Impact de l’âge, du sexe et de l’éducation sur les performances cognitives de sujets de 45 à 75 ans inclus dans la cohorte Constances

// Impact of age, gender and education on cognitive performance in subjects aged from 45 to 75 years in the French CONSTANCES cohort

Thibault Mura1 (t-mura@chu-montpellier.fr), Hélène Amieva2, Marcel Goldberg3, Jean-François Dartigues2, Joël Ankri4, Marie Zins3, Claudine Berr1
1 Inserm U1061, Université de Montpellier, CHRU de Montpellier, Montpellier, France
2 Inserm U1219, Université de Bordeaux, Bordeaux, France
3 Unité Cohortes épidémiologiques en population, UMS 11 Inserm-Université Versailles-Saint Quentin, Villejuif, France
4 Inserm U1168, Université Versailles-Saint-Quentin, Hôpital Sainte-Périne, AP-HP, Paris, France
Soumis le 29.03.2016 // Date of submission: 03.29.2016
Mots-clés : Fonction cognitive | Performance cognitive | Âge | Sexe | Éducation | Cohorte
Keywords: Cognitive function | Cognitive performance | Age | Sex | Education | Cohort

Résumé

Objectif –

L’objectif de notre étude était de quantifier l’importance de l’effet de l’âge, du sexe et de l’éducation sur la mesure transversale de quatre tests neuropsychologiques dans une population âgée de 40 à 75 ans.

Méthodes –

Les fonctions cognitives ont été évaluées chez 25 748 volontaires âgés de 45 à 75 ans, inclus dans la cohorte Constances entre janvier 2012 et mai 2014. Les scores des tests neuropsychologiques utilisés étaient (1) les rappels libres, immédiat et différé, du test « Rappel libre et rappel indicé à 16 items » (RLRI16), (2) les tâches de fluence verbale sémantique et phonémique, (3) le « Digit Symbol Substitution Test » (DSST), et (4) les parties A et B du « Trail Making Test » (TMT-A et B). L’importance des associations a été quantifiée à l’aide de coefficients ω2 représentant les pourcentages de variation des scores pouvant être expliqués par l’âge, le sexe et le niveau d’éducation.

Résultats –

L’âge expliquait 0,6% des variations des scores de fluence verbale ; cette proportion s’élevait jusqu’à 8,1% pour le test  TMT-A. Le sexe rendait compte de 6,3% et 5,0% des variations des deux scores du RL/RI16, 2,5% de celles du DSST et 0,7% de celles de la fluence phonémique. Concernant l’éducation, le niveau d’études expliquait 1,8% des variations du TMT-A et la proportion allait jusqu’à 11,5 % pour le test DSST. Au final, l’âge, le sexe et l’éducation considérés simultanément expliquaient de 8% (pour la fluence sémantique) à 24% (pour la DSST) des variations des scores cognitifs.

Conclusion –

L’âge, le sexe et l’éducation sont fortement associés aux performances cognitives.

Abstract

Objective –

The aim of our study was to quantify the importance of the effect of age, sex and education on four transversal measures of cognitive function in an elderly population age from 45 to 75.

Methods –

Cognitive functions were assessed in 25,748 volunteers (45 to 75-years-old) included in the French CONSTANCES cohort between January 2012 and May 2014, using (1) the Free and Cued Selective Reminding Test (FCSRT, “immediate” and “delayed” free recall scores), (2) Verbal Fluency Tasks (semantic and phonemic), (3) the Digit Symbol Substitution Test (DSST) and (4) Trail Making Test (TMT, parts A and B). The importance of the associations was quantified using ω2 coefficient representing the percentage of variation of cognitive scores which can be explained by age, sex and education level.

Results –

Age explained 0.6% of the variation of the scores of verbal fluency, this proportion reached 8.1% for the TMT-A. Sex was reported for 6.3% and 5.0% of the variation of the two scores of the FCSRT, 2.5% of those of the DSST and 0.7% of those of the phonemic fluency. The level of education explained 1.8% of the variation of the TMT-A, the proportion reached 11.5% for the DSST. Finally, age, sex and education considered simultaneously explained from 8% (for semantic fluency) to 24% (for DSST) of the variations of cognitive scores.

