La prévalence des TSA continue de croître en France : données récentes des registres des handicaps de l’enfant
// The prevalence of ASD is still increasing in France: Recent data from childhood disabilities registries
Résumé
Les deux registres français des handicaps de l’enfant, qui couvrent les départements de la Haute-Garonne (RHE31), de l’Isère, de la Savoie et de la Haute-Savoie (RHEOP), ont notamment pour mission un enregistrement systématique des enfants présentant un diagnostic de trouble du spectre de l’autisme (TSA) posé au plus tard l’année civile de leurs 8 ans.
Le travail présenté ici propose une estimation de la prévalence et des caractéristiques pour les enfants inclus dans les deux registres, nés entre 1995 et 2010 et ayant reçu un diagnostic de TSA au plus tard entre 2003 et 2018.
De la génération des enfants nés en 1995-97 à celle des 2007-09, la prévalence des TSA est passée de 2,3 à 7,7/1 000 et de 3,3 à 5,6/1 000 pour le RHE31 et le RHEOP respectivement. Chez les garçons nés de 2007 à 2009, la prévalence atteignait 12,3/1 000 pour le RHE31 et 9,0/1 000 pour le RHEOP. Pour les deux registres, on constatait une diminution significative de la proportion d’enfants présentant un retard intellectuel associé. La proportion d’enfants avec TSA présentant des comorbidités restait cependant élevée.
En conclusion, ces résultats confirmaient une augmentation des diagnostics de TSA chez les enfants de 8 ans, avec une prévalence de 8 à 10/1 000 pour les enfants nés en 2010, avec des diagnostics plus précis et davantage d’enfants sans retard intellectuel associé. Ce système de surveillance fondé sur les registres a permis d’apporter une estimation actualisée de la prévalence tout à fait comparable à des estimations récentes européennes pour les mêmes tranches d’âge.
Abstract
The two French childhood disability registries, that cover the districts of Haute-Garonne (RHE31), Isère, Savoie and Haute-Savoie (RHEOP), systematically register the children with a diagnosis of Autism Spectrum Disorder (ASD) reported by the end of the calendar year of their eighth birthday.
We present an estimation of prevalence and characteristics of children included in these registers, born between 1995 and 2010 with a reported diagnosis of ASD at the latest between 2003 and 2018.
From years of birth 1995-1997 to 2007-2009, prevalence increased from 2.3 to 7.7/1,000 for RHE31 and from 3.3 to 5.6/1,000 for RHEOP respectively. Among boys born between 2007 and 2009, prevalence reached 12.3/1,000 for RHE31 and 9.0/1,000 for RHEOP. For both registries, there was a significant diminution of the proportion of children with an associated intellectual disability. However, the proportion of children with comorbidities was still significant.
In conclusion, these results confirm the increase of diagnosis of ASD among children aged 8 years, between 8 and 10/1,000 for children born in 2010, with more specific diagnosis and less intellectual disability associated. This health surveillance system based on population-based registries provides an actualized estimation of prevalence quite comparable with recent European estimates for children in similar age-range.
Introduction
Le diagnostic et la classification des troubles autistiques et des troubles envahissants du développement (TED) ont été en constante évolution au cours des dernières décennies. Actuellement considérés comme des troubles neuro-développementaux complexes, ils regroupent, sous le terme de « troubles du spectre de l’autisme » (TSA), une seule catégorie diagnostique caractérisée par un déficit de la communication et des interactions sociales, ainsi que par des comportements ou des intérêts restreints et répétitifs (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, 5e édition, DSM-5). Cette nouvelle définition supprime les sous-types de diagnostics utilisés dans les classifications internationales antérieures, DSM 4 ou Classification internationale des maladies (CIM-10). Ces évolutions conceptuelles ont conduit à envisager dans le spectre de l’autisme un éventail de symptômes beaucoup plus large qu’auparavant.
