Prévalence des symptômes et maladies respiratoires dans une cohorte de travailleurs du monde agricole dans cinq départements français en 2010

// Prevalence of respiratory symptoms and diseases in a cohort of agricultural workers in five frech districts in 2010

Laetitia Bénézet (laetitia.benezet@santepubliquefrance.fr), Marie-Christine Delmas, Béatrice Geoffroy-Perez, Yuriko Iwatsubo
Santé publique France, Saint-Maurice, France
Soumis le 19.10.2018 // Date of submission: 10.19.2018
Mots-clés : Prévalence | Maladies respiratoires | Symptômes respiratoires | Travail | Agriculture
Keywords: Prevalence | Respiratory diseases | Respiratory symptoms | Occupation | Agriculture

Résumé

Introduction –

Dans l’environnement agricole, de nombreuses nuisances ayant un impact sur la santé respiratoire sont présentes.

Méthodes –

Nous avons analysé les données sur la santé respiratoire recueillies en 2010 par questionnaire dans une cohorte de travailleurs affiliés au Régime agricole dans cinq départements de France métropolitaine (la cohorte pilote Coset-MSA), et décrit les associations avec certaines caractéristiques professionnelles (salarié/non- salarié, production principale de l’exploitation).

Résultats –

La prévalence de l’asthme actuel était estimée à 4% ou 6,1% selon la définition utilisée, et celle de la toux ou expectoration chroniques à 8,3%. Après ajustement sur l’âge, le sexe, la corpulence et le tabagisme, les analyses restreintes aux salariés de l’agriculture, de la pêche ou de la forêt et aux non-salariés montraient des prévalences d’asthme actuel et de toux ou expectoration chroniques augmentées chez les salariés par rapport aux non-salariés. La prévalence de l’asthme la plus élevée était observée dans les activités non agricoles et celle de la toux ou expectoration chroniques dans le secteur de l’élevage. Cependant, les différences observées n’étaient pas statistiquement significatives.

Conclusion –

Cette étude pilote montre qu’il est possible de mettre en place une surveillance épidémiologique de la santé respiratoire dans la population des affiliés au Régime agricole en France. Cette surveillance va se poursuivre à partir des données de l’extension nationale de la cohorte Coset-MSA dont le recrutement s’est achevé en 2018.

Abstract

Introduction –

Agricultural environment contains many agents that negatively influence respiratory health.

Methods –

We studied data on respiratory health collected in a cohort of active workers affiliated to the Agricultural Social Mutual Fund (Mutualité Sociale Agricole – MSA) in five French districts in 2010 (COSET-MSA pilot study) and described the associations between respiratory health and occupational characteristics.

Results –

The prevalence of current asthma was estimated at 4 or 6.1% according to the definition used, and that of chronic cough or sputum at 8.3%. After adjustment for age, sex, body mass index and smoking habits, the analyses limited to the subgroup of salaried workers in agriculture, hunting and forestry and self-employed workers showed a higher prevalence of current asthma and of chronic cough or sputum in salaried compared to self- employed workers. The highest prevalence of current asthma was observed in “non agricultural” activities and that of chronic cough or sputum in livestock activities. However, the differences were not statistically significant.

Conclusion –

This pilot study showed that epidemiological surveillance of respiratory health among affiliates in the agricultural social security can be implemented in France. The COSET-MSA cohort study at national level, whose recruitment phase ended in 2018, will enable us to continue this surveillance.

Introduction

L’asthme et la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) sont des maladies respiratoires fréquentes. La prévalence de l’asthme actuel chez des personnes âgées de 15 ans ou plus a été estimée à 6% en France en 2003 1. Les estimations de prévalence de la BPCO en France sont rares. Du fait du sous-diagnostic important de cette maladie, elle ne peut être estimée par des enquêtes déclaratives et les enquêtes comprenant une mesure de la fonction respiratoire peuvent être difficiles à réaliser en population générale. Dans les enquêtes par questionnaire, la BPCO est approchée par la bronchite chronique (définie par la présence d’une toux et d’une expectoration chroniques). En 2003, chez les plus de 45 ans résidant en France, la prévalence de la bronchite chronique a été estimée à 3,5% et celle de la toux ou expectoration chroniques à 9,6% 2.

