauvaises conditions socioéconomiques et les migrations en provenance de pays de forte endémicité tuberculeuse, ces différents facteurs étant souvent combinés 9,10. La réactivation d’une infection tuberculeuse acquise dans un pays de forte endémie, favorisée probablement par le parcours migratoire et souvent par des conditions de vie dans le pays d’accueil, peuvent expliquer la fréquence élevée de tuberculose chez les migrants, notamment ceux arrivés en France depuis moins de deux ans 11.

En Île-de-France, le pourcentage de cas nés à l’étranger (77%) était supérieur à la moyenne nationale et en hausse significative par rapport à 2016 (73%) (p<0,05). Dans cette région, les départements supportant le plus lourd fardeau en termes d’incidence, étaient ceux comptant la proportion la plus élevée de cas nés à l’étranger, comme la Seine-Saint-Denis. L’Afrique subsaharienne est la zone géographique qui contribuait le plus à cette augmentation, puisqu’elle concentrait 30% du total des cas (contre 17% en 2008 et 26% en 2016).

Les données de la DO montrant des incidences de tuberculose en hausse chez les personnes nées hors de France, et en baisse chez les personnes nées en France, sont en accord avec les données de la littérature indiquant que les cas de tuberculose chez les migrants sont principalement à l’origine d’une transmission au sein de leur communauté, et n’influencent pas de manière significative la situation en termes de risque de tuberculose pour les populations nées dans le pays d’accueil 11,12. Les flux migratoires sont en augmentation dans le monde et en Europe 13, région du monde où la part représentée par les populations étrangères dans l’épidémiologie de la tuberculose est en augmentation 4. Dans ce contexte, la détection précoce des cas, un accès facile au système de soins et un traitement rapide, efficace et complet dans ce groupe de la population devraient être considérés comme un des facteurs essentiels contribuant à diminuer l’incidence de la tuberculose dans ces populations à risque.

Deux autres groupes, les personnes sans domicile fixe et les détenus, étaient particulièrement affectés par la tuberculose. La tuberculose chez les personnes sans domicile fixe est un problème important dans les pays à hauts revenus 14. Cette population cumule de nombreux facteurs de risque socioéconomiques et présente un moindre accès et un moindre recours aux soins. Nous avons montré, en particulier, qu’une forte proportion de ce groupe était née hors de France, ce qui explique probablement aussi en partie ce risque élevé de tuberculose. Ce risque n’est pas présenté dans cet article en termes de taux d’incidence, en raison de l’absence de dénominateur fiable dans cette sous-population de SDF nés à l’étranger. L’augmentation de l’incidence dans cette population témoigne de l’approfondissement de disparités populationnelles et territoriales.

Chez les détenus, l’incidence élevée s’explique par le cumul dans cette population de nombreux facteurs de risque, tels que la précarité, mais aussi dans une moindre mesure la naissance dans un autre pays que la France (autre pays d’Europe 36%, Maghreb 34%, Afrique subsaharienne 15%) 15. De plus, le milieu carcéral est propice au développement de la tuberculose, avec des établissements pénitentiaires confrontés à la promiscuité et à la surpopulation qui favorisent la transmission. Tout comme les personnes nées hors de France, ces populations particulières doivent aussi faire l’objet d’actions ciblées et d’une politique antituberculeuse renforcée. Ceci est absolument nécessaire si la France veut atteindre une incidence inférieure à 5/100 000 nationalement et de moins de 10/100 000 dans toutes les régions, objectifs fixés dans la « Feuille de route tuberculose 2019-2023 » 16.

L’information sur le statut VIH des cas de tuberculose déclarés en France n’est pas recueillie dans la DO, ce qui ne permet pas de mesurer à travers ce dispositif la proportion de patients co-infectés par la tuberculose et le VIH. Cependant, les données recueillies par le CNR MyRMA à travers son réseau sentinelle couvrant une quarantaine de laboratoires hospitalo-universitaires de toutes les régions métropolitaines, sauf la Corse, montrent que sur les 1 922 cas de tuberculose confirmés par la culture en 2017, 6,2% étaient infectés par le VIH 17. Le suivi de la proportion des cas diagnostiqués chez les patients VIH montre une tendance à la baisse de 1995 à 2013, mais une stabilité ces dernières années autour de 6%. Par conséquent, l’impact très modeste en France de l’épidémie du VIH sur l’épidémiologie de la tuberculose souligne l’importance de focaliser les actions sur les autres groupes à risque décrits dans cet article.

Conclusion

Globalement, la situation concernant la tuberculose s’améliore en France, avec un nombre de cas notifiés en baisse depuis des décennies, un risque de transmission de plus en plus faible pour l’ensemble de la population vivant en France, et une incidence durablement sous la barre des 10 cas pour 100 000 habitants. Malgré cette situation encourageante, de nombreux problèmes subsistent, qui nécessitent la poursuite des actions de lutte et la plus grande vigilance, en particulier dans les territoires et les groupes de la population où l’incidence de la tuberculose reste élevée. Comme dans la plupart des pays de l’Union européenne, confrontés à une situation similaire à celle de la France 5, le défi pour notre pays est d’adapter les actions à ces situations spécifiques. Ceci nécessite une stratégie et des moyens adaptés, tenant compte de la situation épidémiologique particulière des groupes les plus vulnérables, faute de quoi l’objectif d’élimination de la tuberculose en France comme dans le reste de l’Europe pourrait ne pas être atteint.

Remerciements

Aux médecins et biologistes déclarants ainsi qu’aux personnels des Clat et des ARS qui contribuent à l’amélioration de la qualité des données de surveillance de la tuberculose. Nous remercions le Professeur Jérôme Robert (CNR MyRMA) pour les données sur les tuberculoses MDR.