Conclusion –

Age, sex and education are strongly associated with cognitive performance.

Introduction

Avec le vieillissement de la population en Europe et l’augmentation attendue de la prévalence de la démence dans les années à venir, l’étude du vieillissement cognitif est un enjeu majeur de santé publique. Dans ce cadre, l’examen des capacités cognitives est utile pour détecter des troubles cognitifs précoces et/ou pour diagnostiquer une maladie d’Alzheimer. Bien que cette évaluation puisse être considérée comme un examen de routine chez la personne âgée, la variabilité des performances cognitives en fonction des caractéristiques sociodémographiques des personnes peut entrainer des difficultés d’interprétation des résultats. Les associations des scores cognitifs avec l’âge 1,2,3, le sexe 4,5,6 ou l’éducation 7,8 ont déjà largement été étudiées de façon transversale. Cependant, au-delà de la signification statistique de ces associations, il est difficile de se représenter l’impact réel de ces facteurs sur les scores cognitifs. En effet, les publications fournissent généralement des indicateurs d’association sous forme de rapport de cote (odds ratio) ou de différence brute ou ajustée (coefficient bêta), mais rarement sous la forme de « taille d’effet » permettant une comparaison de l’importance des associations à travers différents facteurs et différents tests neuropsychologiques.

L’objectif de notre étude était de quantifier l’importance de l’association de l’âge, du sexe et de l’éducation avec la mesure transversale de quatre tests neuropsychologiques dans une population âgée de 45 à 75 ans.

Matériel et méthodes

Population d’étude

Les participants de la cohorte Constances 9,10 ont été tirés au sort parmi les adultes français affiliés au régime général de l’Assurance maladie, qui couvre plus de 80% de la population française. Dans cette étude, seuls les patients âgés de 45 à 75 ans étaient ciblés pour bénéficier d’une évaluation cognitive. Nos analyses ont donc été effectuées sur les données de participants âgés de 45 à 75 ans inclus entre janvier 2012 et mai 2014 dans l’un des 17 Centres d’examens de santé (CES) de la Sécurité sociale impliqués dans l’étude.

Les participants ont été répartis en six groupes d’âge de 5 ans d’intervalle. Le niveau d’éducation était catégorisé en sept niveaux selon les principales étapes du système éducatif français : (1) sans diplôme, (2) Certificat de formation générale (CFG), Certificat d’études primaires (CEP), Diplôme national du brevet (BEPC ou Brevet des collèges), (3) Certificat d’aptitude professionnelle (CAP), Brevet d’études professionnelles (BEP), (4) Baccalauréat ou diplôme équivalent, (5) Bac +2 ou +3, (6) Bac +4, (7) Bac +5 ou plus.

Tests neuropsychologiques

Une évaluation des capacités cognitives était effectuée dans des conditions standardisées par des neuropsychologues formés (formation vidéo, formation de groupe annuelle et formation sur site au moment du monitoring). Quatre tests neuropsychologiques ont été utilisés pour nos analyses :