Ces maladies relèvent de causes multifactorielles, individuelles et environnementales. Les facteurs professionnels seraient responsables d’environ 18% des asthmes et de 15% des BPCO ou bronchites chroniques 3,4. L’environnement professionnel agricole expose les travailleurs à de nombreuses nuisances ayant un possible impact sur la santé respiratoire (poussières, micro-organismes, mycotoxines, gaz, pesticides, désinfectants…) 5. En France, des travaux antérieurs ont étudié certains aspects de la santé respiratoire chez les travailleurs du monde agricole 6,7,8,9,10. Toutefois, ces études sont bien souvent limitées à des secteurs d’activité spécifiques ou à des zones géographiques restreintes et il existe peu de données de surveillance à l’échelle nationale.

Santé publique France a mis en place une cohorte nationale de surveillance épidémiologique d’actifs relevant du Régime agricole qui s’intéresse notamment à la santé respiratoire. Une étude pilote menée dans cinq départements a eu lieu en 2010 11. L’objectif principal du travail présenté ici était d’estimer, à partir des données de cette étude pilote, la prévalence des maladies et symptômes respiratoires chez les travailleurs affiliés au Régime agricole en 2010. L’objectif secondaire était de décrire les associations entre les maladies et symptômes respiratoires et les caractéristiques professionnelles (salarié/non-salarié, production principale de l’exploitation) dans la sous-population constituée des salariés du secteur primaire et des non-salariés.

Méthodes

La cohorte Coset-MSA

Dans le cadre du programme Coset (Cohortes pour la surveillance épidémiologique en lien avec le travail), Santé publique France, en partenariat avec la Mutualité sociale agricole (MSA), met en oeuvre la cohorte Coset-MSA auprès des actifs relevant du Régime agricole 11. Une étude pilote a été menée en 2010 auprès d’un échantillon de 10 000 personnes âgées de 18 à 65 ans au 31 décembre 2008, tirées au sort dans la base « carrière » du Régime parmi la population active en 2008 dans cinq départements : Bouches-du-Rhône, Saône-et-Loire, Pas-de-Calais, Finistère, Pyrénées-Atlantiques. Un auto-questionnaire postal a été envoyé au domicile des individus tirés au sort..

Variables étudiées

Le volet santé respiratoire de l’auto-questionnaire est issu de l’enquête European Community Respiratory Health Survey (ECRHS) 12. Les variables suivantes ont été étudiées :

asthme actuel (définition 1), défini par une crise d’asthme au cours des 12 derniers mois ou un traitement actuel pour asthme ;

asthme actuel (définition 2), défini par un diagnostic d’asthme confirmé par un médecin, avec au moins un symptôme au cours des 12 derniers mois (sifflements, réveil avec une sensation de gêne respiratoire, crise d’essoufflement au repos, après un effort intense, réveil par une crise d’essoufflement, crise d’asthme) ou avec un traitement actuel pour asthme 13 ;

dyspnée, selon l’échelle modifiée du Medical Research Council 14 ;

toux ou expectoration chroniques, définies par une toux ou une expectoration au lever ou pendant la journée ou la nuit, en hiver, pendant trois mois consécutifs chaque année.

Le statut du dernier emploi exercé a été étudié à partir des informations recueillies dans l’auto-questionnaire selon quatre modalités :

non-salarié, qui comprend les exploitants agricoles (culture, élevage, activités équestres…), leurs conjoints-collaborateurs et aides familiaux ainsi que les chefs d’entreprises relevant du Régime agricole (i.e. travaux agricoles et forestiers, sylviculture, paysagisme principalement) ;

salarié du secteur primaire (i.e. agriculture, aquaculture, activités de pêche à pied, sylviculture, forêt, chasse) ;

salarié du secteur secondaire (i.e. activités de transformation des matières premières avec principalement des industries agroalimentaires) ;

salarié du secteur tertiaire (i.e. commerce, activités financières, services aux entreprises et aux particuliers, enseignement agricole, organisme de protection sociale agricole…).

Pour les salariés du secteur primaire et les non-salariés, le secteur d’activité détaillé qui correspond à la production principale de l’exploitation ou de l’entreprise a été examiné selon trois catégories : élevage (dont culture et élevage associés et activités de services à l’élevage), culture (dont les activités de services aux cultures) et activité non agricole (i.e. pêche et aquaculture, sylviculture et forêt, chasse, entreprises paysagistes et secteurs non précisés).