Parallèlement, le nombre de cas de TSA rapporté dans la littérature n’a cessé d’augmenter et une revue récente de littérature
a estimé à 1,5% au moins la prévalence actuelle des TSA dans les pays
développés 1. Des estimations bien supérieures ont été rapportées dans la littérature récente, autour de 2,5% notamment dans des études
utilisant des diagnostics rapportés par les parents chez des enfants âgés de moins de 17 ans 2,3,4. L’importante variabilité des résultats retrouvés dans la littérature, en partie due à l’hétérogénéité persistant dans les
méthodologies utilisées, la définition, l’identification et l’évaluation des cas dans les différentes études de prévalence,
est soulignée par Fombonne et coll. 5, qui présente un chiffre de prévalence moyen de 0,69%.
En France, il n’existe pas de système de surveillance permettant d’estimer la prévalence des TSA en population générale à un niveau national. Deux registres des handicaps de l’enfant, le RHE31 (Registre des handicaps de l’enfant en Haute-Garonne) et le RHEOP (Registre des handicaps de l’enfant et observatoire périnatal de l’Isère, la Savoie et la Haute-Savoie), ont pour mission l’enregistrement systématique des enfants résidant dans les départements concernés et présentant un TSA ou une déficience neuro-développementale ou neurosensorielle sévère au cours de l’année civile de leurs 8 ans. Ils permettent donc de disposer de données de prévalence, évaluées à un âge donné, selon une méthodologie identique au cours du temps, à partir d’une base populationnelle. Le travail présenté ici propose une estimation de la prévalence et des caractéristiques, pour les enfants inclus dans les deux registres, nés entre 1995 et 2009 et ayant reçu un diagnostic de TSA au plus tard entre 2003 et 2017.
Population et méthodes
Les données sont issues du RHE31 et du RHEOP dont les méthodes de travail ont déjà été décrites par ailleurs 6,7 et sont présentées plus en détail sur les sites Internet des registres (1). Pour cette étude, les enfants concernés étaient nés entre 1995 et 2009, résidaient en Haute-Garonne et Isère, Savoie, Haute-Savoie au cours de l’année civile où l’enfant a eu 8 ans, et présentant un diagnostic de TSA porté au plus tard l’année civile des 8 ans de l’enfant. Des données complémentaires pour les enfants nés en 2010, concernant uniquement la prévalence globale et par sexe, ont également été présentées.
Les principales sources de données sont : les Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), les données du Programme de médicalisation du système d’information (PMSI) des services de pédopsychiatrie (incluant les consultations et évaluations spécialisées) et les unités d’évaluation des TSA des Centres de ressources autisme pour le département de Haute-Garonne, de l’Isère (Centre alpin de diagnostic précoce de l’autisme) et de la Savoie (Centre d’évaluation savoyard de l’autisme). Les données sont recueillies par un médecin ou enquêteur à partir des dossiers médicaux après obtention de l’accord des parents.