Liens d’intérêt

Les auteurs déclarent ne pas avoir de lien d’intérêt au regard du contenu de l’article.

Références

1 World Health Organization. Global tuberculosis report 2018. [Internet]. Geneva: WHO; 2018. 265 p. https://www.who.int/tb/publications/global_report/en/
2 Santé publique France. La Tuberculose : données. [Internet]. Saint-Maurice: Santé publique France. https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/maladies-et-infections-respiratoires/
tuberculose/donnees/#tabs
3 Guthmann J, Aït Belghiti F, Lévy-Bruhl D. Épidémiologie de la tuberculose en France en 2015. Impact de la suspension de l’obligation vaccinale BCG sur la tuberculose de l’enfant, 2007-2015. 2017. Bull Epidémiol Hebd. 2017;(7):116-26. https://www.santepubliquefrance.fr/determinants-de-sante/vaccination/documents/article/
epidemiologie-de-la-tuberculose-en-france-en-2015.-impact-de-la-suspension-de-l-obligation-vaccinale-bcg-sur-la-tuberculose-de-l-enfant-2007-2015
4 WHO Regional Office for Europe/European Centre for Disease Prevention and Control. Tuberculosis surveillance and monitoring in Europe 2019 – 2017 data. Copenhagen: WHO Regional Office for Europe; 2019. www.ecdc.europa.eu/en/publications-data/tuberculosis-surveillance-and-monitoringeurope-2019
5 Guthmann JP, Haas W. Tuberculosis in the European Union/European Economic Area: Much progress, still many challenges. Euro Surveill. 2019;24(12).
6 Centre national de référence des mycobactéries et de la résistance des mycobactéries aux antituberculeux (CNR-MyRMA). Résistance aux antituberculeux en France en 2014-2015. Bull Epidémiol Hebd. 2017;(7):127-8. https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/infections-associees-aux-soins-et-resistance-aux-antibiotiques/resistance-aux-antibiotiques/documents/article/focus.-resistance-aux-antituberculeux-en-france-en-2014-2015
7 Fondation Abbé Pierre. 24e rapport sur l’état du mal-logement en France 2019. Paris: Fondation Abbé Pierre; 2019. 374 p. https://www.fondation-abbe-pierre.fr/nos-actions/comprendre-et-interpeller/24e-rapport-sur-letat-du-mal-logement-en-france-2019
8 Direction de l’administration pénitentiaire. Statistique mensuelle des personnes détenues et écrouées en France. Situation au 1er décembre 2018. Paris: Ministère de la Justice; 2019. 61 p. http://www.justice.gouv.fr/art_pix/mensuelle_decembre_2018.pdf
9 Mathieu P, Mounchetrou Njoya I, Calba C, Lepoutre A, Marc E, Silue Y. Épidémiologie de la tuberculose en Île-de-France : une augmentation des cas déclarés en 2016 et en 2017 ? Bull Epidémiol Hebd. 2019;14:256-62. http://beh.santepubliquefrance.fr/beh/2019/14/2019_14_2.html
10 Succo T, Rousseau C, Guthmann JP. Lutte contre la tuberculose en Guyane : une priorité de santé publique. Données de la surveillance 2005-2017. Bull Epidemiol Hebd. 2020;(2-3):61-67. https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/maladies-et-infections-respiratoires/tuberculose/documents/article/lutte-contre-la-tuberculose-en-guyane-une-priorite-de-sante-publique.-donnees-de-la-surveillance-2005-2017
11 Lonnroth K, Mor Z, Erkens C, Bruchfeld J, Nathavitharana RR, van der Werf MJ, et al. Tuberculosis in migrants in low-incidence countries: Epidemiology and intervention entry points. Int J Tuberc Lung Dis. 2017;21(6):624-37.
12 Sandgren A, Schepisi MS, Sotgiu G, Huitric E, Migliori GB, Manissero D, et al. Tuberculosis transmission between foreign- and native-born populations inthe EU/EEA: A systematic review. Eur Respir J. 2014;43(4):1159-71.
13 Organisation for Economic Co-operation and Development. International Migration Outlook 2016. Paris: OECD; 2016. 432 p. https://www.oecd-ilibrary.org/social-issues-migration-health/international-migration-outlook-2016_migr_outlook-2016-en
14 Haddad MB, Wilson TW, Ijaz K, Marks SM, Moore M. Tuberculosis and homelessness in the United States, 1994-2003. JAMA. 2005;293(22):2762-6.
15 Direction de l’administration pénitentiaire. Séries statistiques des personnes placées sous main de justice. 1980-2014. Paris: Ministère de la Justice; 2014. 73 p. http://www.justice.gouv.fr/art_pix/ppsmj_2014.PDF
16 La feuille de route tuberculose 2019-2023. Paris: Ministère des solidarités et de la Santé; 2019. 23 p. https://solidarites-sante.gouv.fr/soins-et-maladies/maladies/maladies-infectieuses/feuille-de-route-tuberculose-2019-2023
17 Centre national de référence des mycobactéries et de la résistance des mycobactéries aux antituberculeux. Rapport d’activité pour l’année 2018. Paris: CNR-MyRMA; 2019. 108 p. http://cnrmyctb.free.fr/spip.php?rubrique6

Citer cet article

Guthmann JP, Laporal S, Lévy-Bruhl D. La tuberculose maladie en France en 2018. Faible incidence nationale, forte incidence dans certains territoires et groupes de population. Bull Epidémiol Hebd. 2020;(10-11):196-203. http://beh.santepubliquefrance.fr/beh/2020/10-11/2020_10-11_1.html