Les caractéristiques individuelles étudiées étaient le sexe, l’âge et l’indice de masse corporelle (IMC). Quatre classes de corpulence ont été définies : minceur ou maigreur (IMC<18,5 kg/m2), corpulence normale (IMC≥18,5 et IMC<25), surpoids (IMC≥25 et IMC<30) et obésité (IMC≥30). Le statut tabagique a été étudié selon trois modalités : fumeur (au moins une cigarette par jour), ex-fumeur (arrêt du tabac depuis au moins un an), non-fumeur.

Analyses statistiques

Les caractéristiques de la population ont été décrites selon le sexe. Les prévalences pondérées et leur intervalle de confiance de Clopper-Pearson à 95% ont été estimés pour chaque indicateur sanitaire dans l’ensemble de la population source et selon le statut du dernier emploi exercé. Des tests d’indépendance entre chaque maladie ou symptôme respiratoire et le statut du dernier emploi ont été réalisés à l’aide du Chi2 modifié de Rao-Scott.

Les relations entre, d’une part, l’asthme actuel et la toux ou expectoration chroniques et, d’autre part, les caractéristiques professionnelles (statut du dernier emploi et secteur d’activité détaillé) ont été étudiées dans la sous-population concernée par les expositions professionnelles spécifiques de l’environnement agricole, c’est-à-dire celle des salariés du secteur primaire et des non-salariés. Des ratios de prévalences ont été estimés à l’aide de régressions de Poisson avec variance robuste. Les modèles ont été ajustés sur le sexe, l’âge, l’IMC et le statut tabagique. Les variables quantitatives ont été modélisées par des polynômes fractionnaires pour prendre en compte une possible relation non linéaire avec la prévalence.

Toutes les analyses ont pris en compte le poids de sondage et un facteur correctif pour la non-réponse totale afin d’obtenir des estimations à l’échelle de la population source. La correction de la non- réponse par repondération consiste à augmenter le poids des répondants de façon à ce qu’ils représentent les non-répondants. Elle a été effectuée selon la méthode des scores et s’est appuyée sur les données disponibles pour l’ensemble des personnes tirées au sort. Il s’agissait des données socioprofessionnelles de la MSA : âge, département de travail, statut salarié/non-salarié, secteur d’activité de l’entreprise, durée et année de fin du dernier emploi, ainsi que des données de santé issues du Système national d’information inter-régimes de l’assurance maladie (Sniiram) : recours à un professionnel de santé (généraliste, spécialiste, dentiste, laboratoire d’analyse, auxiliaire médical), remboursements de médicaments, hospitalisations, indemnités journalières. Enfin, un calage a été réalisé en utilisant les distributions par sexe, classe d’âges, statut professionnel et département dans la population répondant aux critères d’inclusion 15.

Les analyses ont été réalisées en utilisant les commandes surveyfreq du logiciel SAS® et les commandes poisson, mfp et svy du logiciel Stata®.

Résultats

Au total, 2 363 personnes ont répondu à l’auto-questionnaire postal, soit un taux de réponse de 24%. La population était composée de 62% d’hommes et l’âge moyen était de 44 ans (tableau 1). Les hommes étaient 49% à être en surcharge pondérale (surpoids ou obésité) contre 35% des femmes. Les hommes étaient en grande partie non-salariés (41%) ou salariés du secteur primaire (35%) ; les femmes étaient majoritairement réparties en trois catégories : non-salariées (32%), salariées du tertiaire (31%) et salariées du primaire (28%). La prévalence du tabagisme actuel était de 27%. Elle différait significativement entre hommes et femmes (28% versus 22%, p<0,001) et entre nonsalariés et salariés (19% versus 32%, p<0,001).

Tableau 1 : Caractéristiques de la population. Étude pilote Coset-MSA, 2010 (n=2 363)
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La prévalence de l’asthme actuel était de 4,0% selon la définition 1 et de 6,1% selon la définition 2. La prévalence de la toux ou expectoration chroniques était de 8,3% (tableau 2). La prévalence des symptômes évocateurs d’asthme variait de 3% pour les réveils par une crise d’essoufflement à 20% pour les réveils par une quinte de toux. Les femmes déclaraient plus fréquemment une dyspnée (25% versus 14%, p<0,001) et des réveils par une quinte de toux (25% versus 17%, p<0,001).

