Opinions et pratiques des personnes âgées de 18 à 75 ans en France métropolitaine vis-à-vis du dépistage du VIH en 2016

// Opinions and practices of persons aged from 18 to 75 years in mainland France regarding HIV testing in 2016

Mathias Bruyand (mathias.bruyand@santepubliquefrance.fr), Delphine Rahib, Arnaud Gautier, Françoise Cazein, Cécile Brouard, Nathalie Lydié, Florence Lot ; groupe baromètre santé 2016*
Santé publique France, Saint-Maurice, France

* Composition du groupe Baromètre santé 2016 : Arnaud Gautier, Nathalie Lydié, Delphine Rahib, Frédérike Limousi, Jean-Baptiste Richard, Cécile Brouard, Christine Larsen

Soumis le 11.09.2019 // Date of submission: 09.11.2019
Mots-clés : Dépistage | VIH | Population générale | Âge
Keywords: Testing | HIV | General population | Age

Résumé

Le dépistage représente un enjeu majeur dans la lutte contre l’infection par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH). La haute Autorité de santé incite toute personne à réaliser au moins un test de dépistage au cours de la vie, ce test devant être répété chez les personnes les plus exposées. Cet article décrit les opinions et les pratiques de dépistage du VIH dans la population générale à partir des données du Baromètre santé 2016.

Le Baromètre santé est une enquête réalisée par téléphone auprès d’un échantillon aléatoire de la population générale résidant en France métropolitaine et comprenant 14 875 personnes âgées de 18-75 ans.

En 2016, si 89% des personnes interrogées étaient en faveur d’un dépistage du VIH au moins une fois au cours de la vie, 45% des hommes et 38% des femmes n’avaient jamais réalisé de dépistage. L’absence de dépistage au cours de la vie était plus fréquente chez les 55-75 ans (63% sans différence entre hommes et femmes), et les 18-24 ans (52% chez les hommes et 38% chez les femmes, p<0,001). Elle concernait 21% des personnes nées en Afrique subsaharienne, 16% des personnes ayant consommé des drogues et 23% des hommes déclarant au moins un partenaire sexuel masculin au cours de la vie.

Le recours au dépistage du VIH reste très insuffisant en France métropolitaine. Son amélioration est nécessaire afin de réduire la méconnaissance de la séropositivité et d’améliorer la précocité du diagnostic pour une mise sous traitement antirétroviral rapide.

Abstract

Screening is a major challenge in the fight against infection with the human immunodeficiency virus (HIV). In France, HIV testing is recommended at least once during lifetime, and should be repeated by those especially exposed to the virus according to health authority’s guidelines. This paper describes opinions and practices of the general population in France regarding HIV testing on the basis of the 2016 Health Barometer.

The Health Barometer is a random phone survey conducted in 2016, involving 14,875 persons in the general population aged 18-75 years living in mainland France.

In 2016, although 89% of the respondents interviewed agreed that HIV testing should be done at least once during lifetime, 45% of men and 38% of women were never tested for HIV. These proportions were higher in those aged 55-75 years (63% without difference between men and women), and in those aged 18-24 years (52% of men and 38% of women, p<0,001). Among those born in sub-Saharan Africa, 21% were never tested, this proportion was 16% in those who had consumed drugs at least once, and 23% in men reporting having sex with men.

HIV testing is insufficient in mainland France, recourse to testing should be enhanced to improve HIV infection diagnoses at an early stage and prompt antiretroviral therapy implementation.

Introduction

Dans la lutte contre l’infection par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH), le dépistage représente un enjeu majeur 1. En effet, il permet le diagnostic précoce des personnes infectées et la mise en route rapide d’un traitement antirétroviral, pour un bénéfice à la fois individuel et collectif en limitant la transmission virale. La stratégie nationale de santé sexuelle a fixé pour objectif que d’ici 2020, 95% des personnes vivant avec le VIH connaissent leur statut vis-à-vis du VIH, 95% des personnes qui connaissent leur séropositivité au VIH reçoivent un traitement antirétroviral et 95% des personnes sous traitement antirétroviral aient une charge virale indétectable 2. La recommandation de dépistage universel du VIH émise en 2009 par la Haute Autorité de santé (HAS) incitait toute personne âgée de 15 à 70 ans à réaliser au moins un test de dépistage du VIH au cours de la vie, ce test devant être répété annuellement chez les personnes les plus exposées (hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes (HSH) multipartenaires, usagers de drogues injectables (UDI) et personnes multipartenaires originaires d’Afrique subsaharienne et des Caraïbes) 3. En 2017, ces recommandations ont été réitérées, tout en renforçant la fréquence du dépistage pour les populations les plus exposées 4. Par ailleurs, l’offre de dépistage du VIH s’est diversifiée. Au dépistage sérologique classique réalisé en laboratoire, se sont ajoutés le dépistage communautaire par test rapide d’orientation diagnostique (TROD) depuis 2011 et les autotests depuis 2015 5. Dans ce contexte, l’activité de dépistage a augmenté de 12% entre 2010 et 2017. En revanche, près d’un tiers des découvertes de séropositivité sont toujours trop tardives. Cette proportion ne diminue pas depuis 2013, et la moitié de ces diagnostics concernait des personnes déclarant ne jamais avoir été testées auparavant 5. L’activité de dépistage est décrite de façon régulière, cependant il est également nécessaire de mieux comprendre l’opinion de la population envers le dépistage du VIH et le profil des personnes n’y ayant pas recours avant l’actualisation des recommandations en 2017.

À partir des données du Baromètre santé 2016 réalisé auprès de la population générale métropolitaine, cet article décrit les opinions et pratiques vis-à-vis du dépistage du VIH, ainsi que les facteurs associés à l’absence de dépistage au cours de la vie des personnes âgées de 18 à 75 ans.

Méthodes

L’enquête Baromètre santé 2016 a été réalisée par téléphone, entre janvier et juillet 2016, auprès d’un échantillon aléatoire de la population âgée de 15 à 75 ans, résidant en France métropolitaine et parlant le français 6,7. L’échantillon repose sur un sondage aléatoire à deux degrés : les numéros de téléphone ont été générés aléatoirement ; une seule personne était ensuite sélectionnée parmi les personnes du ménage éligibles. Le questionnaire relatif à la santé sexuelle et aux maladies infectieuses a été passé à 15 216 individus 8. Les données de l’enquête ont été pondérées pour tenir compte de la probabilité d’inclusion, puis redressées grâce à l’enquête emploi 2014 de l’Insee, par calage sur les marges des variables sociodémographiques suivantes : sexe croisé par classes d’âge, région, taille d’agglomération, niveau de diplôme, fait de vivre seul.

Les résultats présentés dans cet article concernent uniquement les personnes âgées de 18 à 75 ans, soit 14 875 personnes, dont 14 458 ans ayant déjà eu des rapports sexuels.

Les indicateurs suivants ont été étudiés :

Les opinions sur les recommandations du dépistage du VIH et sur la proposition de ce dépistage par un médecin ;

Le recours au dépistage du VIH au cours de la vie parmi l’ensemble de la population ayant eu des rapports sexuels, puis dans les populations plus exposées au virus, et dans certaines situations faisant l’objet d’une recommandation de dépistage (diagnostic d’une infection sexuellement transmissible, interruption volontaire de grossesse, première prescription de contraception et rapports sexuels non consentis).

Le recours au dépistage est présenté selon trois modalités : absence de dépistage au cours de la vie, dépistage réalisé il y a plus de 12 mois ou dépistage réalisé au cours des 12 derniers mois. Les personnes ayant déclaré ne pas savoir si elles avaient été dépistées ou ayant refusé de répondre à la question ont été exclues de l’analyse.

L’appartenance à une population plus particulièrement exposée au VIH a été définie à partir des variables du questionnaire portant sur le pays de naissance, la sexualité (hommes ayant eu au moins une fois des rapports sexuels avec un autre homme au cours de la vie) et la consommation de drogues illicites (au moins une prise de produits par voie intraveineuse ou nasale au cours de la vie) 8.

Le niveau d’étude a été pris en compte à partir du postulat selon lequel un diplôme n’a pas la même valeur selon son année d’obtention 9. Sur le modèle d’autres études, le niveau de diplôme est construit à partir de la date de naissance des personnes interrogées. Le niveau d’études a ainsi été catégorisé en faible, intermédiaire 1, intermédiaire 2 et élevé (1) 9.

Les variables catégorielles ont été comparées à l’aide du test du Chi2. Le seuil de 5% de précision a été retenu pour conclure à une différence de distribution entre les groupes.

Les déterminants de l’absence de recours au dépistage du VIH au cours de la vie ont été étudiés séparément chez les hommes et chez les femmes à l’aide de modèles de régression logistique. Les variables sociodémographiques (pays de naissance, âge et niveau d’études), et les variables d’exposition au risque (avoir eu au moins un nouveau partenaire sexuel dans l’année, avoir signalé au cours de la vie l’usage de drogues par voie intraveineuse ou nasale, avoir eu des rapports sexuels non consentis, et avoir eu des rapports sexuels avec une personne de même sexe pour les hommes) ont été testées en analyse univariée. Les variables significatives au seuil de 1% ont été intégrées dans l’analyse ajustée.

Les analyses ont été réalisées à l’aide du logiciel STATA, v14.1.

Résultats

Opinions vis à vis du dépistage du VIH en population générale

Près de neuf personnes sur dix (89%) sont en faveur d’un dépistage du VIH « au moins une fois au cours de la vie » (tableau 1). Les niveaux d’adhésion à cette proposition sont élevés dans l’ensemble des catégories de population étudiées, dépassant systématiquement les 80%. Cette proportion diminue cependant avec l’âge, passant de 97% chez les 18 à 24 ans à 83% chez les 55-75 ans. Elle est plus élevée parmi les personnes ayant un niveau de diplôme « faible » (91%) par rapport à celles ayant un niveau de diplôme « élevé » (87%).

Tableau 1 : Opinions vis-à-vis du dépistage du VIH : personnes en faveur du dépistage au moins une fois au cours de la vie, enquête Baromètre santé 2016
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Les femmes se montrent plus favorables au dépistage que les hommes (90% vs 87%), en particulier après 25 ans. Les différences hommes/femmes les plus importantes sont observées parmi les personnes nées en France métropolitaine et chez les personnes ayant les niveaux de diplôme les plus élevés.

Parmi les répondants ayant eu au moins un nouveau partenaire sexuel récent, la proposition d’un dépistage au moins une fois cours de la vie rencontre une meilleure adhésion chez les femmes (tableau 1).

Concernant la proposition du test par un médecin sans attendre la demande du patient, 81% des répondants approuvent, de manière plus marquée chez les plus jeunes. De même que pour la réalisation du test une fois au cours de la vie, les femmes sont plus favorables à cette proposition par le médecin, notamment après 25 ans.

Recours au dépistage du VIH au cours de la vie

Parmi l’ensemble de la population

En 2016, 42% des personnes n’avaient jamais réalisé de test de dépistage du VIH, proportion plus importante chez les hommes que chez les femmes (45% vs 38%, p<0,001) (tableau 2).

Tableau 2 : Antécédents de dépistage du VIH, enquête Baromètre santé 2016
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La principale raison évoquée pour expliquer ce non recours est le fait de penser ne pas avoir de risque d’être contaminé par le VIH (67%). Vient ensuite l’absence de proposition par un médecin (27%) et, dans une moindre mesure, le fait de ne pas savoir où s’adresser (1,5%) et la crainte du résultat (1,1%).

L’absence de recours au dépistage est élevée aux âges extrêmes : 63% des 55-75 ans et 45% des 18-24 ans versus 25% des 25-39 ans et 32% des 40-54 ans (tableau 2).

Elle est significativement moins fréquente chez les femmes que chez les hommes pour toutes les classes d’âges, à l’exception de la classe des 55-75 ans pour laquelle la différence n’est pas significative.

La proportion de personnes n’ayant jamais réalisé de dépistage diminue lorsque le niveau d’études augmente. Elle est de 50% chez les personnes ayant un niveau d’études « faible », de 48% chez les personnes ayant un niveau d’études « intermédiaire 1 », de 45% chez les personnes ayant un niveau d’études « intermédiaire 2 » et de 28% chez les titulaires d’un niveau d’études élevé (tableau 2). Les différences hommes/femmes sont particulièrement marquées parmi ceux et celles qui ont un niveau intermédiaire 2 ou élevé, les hommes étant, dans les deux cas, significativement moins souvent dépistés que les femmes.

Parmi les personnes particulièrement exposées ou pour lesquelles le dépistage est recommandé

Les personnes faisant l’objet d’une recommandation de dépistage sont globalement mieux dépistées que celles n’en ayant pas. Ainsi, les personnes nées en Afrique subsaharienne sont 21% (29% des hommes et 13% des femmes, p=0,03) à n’avoir jamais réalisé de dépistage, contre 42% (45% des hommes et 38% des femmes, p<0,001) chez les personnes nées en France métropolitaine (tableau 2).