Les registres sont conçus pour garantir la continuité des critères diagnostiques dans le temps, et les diagnostics retenus correspondent à la catégorie des TED de la CIM-10. L’harmonisation de la définition des cas a conduit à la décision d’utiliser les codes CIM-10 suivants : autisme (F84.0), autisme atypique (F84.1), syndrome d’Asperger (F84.5), autre TED (F84.8) et TED non spécifié (F84.9). Si l’impact de l’utilisation des critères diagnostiques du DSM-5 par rapport à ceux de la CIM-10 n’est pas encore entièrement identifié ni quantifié dans la littérature 8, il apparaît cependant que les codes CIM-10 F84.8 et F84.9 correspondent à des diagnostics moins spécifiés et potentiellement moins précis que les codes d’autisme (typique ou atypique) ou de syndrome d’Asperger qui rentrent, eux, plus clairement dans la définition des TSA. Ceci justifiait d’étudier séparément deux sous-groupes : un groupe avec des codes spécifiés (F84.0, F84.1 et F84.5) et un groupe avec des codes non spécifiés (F84.8 et F84.9). Ainsi, la prévalence et les caractéristiques ont été évaluées pour l’ensemble des codes CIM, puis séparément pour chaque sous-groupe. Les prévalences et leurs intervalles de confiance à 95% (loi binomiale exacte) ont été calculés pour 1 000 enfants du même âge résidant dans les départements concernés, par registre, année, et sexe. Les dénominateurs (enfants résidant dans les départements couverts par les registres à l’âge de 8 ans) étaient issus des données du recensement Insee actualisées annuellement (2). La présence d’une déficience intellectuelle associée (correspondant à un niveau de quotient intellectuel (QI) inférieur à 70) ou d’une épilepsie, ainsi que leur évolution au cours du temps ont été estimées par sexe et type de diagnostic. Ont également été rapportés les diagnostics de paralysies cérébrales (PC) et de déficiences visuelle ou auditive sévères définis selon les critères d’inclusion des deux registres décrits plus précisément ailleurs 9. La proportion des cas de TSA avec des diagnostics établis d’anomalies congénitales a été également présentée, ainsi que l’âge maternel à la naissance et, pour le RHE31 uniquement, des données complémentaires sur les facteurs de risque périnataux : proportion d’enfants de petit poids de naissance (<2 500 g), et d’enfants nés prématurés (avant 37 semaines d’âge gestationnel).
Résultats
L’enregistrement des TSA parmi les générations 1995 à 2009 représentait au RHE31 et au RHEOP respectivement un total de 1 133 et 1 616 cas. Dans les deux registres, on constatait une augmentation de la prévalence au cours du temps, plus marquée pour le RHE31 que pour le RHEOP (figure 1). Sur les trois dernières générations étudiées (tableau 1), la prévalence globale des TSA atteignait 7,7/1 000 pour le RHE31 et 5,6/1 000 pour le RHEOP. Parmi les enfants nés en 2010 (la dernière génération disponible), la prévalence était, au RHE31 et au RHEOP, respectivement de 10,2/1 000 et 8,0/1 000.
Pour le RHE31, cette augmentation était nettement plus marquée pour les diagnostics de troubles autistiques spécifié (autisme typique ou atypique et syndrome d’Asperger) (figure 1). La proportion de ces codes, parmi l’ensemble des TSA enregistrés au RHE31 (tableau 1), est ainsi passée de 53,3% au début de la période étudiée à 64,0% pour les trois dernières générations. Pour le RHEOP, à l’inverse, l’augmentation a essentiellement concerné des diagnostics peu spécifiés (autres TED ou TED non spécifiés), bien qu’une inversion de cette tendance au cours des dernières années semble se profiler (figure 1). Ainsi, au RHEOP, la proportion de diagnostics spécifiés concernait, en moyenne sur l’ensemble de la période, 38,7% des cas de TSA, contre 57,3% pour le RHE31 (tableau 1).
Dans les deux registres, l’augmentation de la prévalence concernait principalement les garçons (figure 2) même si on constatait une tendance à l’augmentation chez les filles pour le RHE31 sur la dernière période étudiée. Ainsi, la prévalence de l’ensemble des TSA atteignait 3,0/1 000 chez les filles nées entre 2007 et 2009 pour le RHE31 et 2,0/1 000 pour le RHEOP (tableau 1). Chez les garçons nés de 2007 à 2009, la prévalence atteignait 12,3/1 000 pour le RHE31 (et jusqu’à 16,5/1 000 pour les enfants nés en 2010) et 9,0/1 000 pour le RHEOP (et jusqu’à 13,6/1 000 pour les enfants nés en 2010). Sur cette dernière période, le sex-ratio était de 4,1 et 4,5 respectivement pour le RHE31 et le RHEOP. L’évolution de la proportion de codes CIM spécifiés selon le sexe (tableau 1) montrait que, pour le RHE31 cette proportion avait augmenté pour les deux sexes, mais plus précocement chez les garçons que chez les filles, pour atteindre sur la dernière période de trois ans, un pourcentage similaire de 64% de l’ensemble des diagnostics. Pour le RHEOP, la proportion de diagnostics spécifiés semblait légèrement plus importante chez les garçons que chez les filles, et avait globalement peu évolué dans le temps.