Tableau 2 : Prévalence des symptômes et maladies respiratoires. Étude pilote Coset-MSA, 2010 (n=2 363)
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Les différences de prévalence selon le statut du dernier emploi étaient significatives pour la plupart des symptômes respiratoires (réveils par une quinte de toux, avec une sensation de gêne respiratoire ou par une crise d’essoufflement, crise d’essoufflement au repos, dyspnée) (figure).

Figure : Prévalence des symptômes et maladies respiratoires selon le statut du dernier emploi. Étude pilote Coset-MSA, 2010 (n=2 363)
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Les associations entre les caractéristiques professionnelles et l’asthme actuel (définition 2), d’une part, et la toux ou expectoration chroniques d’autre part, ont été étudiées chez les salariés du secteur primaire et les non-salariés (tableau 3). Après prise en compte des facteurs d’ajustement individuels, les prévalences de l’asthme actuel et de la toux ou expectoration chroniques étaient plus élevées chez les salariés par rapport aux non-salariés, mais les différences n’étaient pas statistiquement significatives. Selon le secteur, la prévalence de l’asthme actuel la plus élevée était observée pour le secteur des activités non agricoles et la prévalence de la toux ou expectoration chroniques la plus élevée était observée dans le secteur de l’élevage, mais les différences n’étaient pas statistiquement significatives. L’analyse basée sur l’autre définition de l’asthme (définition 1) donnait des résultats similaires (résultats non présentés).

Tableau 3 : Ratio de prévalences de l’asthme actuel et de la toux ou expectoration chroniques selon les caractéristiques du dernier emploi. Étude pilote Coset-MSA, 2010, salariés du secteur primaire et non-salariés (n=1 583)
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Discussion

Dans cette étude portant sur une population d’actifs relevant du Régime agricole, la prévalence de l’asthme actuel était estimée à 4% ou 6% selon la définition retenue et celle de la toux ou expectoration chroniques à 8,3%. Les prévalences de symptômes respiratoires les plus élevées étaient observées chez les salariés du primaire et les plus basses chez les non-salariés. Les analyses multivariées restreintes à ces deux sous-groupes mettaient en évidence un risque augmenté d’asthme actuel chez les travailleurs salariés et dans les activités non agricoles et un risque de toux ou expectoration chroniques augmenté chez les salariés et dans le secteur de l’élevage. Cependant, les différences n’étaient pas statistiquement significatives.

Nos estimations de prévalence ne sont pas strictement comparables à celles issues d’autres enquêtes réalisées en France, en raison notamment de différences dans les définitions des indicateurs utilisées et dans les tranches d’âge étudiées. En 2003, à partir d’un échantillon aléatoire de la population de 15 ans ou plus en France métropolitaine, la prévalence de l’asthme actuel avait été estimée à 6% et celle de la toux ou expectoration chroniques à 7,9% chez les 45-54 ans et à 9,4% chez les 55-64 ans 1,2. Dans une cohorte de volontaires assurés à la MSA recrutés en 2005-2007 et dont l’âge moyen (63 ans) était supérieur de 20 ans à celui de notre population d’étude, 8% des participants déclaraient avoir eu au cours de leur vie un diagnostic d’asthme porté par un médecin et 8,4% un diagnostic de bronchite chronique 7,8.

Concernant l’asthme actuel, l’analyse multivariée restreinte aux salariés du secteur primaire et aux nonsalariés a montré que la prévalence ne différait pas selon l’orientation agricole (culture ou élevage), ce qui est concordant avec l’étude réalisée par Mazurek et coll. aux États-Unis 16. Dans notre étude, la prévalence de l’asthme actuel la plus élevée était observée chez les travailleurs des activités non agricoles. Au sein de cette catégorie, la prévalence était la plus élevée chez les paysagistes. Les effectifs restreints n’ont pas permis d’étudier spécifiquement ces travailleurs, qui ont probablement des conditions d’expositions différentes des travailleurs agricoles. Il a été montré que le risque d’asthme allergique était diminué chez les personnes ayant été en contact avec un environnement agricole dans l’enfance 17. Ce phénomène protecteur pourrait être plus important chez les non-salariés, a priori plus nombreux à avoir vécu dans une ferme, ce qui pourrait expliquer que le ratio de prévalences pour l’asthme actuel restait augmenté, bien que non significativement, chez les salariés par rapport aux non-salariés, après prise en compte des facteurs d’ajustement. Les résultats de l’analyse multivariée étaient similaires quelle que soit la définition de l’asthme actuel utilisée (définition 1 ou 2).