  • le test du Rappel libre et du rappel indicé à 16 items (RLRI/16), qui évalue la mémoire épisodique verbale. Après une phase d’encodage durant laquelle le volontaire lit et mémorise 16 mots 4 par 4, il est invité à se rappeler librement autant de mots que possible en 2 minutes. À la fin des 2 minutes, lorsqu’un mot n’est pas restitué, un indice est fourni (le plus souvent la catégorie sémantique, par exemple l’indice « fruit » pour le mot « groseille ») afin de l’aider à retrouver les mots non rappelés. Ce rappel libre, puis indicé, est répété trois fois. Dans notre étude, nous avons utilisé le score du « rappel libre immédiat » qui correspond à la somme du nombre de mots restitués dans les trois essais de rappel libre non indicé (ce score varie de 0 à 48). Vingt minutes après la fin de cette phase, le sujet est à nouveau invité à se rappeler librement (puis avec indiçage) autant de mots que possible en 2 minutes. Le second score utilisé dans notre étude était le « rappel libre différé », correspondant au nombre de mots restitués librement (i.e. sans indiçage ; ce score varie de 0 à 16) ;
  • les tâches de fluences verbales sémantique et phonémique évaluent les compétences linguistiques. Dans ces tâches, il est demandé au sujet de nommer le maximum de mots appartenant à une catégorie sémantique précise pour la fluence sémantique, puis le maximum de mots commençant par une lettre précise pour la « fluence phonémique ». Les scores utilisés correspondent au nombre de mots nommés en 1 minute appartenant à la catégorie « animaux » pour la tâche de fluence sémantique, et commençant par la lettre « R » pour la tâche de fluence phonémique ;
  • le Digit Symbol Substitution Test (DSST) du Wechsler Adult Intelligence Scale-IV (WAIS-IV) évalue la vitesse psychomotrice. Ce test présente sur une feuille de papier une matrice de neuf paires de chiffres-symboles. Une liste de 135 chiffres est présentée dans un ordre aléatoire. Le but du test est d’associer, aussi vite que possible, à chaque chiffre le symbole correspondant à l’aide de la « matrice » initialement fournie. Le score utilisé dans l’article correspond au nombre de symboles correctement associés en 90 secondes ;
  • les parties A et B du Trail Making Test (TMT), pour les fonctions exécutives, les capacités visio-motrice et la vitesse de traitement. Ce test se compose de 25 cercles répartis sur une feuille de papier. Dans la partie A, les cercles sont numérotés de 1 à 25 et les participants doivent les connecter dans l’ordre croissant en traçant une ligne. Dans la partie B, les cercles contiennent soit un numéro (de 1 à 13), soit une lettre (A à L). Les participants doivent les relier dans l’ordre croissant en alternant les chiffres et les lettres (par exemple 1-A-2-B-3-C...). Les scores utilisés dans l’article correspondent au nombre de déplacements corrects dans chaque partie (A et B) divisé par le temps total mis pour relier l’ensemble des cercles multipliés par 10.

Le score du MMSE et les deux scores indicés du RLRI16, disponibles dans l’étude Constances, n’ont pas été analysés en raison de leur distribution non gaussienne et d’un effet plafond majeur ne permettant pas une utilisation valide des méthodes statistiques réalisée pour cet article.

Statistiques

L’importance des associations a été quantifiée à l’aide de coefficients semi-partiels oméga-carrés (ω2) 11 calculés à l’aide d’un modèle de régression linéaire multivarié. Ces coefficients estiment le carré de la corrélation semi-partielle entre deux variables et représentent les pourcentages de variation du score cognitif pouvant être expliqués respectivement par l’âge, le sexe et le niveau d’éducation. Les relations de l’âge et de l’éducation avec les scores neuropsychologiques ont été représentées graphiquement à partir de moyennes ajustées et de leur intervalle de confiance à 95%. Ces estimations ont été produites à l’aide du modèle de régression linéaire multivarié décrit précédemment sur le logiciel SAS® version 9.2 (SAS Institute, Cary, North Carolina).

Résultats

Parmi les 25 748 sujets âgés de 45 à 75 ans inclus dans l’étude, 5,7% à 7,9% avaient des données manquantes sur un ou plusieurs tests neuropsychologiques. Les caractéristiques des participants sont détaillées dans le tableau 1. Les sujets inclus étaient distribués dans l’ensemble des niveaux d’études, y compris les plus bas avec 959 sujets « sans diplôme ».

Tableau 1 : Caractéristiques des participants
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Les pourcentages de variation des scores cognitifs pouvant être expliqués par l’âge, le sexe et le niveau d’éducation sont présentés et illustrés par la figure 1. L’âge expliquait 7,5% des variations du score DSST, 8,1% et 6,4% des variations des parties A et B du TMT et 4,6% et 3,5% de celles des deux scores du RLRI/16 (respectivement « rappel libre immédiat » et « rappel libre différé »). Inversement, seule une petite partie des variations des tâches de fluence sémantique et phonémique étaient expliquées par l’âge (0,6% et 0,6%). Lorsque nous avons examiné deux par deux les catégories d’âge successives (figure 2), nous avons constaté, pour le DSST et les parties A et B du TMT, que l’effet semblait homogène sur l’ensemble des catégories d’âge. Pour les deux scores de rappel du RLRI/16, l’effet semblait d’autant plus important que l’âge avançait. Enfin, pour les tâches de fluence phonémique et sémantique, l’effet de l’âge apparaissait seulement après 60 ans.

Figure 1 : Pourcentages de variation des tests neuropsychologiques pouvant être expliqués par l’âge, le sexe et le niveau d’éducation
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Figure 2 : Moyennes et intervalles de confiance à 95% des scores neuropsychologiques selon les catégories d’âge*
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Le sexe expliquait une part non négligeable des variations des scores du RLRI/16 (6,3% et 5,0% pour le « rappel libre immédiat » et le « rappel libre différé ») et une part modeste du DSST (2,5%) et de la fluence phonémique (0,7%). Pour ces quatre scores, et après ajustement, les femmes obtenaient en moyenne de meilleurs scores que les hommes (tableau 2). Pour les autres tests neuropsychologiques, le niveau d’association avec le sexe était négligeable (0,007% pour le TMT-B) ou nul (< à 0,001% pour le TMT-A et la fluence sémantique).

Tableau 2 : Moyennes ajustées* des scores neuropsychologiques selon le sexe
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Concernant l’éducation, le niveau d’étude expliquait 11,5% des variations du test DSST, 8,9% de celles du TMT-B et 7,4% et 11,8% de celles des deux tâches de fluence verbale sémantique et phonémique. L’association était moins importante avec les deux scores du RLRI/16 (6,8% et 5,2%) et assez faible pour le TMT-A (1,8%). Lorsque nous avons examiné deux par deux les niveaux successifs d’éducation (figure 3), des différences plus importantes ont été observées entre les catégories supérieures au baccalauréat et celles comportant moins d'années d'études (mais avec très peu de différence entre les sujets avec CAP/BEP et ceux ayant un CEP/BEPC) pour tous les tests neuropsychologiques.

Figure 3 : Moyennes et intervalles de confiance à 95% des scores neuropsychologiques selon le nombre d’années d’éducation*
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Au final, les trois facteurs considérés simultanément expliquaient dans leur ensemble de 8% (pour la fluence sémantique) à 24% (pour la DSST) des variations des scores neuropsychologiques.

Discussion

Cette étude a permis de quantifier le niveau d’association de l’âge, du sexe et de l’éducation avec quatre tests neuropsychologiques couramment utilisés en épidémiologie et en clinique. Notre analyse s’est appuyée sur les données d’un grand échantillon issu de la population générale et a permis de fournir des estimations fiables de l’importance de ces effets chez des sujets adultes âgés de 45 à 75 ans.

L’effet de l’âge était important pour presque tous les tests utilisés dans la présente étude. Les moyennes des scores des tests cognitifs étaient plus basses lorsque l’âge avançait, dès 45-50 ans pour la plupart des tests, mais seulement après 55-60 ans pour la fluence phonémique et 60-65 ans pour la fluence sémantique. Ces résultats sont cohérents avec les études transversales antérieures qui ont montré l’existence d’associations plus précoces et plus marquées de l’âge sur la mémoire de travail, la mémoire épisodique et la vitesse de traitement 1,3. L’association était retardée sur les aptitudes verbales 1 et plus prononcée sur la fluence phonémique que sur la fluence sémantique 12. Nos analyses étaient transversales et ne nous permettaient donc pas de distinguer un effet lié au vieillissement cognitif d’un effet lié aux différences intergénérationnelles, aussi appelées « effet cohorte ». Singh-Manoux et coll. 2 ont montré, dans une étude portant sur des sujets anglais, que l’analyse transversale du vieillissement cognitif avec l’âge surestimait l’effet « vieillissement » par rapport aux analyses longitudinales. Cette surestimation n’était observée que chez les femmes en raison d’un niveau d’éducation plus faible chez les femmes d’âge plus avancé (« effet cohorte »). Dans la même publication 2, l’ajustement sur le niveau éducation diminuait partiellement l’effet de l’âge en corrigeant ce biais. Dans notre étude, nous avons ajusté notre modèle sur l’éducation, ce qui doit minimiser cet « effet cohorte ». Nous pouvons également noter que les analyses longitudinales ne sont pas dépourvues de biais, puisqu’elles sous-estiment l’effet de l’âge en raison d’un effet d’apprentissage, lié à la répétition des tests dans le temps, et d’une rétention sélective des personnes qui seront conservées dans l’analyse (biais d’attrition) au fur et à mesure des visites de suivi. On peut noter que l’étude Constances n’inclut par tirage au sort que des sujets de moins de 70 ans. Néanmoins, certain(e)s conjoints(tes) de volontaires tiré(e)s au sort demandent à participer également. Ils sont alors acceptés sous forme de candidatures spontanées. Cela explique la sous-représentation de la tranche d’âge 70-75 ans dans nos résultats.

Le sexe expliquait une part non négligeable des variations du RLRI/16, du DSST et de la fluence phonémique. Ce résultat est cohérent avec les publications existantes qui ont mis en évidence que les femmes obtenaient en moyenne de meilleurs scores que les hommes dans les épreuves faisant appel à la mémoire épisodique verbale 4,5, ainsi que dans les tâches de fluence phonémique, mais pas de fluence sémantique 6. Notre étude souligne que la taille de l’effet observé est importante pour le RLRI16 (mémoire verbale épisodique) puisque le sexe explique une part plus importante de variation que l’âge ou que l’éducation pour ce test.

L’éducation était l’un des facteurs le plus fortement impliqué dans les variations des tests neuropsychologiques. L’éducation est connue pour être associée à presque toutes les fonctions cognitives 7,8. En accord avec d’autres études, l’association était plus importante dans le domaine de la fluence verbale et moindre pour la vitesse de traitement (TMT-A). Cet effet existait dans l’ensemble des niveaux d’éducation considérés, ce qui souligne l’importance de prendre en compte ce facteur avec suffisamment de précision lors de l’ajustement sur ce facteur dans les études épidémiologiques. L’association entre l’éducation et les performances cognitives peut être interprétée de différentes façons, par le mode de vie avec des facteurs de risque (notamment vasculaire) qui vont être moins fréquents chez les sujets avec un niveau d’éducation supérieur, par les interactions sociales, par l’activité professionnelle et/ou les activités de loisir, qui vont être plus fréquentes chez ces sujets et permettre le maintien d’une activité cognitive avec l’âge 7, et/ou par un développement cérébral particulier lié à une stimulation plus importante.

D’autres facteurs, connus pour influencer les fonctions cognitives, n’ont pas été rapportés dans cet article. Cependant, une analyse parallèle portant sur 11 700 volontaires issus de la même étude, a montré que la prise en compte des facteurs cardiovasculaires (diabète, HTA), psychologiques (dépression) ou liés au mode de vie (tabac, alcool, sédentarité) ne permettait d’expliquer qu’une très faible part de la variabilité des tests neuropsychologiques au-delà de celle associée aux caractéristiques sociodémographiques 13.

Notre étude a de nombreux atouts, notamment sa réalisation en population générale et la très grande taille de son échantillon, qui permet de disposer d’une bonne puissance pour étudier des facteurs dont la taille d’effet attendu est modeste. Une limite de l’étude est qu’elle ne permet pas l’inclusion des travailleurs indépendants et issus du monde agricole. Cependant, le régime général de l’Assurance maladie dans lequel nos sujets sont choisis au hasard couvre plus de 80% de la population générale. Comme dans toutes les études épidémiologiques, un biais de sélection lié aux refus de participation est possible. Ce type de biais peut impacter la représentativité de l’échantillon en sélectionnant des sujets présentant plus fréquemment un niveau d’éducation élevé ou un meilleur état de santé. Ce type de biais n’affecte cependant que peu les études analytiques 14 et devrait avoir un impact modéré sur nos résultats.

En conclusion, l’âge, le sexe et l’éducation apparaissent comme fortement associés aux performances cognitives en expliquant de 8% à 24% des variations des scores neuropsychologiques de notre étude.

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Citer cet article

Mura T, Amieva H, Goldberg M, Dartigues JF, Ankri J, Zins M, et al. Impact de l’âge, du sexe et de l’éducation sur les performances cognitives de sujets de 45 à 75 ans inclus dans la cohorte Constances. Bull Epidémiol Hebd. 2016;(35-36):646-53. http://invs.santepubliquefrance.fr/beh/2016/35-36/2016_35-36_6.html