Les tableaux 2 et 3 présentent, en fonction du sexe et du diagnostic rapporté, la proportion d’enfants présentant un retard intellectuel ou une épilepsie. Cette proportion était proche entre les deux registres, quel que soit le sexe ou le type de diagnostic considéré. Pour les deux registres, on constatait, au cours de la période étudiée, une diminution significative de la proportion d’enfants présentant un retard intellectuel associé aux diagnostics de TSA (tableau 2), quel que soit le type de diagnostic pour le RHE31 et plus particulièrement pour les diagnostics non spécifiés pour le RHEOP. Ainsi, sur la dernière
La proportion d’épilepsie associée (tableau 3) était supérieure pour le RHE31 et elle a diminué sur la période étudiée dans les deux registres (avec des différences d’évolution selon le diagnostic). Sur la dernière période de trois ans, environ 6% des enfants au RHE31 et 3% au RHEOP présentaient une épilepsie. La proportion d’épilepsie était significativement associée à la présence d’une déficience intellectuelle. Pour le RHE31, elle atteignait 15,1% des enfants avec déficience intellectuelle, contre seulement 3,7% des enfants sans déficience intellectuelle (p<0,001), et pour le RHEOP, 8,7% des enfants avec déficience intellectuelle contre seulement 1,4% des enfants sans déficience intellectuelle (p<0,001).
Concernant les déficiences associées, au RHE31 et au RHEOP, respectivement 2,3% et 1,5% des enfants présentaient une PC associée, sans différence significative selon le sexe. Les déficiences sensorielles sévères associées (visuelles ou auditives) concernaient significativement plus souvent les filles (3% au RHE31 et 4,7% au RHEOP) que les garçons (1% au RHE31 et 0,3% au RHEOP). Les diagnostics de TSA associés à une anomalie congénitale ou une anomalie génétique/chromosomique identifiée concernaient 10,8% des enfants au RHE31 et 8,7% au RHEOP, avec une tendance à une proportion plus élevée parmi les filles. La répartition par tranches d’âge maternel n’était pas significativement différente de celle de la population des mères ayant accouché dans les différents départements couverts par les registres pendant la même période. Les données périnatales disponibles pour les enfants nés entre 2007 et 2010 et enregistrés dans le RHE31 montrent que les naissances prématurées et de petits poids concernaient respectivement 12,6% et 12,2% des enfants avec TSA pour lesquels l’information était connue.
Discussion
La surveillance des troubles autistiques à l’âge de 8 ans dans les deux registres a mis en évidence une augmentation considérable de la prévalence au cours des 15 dernières années. De la génération des enfants nés en 1995-97 à celle des 2007-09, la prévalence de l’ensemble des TSA est passée de 2,3 à 7,7/1 000 pour le RHE31, et de 3,3 à 5,6/1 000 pour le RHEOP. Cette augmentation concernait plus particulièrement les garçons et ne semblait pas avoir atteint de plateau avec une prévalence atteignant respectivement 10,2/1 000 et 8,0/1 000 pour les enfants nés en 2010 inclus au RHE31 et au RHEOP.
L’estimation de la prévalence des TSA des deux registres français montrait précédemment des valeurs assez similaires, nettement inférieures aux prévalences observées au niveau international 6,7. L’augmentation de la prévalence dans le département de Haute-Garonne (RHE31) avait déjà été rapportée dans cette dernière publication 7. Elle semble cohérente avec les dernières estimations proposées par Fombonne et coll. 5 qui mentionnait « une convergence des estimations d’environ 6,2 à 9,3/1 000 » pour les études récentes et qui insistait sur la « variabilité importante entre les études et au sein des études, entre les sites ou les zones ». Cette hétérogénéité décrite dans la littérature est désormais retrouvée entre les deux registres, et a débuté pour les enfants nés dans les années 2000, enregistrés à partir de 2008.
Malgré une méthodologie et des sources de données communes, le recours inégal à ces sources pourrait partiellement expliquer les écarts observés. En effet, l’utilisation, comme source de données complémentaires, des données du PMSI des services de pédopsychiatrie, ainsi que de l’unité d’évaluation du Centre de ressources autisme (CRA) a pu être réalisée de façon plus systématique en Haute-Garonne que dans les trois départements couverts par le RHEOP. Cependant, le croisement des données du RHE31 et du RHEOP selon les sources d’identification des cas, MDPH et PMSI, a pu montrer que la proportion de cas identifiés uniquement grâce aux données du PMSI était faible et ne permettait pas, à elle seule, d’expliquer la différence de prévalence observée entre les deux registres. D’autre part, les inclusions dans les registres sont soumises à l’accord parental. Celui-ci s’exprimant avant toute consultation du dossier médical de l’enfant, les registres n’ont pas les moyens de savoir si ces refus concernent effectivement des enfants porteurs de TSA. Les taux de refus sont comparables pour les deux registres, de l’ordre de 6% pour le RHE31 et de 7% pour le RHEOP et ne permettent donc pas d’expliquer les différences de prévalence entre les deux registres.
L’utilisation d’une méthodologie et de critères d’inclusion inchangés au cours du temps permet de s’assurer que l’enregistrement des cas reflète la prévalence des cas diagnostiqués au plus tard l’année civile des 8 ans, selon les modalités diagnostiques mises en œuvre dans les différents territoires au cours des différentes périodes de temps. Les données de chaque site reflètent donc les procédures établies pour l’orientation des cas suspectés, les diagnostics et l’orientation vers les structures de prises en charge.
Historiquement, l’utilisation de la Classification française des troubles mentaux de l’enfant et de l’adolescent par les pédopsychiatres amenait à une utilisation plus restrictive des diagnostics de TED que la définition actuelle des TSA. Bien que l’alignement des critères diagnostiques sur ceux de la CIM-10 ait été depuis longtemps effectif dans les recommandations nationales, la mise en œuvre dans les pratiques cliniques a pu être plus ou moins longue.
De plus, l’enquête réalisée par la Cour des comptes en 2017 10 a mis en évidence une grande diversité territoriale, que ce soit sur le déploiement des recommandations de bonne pratique ou sur le type de structures assurant les évaluations diagnostiques. Le rapport pointait l’absence d’homogénéité selon les catégories et les possibilités de chaque structure. Il soulignait des stratégies et une montée en charge de la mise en place de ces structures très variables selon les régions.
L’estimation de la prévalence basée sur des diagnostics posés à 8 ans est donc potentiellement très sensible aux effets des pratiques et investissements professionnels des équipes locales, notamment pour de petits territoires de surveillance comme ceux couverts par les deux registres. Les évolutions récentes et les dernières données pour la génération des enfants nés en 2010 semblaient montrer une nette augmentation de la prévalence pour le RHEOP, ce qui confirme probablement cette hypothèse.