Concernant la toux ou expectoration chroniques, l’analyse bivariée mettait en évidence des prévalences significativement augmentées chez les salariés. Une partie de ces différences peut s’expliquer par le fait que salariés et non-salariés n’ont pas les mêmes comportements vis-à-vis du tabac, facteur de risque principal de la bronchite chronique. En effet, il a été montré que la prévalence du tabagisme était inférieure chez les agriculteurs 18, ce que l’on retrouve dans notre étude. Après prise en compte des facteurs d’ajustement (âge, sexe, corpulence, tabagisme), le ratio de prévalences restait augmenté, bien que non significativement, chez les salariés par rapport aux non-salariés, suggérant que les caractéristiques personnelles n’expliquaient pas totalement les différences observées. Une hypothèse possible est que, pour un même secteur d’activité, les tâches exercées et donc les conditions d’expositions professionnelles seraient différentes entre non-salariés et salariés.

Des études portant sur des populations agricoles ont mis en évidence une prévalence de la bronchite chronique ou de la BPCO plus élevée chez les travailleurs du secteur de l’élevage 10,19. Dans notre étude, après ajustement, le risque de toux ou expectoration chroniques le plus élevé était observé dans ce secteur d’activité, mais la différence n’était pas statistiquement significative.

Notre étude comporte des limites. Le taux de participation dans la cohorte Coset-MSA n’excédant pas 25%, la non-réponse totale est susceptible d’engendrer un biais de sélection. En s’appuyant sur des données professionnelles et des données de santé, les poids de sondage initiaux ont été corrigés pour prendre en compte la non-réponse. Cependant, il est possible que cette méthode ne corrige pas complètement le biais de sélection. Pour l’extension nationale, l’impact de la correction de la non-réponse sur les estimations de la prévalence des maladies et symptômes respiratoires sera étudié en détail. Par ailleurs, les prévalences ont été estimées sans prendre en compte la non-réponse partielle. Toutefois, cette dernière était faible dans le questionnaire respiratoire (2,0% à 5,3% selon les items) et son impact sur les estimations est donc vraisemblablement limité. Les faibles effectifs n’ont pas permis d’étudier finement les orientations agricoles. Or, des études ont montré que les associations avec les maladies respiratoires variaient selon le type de culture ou d’élevage 6,7,8,10,19,20,21. Par ailleurs, en analyse multivariée, aucune association significative avec les caractéristiques professionnelles n’a été mise en évidence, probablement en raison de la faible taille de notre échantillon. Les données de l’extension nationale de la cohorte Coset-MSA permettront d’étudier ces associations sur un effectif bien plus important. Conduite dans cinq départements métropolitains, notre étude ne permet pas de généraliser les résultats observés à la population nationale du Régime agricole.

Les nuisances professionnelles à l’origine de l’asthme ou de la BPCO sont nombreuses dans le milieu agricole. Il est primordial de disposer d’indicateurs quantitatifs permettant d’identifier les secteurs ou professions à risque et contribuer ainsi à l’amélioration des stratégies de prévention des maladies respiratoires chroniques au sein de la population agricole. Les analyses réalisées à partir des données de l’étude pilote Coset-MSA montrent qu’une surveillance épidémiologique de la santé respiratoire dans la population de travailleurs agricoles est possible. Il est important de poursuivre cette surveillance grâce aux données de la cohorte nationale Coset-MSA, dont le recrutement d’environ 27 000 personnes s’est achevé en juillet 2018. Cette cohorte permettra d’approfondir les connaissances sur les relations entre maladies respiratoires chroniques et statut professionnel, types de cultures ou d’élevages et expositions professionnelles, et de mieux caractériser les groupes les plus à risque à cibler prioritairement pour la prévention.

Remerciements

À la Caisse centrale de la Mutualité sociale agricole pour son implication dans la mise en place de la cohorte Coset-MSA. À l’ensemble de l’équipe en charge de la cohorte Coset-MSA à Santé publique France et notamment à Guilhem Deschamps pour son travail sur les données professionnelles. À Laurence Chérié-Challine, Jean-Baptiste Richard et Yann Le Strat pour leur relecture de cet article.

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Citer cet article

Bénézet L, