Indications d’un programme d’activité physique, en complément au traitement médical
// Indication for a physical activity program as a complement to medical treatment
Résumé
Sur la base des données de la littérature, le groupe d’experts de l’expertise collective de l’Inserm « Activité physique. Prévention et traitement des maladies chroniques » a retenu l’indication systématique d’un programme d’activité physique en complément d’un autre traitement pour plusieurs pathologies : cancers, pathologies cardiovasculaires (maladie coronaire, insuffisance cardiaque chronique, accident vasculaire cérébral), broncho-pneumopathie chronique obstructive, asthme, pathologies ostéo-articulaires, dépression et schizophrénie. Pour les patients qui en sont atteints, la pratique d’une activité physique régulière, diversifiée et suffisamment intense constitue un élément incontournable de la prise en charge de la maladie et des séquelles, de la prévention et de l’amélioration de la qualité de vie. Dans plusieurs pathologies, elle a également un impact sur le pronostic. Pour ces maladies, le groupe d’experts recommande la prescription d’un programme d’activité physique sans délai après le diagnostic. Le programme d’activité physique doit être personnalisé (fréquence, intensité, durée et modalités de l’exercice) sur la base de tests d’évaluation validés. Le groupe d’experts recommande une combinaison de différentes modalités et conditions de pratiques afin de les rendre plaisantes pour les patients. Des supports technologiques peuvent aider à la motivation de la pratique à moyen terme. À cela, doivent se rajouter des solutions facilitant la mobilité dans la vie quotidienne tout au long de la vie. Le groupe d’experts recommande de s’appuyer sur une combinaison de pratiques pour soutenir la motivation du patient.
Abstract
On the basis of a review of current evidence, the Interdisciplinary Expert Panel concluded that physical activity is indicated systematically as a complement to another treatment for several diseases: cancers, cardiovascular diseases (coronary pathologies, chronic heart failure, and stroke), chronic obstructive pulmonary disease, asthma, osteoarticular diseases, depression and schizophrenia. For patients suffering from these diseases, regular, diversified and sufficiently intense physical activity represents an essential element in the management of the disease and side effects, prevention and improvement of quality of life. In several of these pathologies, regular physical activity has an impact on prognosis. The expert group recommends the prescription of a physical activity program without delay after a diagnosis of one of these diseases. The physical activity program should be personalized (frequency, intensity, duration and modalities of exercise) on the basis of validated tests evaluating the physical condition. The expert panel recommends a combination of different modalities to make physical activity pleasant for patients. Technological supports can help motivate practice in the medium term. In addition, solutions facilitating mobility in daily life throughout lifetime should be implemented. The expert group recommends relying on a combination of different methods to support patient motivation.
Le corps humain est fait pour bouger. Si notre mode de vie est devenu en quelques décennies très sédentaire, le corps humain et nos gènes n’ont pas changé. Il est ainsi aujourd’hui bien établi que la sédentarité et le manque d’activité physique ont des effets néfastes sur notre santé, avec des risques accrus de cancers (colon, sein), d’obésité, d’hypertension ou de diabète. Pour les patients, l’activité physique est devenue une thérapeutique non-médicamenteuse validée et reconnue. Si elle constitue le traitement de première intention pour certaines maladies (décrites dans l’article précédent de Ninot et coll. dans ce numéro), elle fait désormais partie intégrante du traitement de plusieurs autres pathologies : cancers, plusieurs pathologies cardiovasculaires (maladie coronaire, insuffisance cardiaque chronique, accident vasculaire cérébral), broncho-pneumopathie chronique obstructive, asthme, pathologies ostéo-articulaires, dépression et schizophrénie.
Sur la base des données de la littérature, le groupe d’experts a conclu qu’un programme d’activité physique est indiqué de façon systématique, en complément à un autre traitement, chez les patients atteints de ces pathologies. Pour ces patients, la pratique d’une activité physique constitue un élément incontournable de la prise en charge de la maladie et des séquelles, de la prévention et de l’amélioration de la qualité de vie. Dans plusieurs de ces pathologies, elle a également un impact sur le pronostic.
Le groupe d’experts recommande que la prescription par le médecin de l’activité physique soit systématique pour ces pathologies et aussi précoce que possible après le diagnostic. Il s’agit d’accompagner le patient pour inverser le cercle vicieux du déconditionnement en un cercle vertueux très en amont dans le parcours de soin. L’activité physique est prescrite après évaluation par des tests validés permettant de personnaliser le programme (fréquence, intensité, durée et modalités de l’exercice ayant prouvé leur efficacité) en fonction des capacités physiques. Afin de construire les conditions et un environnement favorables à une pratique durable et favoriser l’autonomie des personnes, l’activité physique doit être adaptée individuellement, en fonction des paramètres propres à la pathologie ainsi que des préférences et conditions socioéconomiques (familiales, professionnelles, matérielles) du patient. La combinaison de plusieurs stratégies et d’outils peut soutenir les patients dans une pratique régulière. L’intégration par le patient de la pratique régulière de l’activité physique dans sa vie quotidienne et son maintien tout au long de la vie constituent des enjeux importants de la prise en charge de ces patients. Le groupe d’experts recommande d’évaluer régulièrement la condition physique du patient et d’adapter le programme d’activité physique à l’état clinique, aux comorbidités et aux éventuelles limitations (temporaires ou relatives).
Maladie coronaire : les bénéfices de l’activité physique peuvent être optimisés en modulant l’intensité d’exercice
Un programme de réadaptation cardiaque fondé sur l’activité physique induit une baisse de la mortalité cardiovasculaire 1,2 et diminue le risque de réhospitalisation, avec une relation dose-réponse en fonction du nombre de séances effectuées. Le groupe d’experts recommande une activité physique régulière qui est d’autant plus efficace qu’elle est instaurée précocement 3,4. Le programme d’activité physique doit être personnalisé sur la base de tests d’évaluation. L’exercice intermittent à haute intensité (EIHI, consistant à répéter de brèves périodes d’effort de haute intensité, entrecoupées de périodes d’effort de faible intensité ou de repos) a les mêmes bénéfices que les exercices d’intensité modérée, mais serait plus adapté aux patients fragiles et fatigables 5. La variation de l’intensité doit être établie avec précaution pour maximiser les bénéfices, minimiser les risques d’accident et fournir un plaisir maximal pour le patient. Les pratiques d’intensité légère à modérée (type tai-chi, chi gong) sont également bénéfiques. Le renforcement musculaire, complémentaire à l’entrainement aérobie, apporte des bénéfices sur le métabolisme du glucose, la composition corporelle, la densité osseuse, la force musculaire, la qualité de vie et la tolérance à l’effort 6.
Insuffisance cardiaque chronique : la pratique d’une activité physique est recommandée pour tous les insuffisants cardiaques chroniques
L’inactivité physique chez les patients atteints d’insuffisance cardiaque chronique (ICC) aggrave le pronostic et contribue à l’augmentation de la mortalité précoce. Le déconditionnement physique est responsable d’une évolution défavorable de l’ICC avec atteinte des systèmes ventilatoire et musculaire squelettique. L’activité physique chez ces patients améliore les capacités cardiorespiratoires 7, la force musculaire, la qualité de vie, réduit le nombre de réhospitalisations.
Le groupe d’experts recommande le réentraînement physique systématique chez les patients atteints d’ICC, quel que soit le degré de sévérité de la pathologie. Le port d’un stimulateur ou d’un défibrillateur cardiaque, avec assistance circulatoire, et la transplantation cardiaque ne contre-indiquent pas l’activité physique. Le réentrainement doit être progressif dans une structure spécialisée ou à domicile, après une bonne éducation quant aux modalités de pratique. L’activité physique doit être poursuivie tout au long de la vie, à raison de 30 minutes d’activité modérée à vigoureuse, au moins 5 fois par semaine. L’implication active du patient dans la prise en charge de sa maladie et dans le choix des modalités de pratique de l’activité physique est un garant d’une meilleure adhésion au long cours. L’entraînement aérobie fractionné est la modalité qui apporte les bénéfices les plus importants 8.
Certaines études dans l’ICC suggèrent une relation en « J » entre la quantité totale hebdomadaire du réentraînement physique et la survenue d’événements cardiovasculaires avec une dose maximale d’activité physique hebdomadaire à ne pas dépasser 9, mais ces données méritent d’être confirmées par d’autres études.
Accident vasculaire cérébral : l’activité physique est recommandée mais encore trop peu prescrite
Après la survenue d’un accident vasculaire cérébral (AVC), les patients très peu actifs, avec un niveau de sédentarité trop élevé, présentent une faible capacité cardiorespiratoire. La pratique d’une activité physique améliore les capacités cardiorespiratoires, la force musculaire et apporte un bénéfice sur les activités de la vie quotidienne chez ces patients. Dans les pays occidentaux, la réhabilitation physique globale fait partie du traitement optimal des patients après un AVC. Le réentraînement physique chez les patients après un AVC est sûr, même lorsque son début est précoce (24 à 72 heures post-AVC), et n’aggrave pas la spasticité musculaire 10.
La grande variété des causes et des séquelles des AVC retentissant sur l’autonomie et la qualité de vie du patient limite les conclusions des études qui ont analysés les bénéfices du réentraînement et les protocoles d’activité physique les mieux adaptés. Les bénéfices sont plus marqués avec un entraînement aérobie associé à du renforcement musculaire. Ils semblent également corrélés à la précocité du réentraînement, avec une relation dose-effet 11.
Après la survenue d’un AVC, le groupe d’experts recommande, en complément du traitement médical optimal, un réentraînement avec un double objectif, limiter le retentissement des séquelles de l’appareil locomoteur et/ou cognitives, et prévenir une récidive en agissant sur les facteurs de risque cardiovasculaires. Le programme de réentraînement doit être progressif (3 à 5 séances par semaine de 20 à 60 minutes) et personnalisé en fonction des séquelles neuromusculaires et cognitives. Il associe un travail aérobie et de renforcement musculaire. Il convient de débuter l’activité physique le plus précocement possible, avec une mobilisation passive initiale du patient si besoin.
En fonction du niveau de risque cardiovasculaire du patient, une épreuve d’effort maximal est indiquée avant le début du réentraînement 12. La surveillance sera adaptée au niveau de risque de chaque patient, avec une surveillance particulière chez les patients ayant présenté un AVC de cause hémorragique. Les patients post-AVC les plus sévères doivent être réentraînés dans des centres spécialisés, avec une surveillance cardiovasculaire stricte. Les patients moins sévères peuvent reprendre l’entraînement en groupe, voire à domicile en cas d’AVC ancien. Compte tenu de l’existence d’une relation linéaire entre volume d’activité et effets bénéfiques sur la neuroplasticité, une pratique journalière avec répétition des gestes est recommandée. Le groupe d’experts recommande d’associer les programmes d’activité physique à des interventions visant à développer ou renforcer les compétences d’autogestion par le patient : de la maladie, des traitements et de leurs répercussions physiques et psychologiques. Ces interventions doivent être conduites par du personnel formé, afin d’aider le patient à prendre une part active dans sa prise en charge. L’activité physique doit être poursuivie tout au long de la vie, en associant activités journalières et une activité physique (aérobie et renforcement musculaire) adaptée aux séquelles et à la capacité physique.
Les bénéfices de l’activité physique sur l’autonomie, les fonctions cognitives, la structure osseuse et la mortalité des patients post-AVC doivent être confirmés par des études randomisées sur de grandes populations. Des protocoles de télé-réhabilitation et de réalité virtuelle pourraient également être efficaces, mais les résultats des études actuellement disponibles sont à consolider.
Cancers : l’activité physique apporte des bénéfices chez les patients à toutes les étapes de la maladie
Après le diagnostic d’un cancer, on observe de façon constante un déconditionnement, facteur de mauvais pronostic. Il est à l’origine d’une fatigue invalidante et d’une diminution de la qualité de vie. Le déconditionnement est aggravé par la réduction de l’activité physique chez la majorité des patients après le diagnostic d’un cancer. Il s’accompagne d’une diminution du niveau d’activité physique et de l’augmentation de la sédentarité des patients. Les très nombreuses données de la littérature montrent de façon convergente le bénéfice de l’activité physique sur les conséquences de la maladie et les effets secondaires des traitements, notamment sur la qualité de vie, la fatigue, la capacité cardio-respiratoire, la composition corporelle, l’anxiété et les symptômes dépressifs. Les études suggèrent également des effets bénéfiques sur certaines douleurs, la neuropathie chimio-induite, la toxicité cardiovasculaire, la perte de densité osseuse et le taux de réalisation complet des traitements. Chez des patients atteints de cancers du sein, du côlon et de la prostate, les études de cohorte rapportent de façon convergente un bénéfice de l’activité physique sur la réduction de la mortalité globale et spécifique, ainsi que sur le risque de récidive avec une relation dose-réponse du niveau d’activité physique 13, 14.
Le groupe d’experts recommande de prescrire de façon systématique l’activité physique aux patients atteints de cancer, aussi précoce que possible après le diagnostic, concomitante aux traitements et en post-traitement. Le groupe d’experts recommande d’évaluer régulièrement la condition physique du patient et d’adapter le programme d’activité physique à l’état clinique, aux comorbidités et aux éventuelles limitations, temporaires ou relatives (anémie prononcée (hémoglobine ≤8 g. dL-1), plaquettes <50 000/mm3, leucocytes <1 500/mm3, suites précoces de chirurgie, syndrome infectieux sévère en cours d’évolution, décompensation d’une pathologie cardiopulmonaire, lésions osseuses lytiques du rachis ou des os longs, dénutrition sévère) 15. En l’absence de limitations, une activité physique modérée à intense, régulière et progressive d’au moins 30 min/jour cinq fois par semaine, conforme aux recommandations en population, est indiquée, de préférence dans un programme supervisé ou semi-supervisé.
Pendant les traitements, l’augmentation de l’intensité au-delà de 10-12 MET (équivalent métabolique).h/semaine, n’apporte pas de bénéfice supplémentaire sur la fatigue. Au contraire, l’effet sur la fatigue et la qualité de vie semble inverse lorsque l’activité physique dépasse 20 MET.h/semaine 16. Des activités plus douces (yoga, etc.) et l’association des pratiques avec des techniques cognitivo-comportementales et/ou des entretiens motivationnels semblent aussi apporter un bénéfice. Le groupe d’experts recommande de combiner des activités de type aérobie et de renforcement musculaire, en augmentant progressivement la fréquence, la durée et l’intensité de l’activité physique. Son maintien dans le temps, avec une augmentation progressive de l’intensité, est important.
L’activité physique ne présente pas d’effets secondaires spécifiques chez les patients atteints d’un cancer 17. Progressive et régulière, en post-opératoire après une chirurgie pour cancer du sein, elle n’aggrave pas le risque de lymphœdème et améliore l’amplitude des mouvements de l’épaule 18.
À un stade avancé ou métastatique, l’activité physique peut améliorer les capacités fonctionnelles et la qualité de vie, mais la diversité des situations cliniques ne permet pas de formuler des recommandations systématiques.
Bronchopneumopathie chronique obstructive : instaurer une pratique physique pérenne est fondamental pour améliorer la qualité de vie et réduire les limitations fonctionnelles
La survie des patients atteints de bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) diminue de façon spectaculaire avec la réduction du niveau d’activité physique 19. L’activité physique, pierre angulaire de la réhabilitation respiratoire, est reconnue depuis de nombreuses années pour améliorer la qualité de vie et la tolérance à l’effort, réduire la dyspnée et les exacerbations des patients atteints de BPCO. Le niveau d’activité physique est également associé à une diminution des hospitalisations en lien avec la BPCO, ainsi qu’à la survie des patients atteints de BPCO 20,21,22.
Le groupe d’experts recommande d’instaurer de façon systématique, en complément des traitements médicaux, une activité physique adaptée (APA) chez les patients atteints de BPCO. Le groupe d’experts recommande l’évaluation des capacités physiques et de la tolérance à l’effort de façon à pouvoir adapter l’intensité de pratique aux capacités des patients. L’épreuve d’effort cardiorespiratoire maximale est considérée comme la technique de référence. Elle peut être complétée par le test de marche de 6 minutes, qui peut toutefois présenter un effet plafond. Il conviendra dans ce cas de recourir au test navette incrémental (ISWT, test au cours duquel la vitesse est progressivement augmentée au moyen de signaux sonores préenregistrés). L’usage de la supplémentation aiguë en oxygène est nécessaire pour corriger des désaturations pendant l’exercice. En revanche, l’usage systématique de la supplémentation en oxygène lors des activités physiques n’améliore en rien ses effets.
Le groupe d’experts recommande une combinaison de différentes méthodes et conditions de pratique, de façon à les rendre attractives, ludiques et variées. Les entraînements en endurance donnent des effets comparables aux entraînements fractionnés, avec des durées de pratique plus courtes pour ces derniers. Ils sont mieux tolérés par les patients si la durée des pics d’intensité d’effort utilisés reste inférieure à 30 secondes. Peu de travaux ont comparé les entraînements à basse intensité avec ceux à haute intensité, mais les effets sont globalement superposables pour des volumes de pratique comparables. Les activités physiques aquatiques et des pratiques plus douces (tai-chi) donnent également d’excellents résultats 23,24. Le renforcement musculaire est efficace sur la tolérance générale à l’effort, mais également sur la force musculaire (et de façon plus inconstante sur la masse musculaire), déterminant significatif de la survie des patients.
La pérennité de l’activité physique dans le temps est fondamentale. Le groupe d’experts recommande de s’appuyer sur une combinaison de stratégies pour soutenir la motivation du patient et favoriser son maintien à long terme.
Asthme : les activités d’endurance ont montré leur efficacité pour améliorer l’état de santé des patients
L’activité physique chez les patients asthmatiques, notamment les activités physiques d’endurance, améliorent la condition physique aérobie qui entraîne une augmentation de la bronchodilatation induite par l’exercice. Cet effet a pour conséquence de supprimer l’obstruction des voies respiratoires pendant l’exercice et, d’autre part, de diminuer le risque de bronchospasme induit par l’exercice. Les conséquences sont une meilleure capacité et tolérance à l’exercice, une diminution de l’hyperréactivité bronchique ainsi qu’une meilleure qualité de vie et d’état clinique des patients asthmatiques, avec un accroissement significatif du nombre de jours passés sans symptôme respiratoire 25. Seuls les effets sur la fonction respiratoire de repos sont encore discutés, en raison de deux méta-analyses arrivant à des résultats contradictoires.
Le groupe d’experts recommande d’instaurer, de façon systématique et le plus précocement possible, une APA chez les patients asthmatiques. Un effet paradoxal peut être observé en début de traitement, l’activité physique impactant positivement l’état clinique, mais pouvant provoquer un bronchospasme post-exercice. La pérennité de l’activité physique dans le temps est fondamentale. Le groupe d’experts recommande de s’appuyer sur une combinaison de stratégies pour soutenir la motivation du patient et favoriser son maintien à long terme.
Aucune méta-analyse n’a pu être réalisée sur les intensités optimales de pratique.
Pathologies ostéo-articulaires : l’activité physique occupe une place fondamentale dans le traitement pour prévenir ou réduire le handicap et la douleur
Les pathologies ostéo-articulaires représentent un groupe hétérogène de maladies, avec des répercussions lourdes en termes de douleur, de handicap 26 et d’altération de la qualité de vie. L’activité physique adaptée dans le traitement des pathologies ostéo-articulaires est recommandée afin de réduire ou prévenir le handicap et améliorer la qualité de vie.
Le groupe d’experts recommande la prescription systématique, le plus précocement possible, de l’APA chez les patients atteints de pathologies ostéo-articulaires, quels que soient le stade, l’activité ou la sévérité de la maladie. Il s’agit d’un traitement de fond, sous la forme de programmes d’APA, structurés, supervisés ou non, associant exercices spécifiques et activité physique non spécifique. Le groupe d’experts recommande l’instauration d’une activité physique régulière et pérenne, associant activité physique variée et exercices spécifiques adaptés aux limitations et à la capacité physique.