Parmi les personnes ayant rapporté avoir consommé de la drogue par voie intraveineuse ou intranasale au moins une fois au cours de leur vie, 16% n’ont jamais eu recours au dépistage versus 42% chez celles n’en ayant jamais consommé (tableau 2).

Chez les hommes ayant rapporté avoir eu un ou plusieurs partenaires de même sexe au cours de la vie, 23% n’ont jamais réalisé de dépistage (tableau 2). Cette proportion varie de manière importante en fonction de l’âge : ils sont 40% chez les 18-25 ans et 34% chez les 55-75 ans versus respectivement 17% et 14% chez les 25-39 ans et les 40-54 ans. Chez les autres hommes, cette proportion est de 46% (p<0,001).

Parmi les femmes sous contraception médicale au moment de l’enquête, 32% n’avaient jamais réalisé de dépistage du VIH. Elles étaient 30% parmi celles ayant signalé une IVG au cours de la vie.

Parmi les personnes ayant indiqué avoir eu des rapports sexuels contre leur volonté, 24% n’avaient jamais réalisé de dépistage du VIH (sans différence entre hommes et femmes).

Dépistage récent

Une même proportion d’hommes et de femmes déclare avoir fait un dépistage au cours des 12 mois précédant l’enquête (12%). Ce pourcentage est plus important parmi les hommes et les femmes de 18-24 ans (23% et 30% respectivement, p<0,001).

Les populations pour lesquelles un dépistage annuel était recommandé au moment de l’enquête (migrants et HSH) sont environ un tiers à avoir effectivement réalisé un dépistage dans les 12 mois précédant l’enquête.

Concernant les personnes pour lesquelles le dépistage était recommandé, celles ayant eu un ou plusieurs nouveaux partenaires sexuels dans l’année sont 34% à avoir été dépistées dans les 12 mois. Parmi les personnes ayant indiqué un antécédent d’infection sexuellement transmissible dans l’année, 45% ont réalisé un dépistage récent.

Facteurs associés à l’absence de recours au dépistage du VIH au cours de la vie

Chez les hommes et chez les femmes, le fait d’être âgé de 18 à 24 ans ou de 55 à 75 ans était indépendamment (par rapport aux autres variables du modèle) et significativement associé à un moindre recours au dépistage du VIH au moins une fois dans la vie (tableau 3).

Tableau 3 : Déterminants de l’absence de réalisation de test de dépistage du VIH au cours de la vie, régression logistique, enquête Baromètre santé 2016
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Plusieurs autres facteurs significativement associés à un meilleur recours au dépistage du VIH au moins une fois dans la vie sont observés : un niveau d’étude intermédiaire 2 ou élevé, être né en Afrique subsaharienne, avoir eu un nouveau partenaire sexuel dans l’année précédant l’enquête et un antécédent d’usage de drogues (tableau 3). Par ailleurs, chez les femmes, le fait d’avoir déclaré des rapports sexuels non consentis est significativement associé à un meilleur recours au dépistage au cours de la vie. Chez les hommes, avoir eu des rapports sexuels entre hommes au cours de la vie est également significativement associé à un meilleur recours au test de dépistage (tableau 3).

Discussion

Malgré la recommandation en faveur d’un dépistage universel et une forte adhésion de la population à cette recommandation, en 2016, 42% des personnes âgées de 18-75 ans n’ont jamais réalisé de test du dépistage du VIH.

Par rapport à l’enquête KABP réalisée en 2010 auprès des 18-54 ans 9, les proportions d’hommes et de femmes ayant réalisé un test de dépistage du VIH au cours de la vie sont en très légère augmentation (62% des hommes et 72% des femmes en 2010 vs. 63% des hommes et 74% des femmes âgés de 18-54 ans en 2016). Cependant, les proportions d’hommes et de femmes ayant réalisé un dépistage dans les 12 derniers mois semblent en recul (20% des hommes et 20% des femmes en 2010 versus 15% des hommes et 17% des femmes en 2016).

Les hommes ont moins souvent réalisé de test de dépistage au cours de leur vie que les femmes, en particulier les hommes hétérosexuels. Les opportunités de contact avec le milieu médical autour de questions relatives à la santé sexuelle, plus importantes pour les femmes (contraception, grossesse) peuvent expliquer ces écarts (malgré la recommandation de dépistage du VIH chez les pères à l’occasion de la grossesse) et soulignent l’importance d’engager la discussion entre personnel médical et patients sur ce sujet en dehors de la notion de prise de risque.