Deux études européennes récentes ont permis d’estimer la prévalence des TSA chez les enfants de 7 à 9 ans en population générale. Une étude italienne 11 a utilisé deux méthodes complémentaires pour l’identification des cas, l’une basée sur les diagnostics déjà établis et l’autre basée sur un screening systématique en population générale, suivi d’une procédure standardisée de diagnostic. La prévalence utilisant les diagnostics déjà établis était de 0,86%, et atteignait 1% lorsque les nouveaux cas identifiés par l’approche de dépistage systématique étaient ajoutés. De même, une étude espagnole 12, basée également sur un dépistage systématique, retrouvait une prévalence de 1%, et 35% des cas n’avaient pas de diagnostic posé avant l’étude. Ces deux études montrent des résultats tout à fait comparables à ceux présentés dans notre étude pour les cas déjà diagnostiqués (prévalence similaire à celle du RHE31) et des prévalences qui continuent à se situer dans la fourchette basse des taux rapportés aux États-Unis par exemple. La prévalence moyenne à 8 ans observée dans le dernier rapport du réseau de surveillance aux États-Unis 13 était ainsi de 1,68%, avec également d’importantes variations selon les sites (de 1,3 à 2,9%). De fortes différences de prévalence existent également selon l’âge auquel la prévalence est estimée. Les études récentes qui retrouvaient les prévalences les plus élevées de l’ordre de 2,5% aux États-Unis 2,3,4 ou au Danemark 14 concernaient des enfants jusqu’à l’âge de 16-17 ans.
Les sex-ratios observés dans les deux registres étaient comparables à ceux retrouvés dans la littérature récente 11,12,13 et semblaient montrer que, malgré les avancées récentes, l’identification des signes de troubles de la communication sociale restait difficile chez les filles spécialement, peut-être du fait de l’utilisation de mécanismes compensatoires 15.
Dans notre population, la proportion d’enfants avec un retard intellectuel allait de 30,4% au RHEOP à 36,0% pour le RHE31 pour les dernières générations étudiées. Ces proportions sont comparables à celle retrouvée dans le réseau américain ADDM 13, avec une proportion moyenne de 31% des enfants. De même, la nette diminution du pourcentage d’enfants avec retard intellectuel au cours du temps observée dans les deux registres est cohérente avec ce qui a été retrouvé aux États-Unis, où cette proportion atteignait 41% des enfants âgés de 8 ans en 2006 16.
La proportion d’enfants avec TSA qui présentaient des comorbidités restait cependant élevée. Si la proportion d’enfants présentant une épilepsie associée a diminué au cours du temps, elle était encore de 3 à 6% sur la dernière période étudiée au RHEOP et RHE31 respectivement. La proportion d’enfants avec un diagnostic de PC associée au TSA était très largement supérieure à la population générale, résultat tout à fait cohérent avec l’association entre ces deux troubles qui a pu être montré dans une étude européenne chez des enfants atteints de PC 17. Enfin le taux de prématurité ou de naissance de petits poids était nettement supérieur à celui attendu en population générale (7,5% en moyenne en France en 2016) 18, conformément au rôle identifié dans la littérature des facteurs périnataux sur les TSA 1.
En conclusion, ces résultats confirment une augmentation des diagnostics de TSA chez les enfants de 8 ans, avec des diagnostics mieux spécifiés et davantage d’enfants sans retard intellectuel associé. Les différences constatées entre les territoires de surveillance de taille relativement restreinte invitent à la prudence sur une éventuelle généralisation de ces données à un niveau national. Cette étude basée sur les registres existants permet d’apporter une estimation actualisée de la prévalence des TSA diagnostiqués à l’âge de 8 ans, de 8 à 10/1 000 pour la dernière génération étudiée, tout à fait comparable à certaines estimations européennes récentes pour les mêmes tranches d’âge, ce qui vient valider l’intérêt d’un tel système de surveillance.
Liens d’intérêt
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêt au regard du contenu de l’article.
Références
The prevalence of parent-reported autism spectrum disorder among US children. Pediatrics. 2018;142(6):e20174161.
(16-17):180-4. https://www.santepubliquefrance.fr/regions/occitanie/documents/article/2010/prevalence-des-deficiences-severes-chez-l-enfant-en-france-et-evolution-au-cours-du-temps
1980-2012. JAMA. 2018;320(17):1811-3.
Citer cet article
128-35. http://beh.santepubliquefrance.fr/beh/2020/6-7/2020_6-7_1.html