Dans la lombalgie chronique, l’arthrose des membres inférieurs, la polyarthrite rhumatoïde et la spondylarthrite ankylosante, les niveaux de preuve de l’efficacité de l’APA en termes de réduction de la douleur, de limitation des activités et de son innocuité à court et moyen termes sont désormais considérés comme élevés 27. Une optimisation du contenu et du mode de délivrance de ces programmes est encore nécessaire. Les études montrent en outre l’amélioration de critères importants pour le patient (Patient-Centered Outcomes). La douleur ostéo-articulaire n’est pas une contre-indication à l’activité physique, mais impose des adaptations (fractionnement, milieu aquatique…). Les niveaux de preuve sont encore faibles dans la cervicalgie chronique, le canal lombaire étroit, l’arthrose digitale ou les connectivites. L’intérêt d’un programme structuré d’activité physique adaptée n’est pas démontré dans la lombalgie aiguë.
Dépression
La France compte 7,8% de personnes dépressives chez les 15-75 ans 28. Les raisons sont multifactorielles (chômage ou inactivité, séparation ou divorce, solitude, violence sexuelle ou physique…). La méta-analyse Cochrane de Cooney et coll. 29, à partir de quatre essais cliniques, montre une équivalence des bénéfices entre des programmes d’APA supervisés et des médicaments antidépresseurs. Sept essais cliniques comparant des programmes d’APA aux thérapies cognitivo-comportementales indiquent une équivalence de bénéfices. Deux essais randomisés contrôlés montrent une diminution des symptômes dépressifs avec un programme d’exercices chez des patients résistants aux médicaments antidépresseurs.
Les effets antidépresseurs des programmes d’APA reposent sur plusieurs mécanismes simultanés, physiologiques (meilleur apport d’oxygène au système nerveux central), neurobiologiques (neurogenèse, régulation de la libération de cortisol et de sérotonine, stimulation d’endorphines, facilitation du circuit de la récompense), neuropsychologiques (modification des niveaux de conscience, amélioration des fonctions exécutives), cognitifs (distraction, diversion des pensées négatives) et psychosociologiques (efficacité personnelle, estime de soi, participation sociale).
Les experts recommandent un programme d’activité physique thérapeutique d’au minimum trois séances par semaine. Des pratiques mixtes s’avérèrent plus efficaces que des pratiques strictement d’endurance. Un minimum de 25 à 36 séances est préconisé sur une période de trois mois 27. Ce programme doit être considéré par le médecin traitant comme une solution de première intention à prescrire pour les personnes souffrant d’une dépression d’intensité légère à modérée, compte tenu de ses bénéfices et de ses faibles risques. Pour les dépressions sévères, l’association à d’autres traitements médicamenteux et psychothérapeutiques est indispensable, autant que le recours à un psychiatre.
Schizophrénie
L’activité physique réduit les hallucinations, l’anxiété et la détresse psychologique tout en augmentant l’attention et la qualité de vie chez les patients schizophrènes 30. La méta-analyse de Dauwann et coll. 31 a retenu 29 études cliniques évaluant l’efficacité de programmes d’activité physique (1 009 patients). Elles montrent un bénéfice sur la sévérité des symptômes, aussi bien en ce qui concerne la symptomatologie positive (délire, hallucinations, troubles du cours de la pensée) que la symptomatologie négative (pauvreté des affects et du discours, amimie), la qualité de vie et la symptomatologie dépressive. En revanche, les études ne constatent pas d’effet sur le fonctionnement cognitif (attention, fonctions exécutives, vitesse de traitement, mémoire de travail, mémoire à long terme).
Le groupe d’experts recommande la prescription de l’activité physique de façon systématique sous la forme de programmes d’activité physique adaptés et structurés.
Conclusion
Pour toutes les pathologies chroniques citées, les bénéfices de l’activité physique en complément des traitements habituels, sont avérés et une activité physique, spécifique selon les pathologies et adaptée à la condition physique des patients, doit être instaurée aussi précocement et durablement que possible.
Liens d’intérêt
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêt au regard du contenu de l’article.
Références
750-8.
A systematic review. Clin Rehabil. 2004;18(1):27-39.
2019-07/app_247_ref_aps_cancers_cd_vf.pdf
731-9.
71-85
588-99.
Citer cet article
2020/HS/2020_HS_5.html