La proportion importante de personnes de 55 ans et plus n’ayant jamais réalisé de dépistage pour le VIH et la proportion de tests récents qui est marginale dans cette population font écho à la part des diagnostics tardifs d’infection à VIH plus importante dans cette classe d’âge 10. C’est également dans cette population que la part de personnes pensant que le dépistage du VIH devrait être réalisé au moins une fois dans la vie est la moins importante (83%).

La recommandation de proposer un test de dépistage au moins une fois dans la vie à la population générale âgée de 15 à 70 ans doit permettre de dépister les personnes ignorant leur infection. Sa mise en œuvre reste cependant complexe chez les personnes âgées de 55 ans et plus, la perception du risque d’être contaminé se réduisant avec l’âge 9, et les médecins généralistes rejetant majoritairement l’idée de proposer un dépistage aux personnes sans facteurs de risque apparents 11. Une enquête qualitative sur le dépistage du VIH, menée fin 2002 par l’Observatoire régional de santé (ORS) Rhône-Alpes auprès de généralistes, gynécologues, dermatologues et anesthésistes, a montré que certains médecins estimaient difficile de parler des prises de risque et du VIH en raison de l’âge des patients (chez les plus de 50 ans, voire les plus de 40 ans) 12.

Les populations les plus exposées (HSH, migrants, usagers de drogue) sont davantage dépistées : 79% des personnes nées en Afrique subsaharienne avaient déjà fait un test VIH au cours de leur vie, c’était le cas de 84% des personnes ayant consommé des drogues par voie nasale ou intraveineuse et de 77% des hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes. Ces résultats sont un peu inférieurs, mais cohérents avec ceux observés dans les enquêtes dédiés à ces populations : enquête Rapport au sexe 2017 pour les HSH (83%), l’AfroBaromètre santé 2016 (81,5%) et l’enquête Coquelicot (94%) 13,14,15.

Notre analyse est limitée par les possibilités de caractériser la relation chronologique entre l’exposition et le dépistage dans notre étude, et par l’incapacité à identifier précisément toutes les expositions à risque qui auraient justifié un dépistage au cours des douze derniers mois, en particulier chez les HSH et les usagers de drogues. Le mode de recueil des données, sur une base déclarative, a pu également affecter nos résultats concernant les antécédents de dépistage (biais de mémorisation), et les expositions à risque (sous-déclaration). De plus, les personnes non francophones ont été exclues de cette étude.

Conclusion

Cette analyse indique que le recours au dépistage du VIH reste insuffisant en France métropolitaine en 2016, tant pour la population générale (notamment chez les 55 et plus) pour laquelle un dépistage dans la vie est recommandé entre 15 et 70 ans, que pour les populations particulièrement exposées au virus qui doivent faire l’objet de dépistages répétés. L’impact de l’actualisation des recommandations de dépistage en 2017 par l’HAS mériterait d’être exploré dans un prochain Baromètre santé. Mais les résultats produits ici soulignent l’intérêt de communiquer de façon répétée sur l’importance du recours au dépistage du VIH pour être diagnostiqué et traité de façon précoce.

Remerciements

Les auteurs remercient les personnes ayant participé à l’enquête, l’institut Ipsos (Christophe David, Valérie Blineau, Farah El Malti, Elisabeth Diez, les enquêteurs et les chefs d’équipe), ainsi que l’institut CDA en charge de l’audit du terrain d’enquête.

Liens d’intérêt

Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêt au regard du contenu de l’article.

Références

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Citer cet article

Bruyand M, Rahib D, Gautier A, Cazein F, Brouard C, Lydié N, et al. Opinions et pratiques des personnes âgées de 18 à 75 ans en France métropolitaine vis-à-vis du dépistage du VIH en 2016. Bull Epidémiol Hebd. 2019;(31-32):656-63. http://beh.santepubliquefrance.fr/beh/2019/31-32/2019_31-32_6.html

(1) Pour obtenir le détail de la classification des diplômes, se reporter à la méthodologie de l’étude KABP décrite dans le rapport « Les connaissances, attitudes, croyances et comportements face au VIH / sida en Île-de-France en 2010 » disponible à l’adresse  http://www.ors-idf.org/
fileadmin/DataStorageKit/ORS/
Etudes/2011/Etude_1600/rapport_
KABP_2011_1_.pdf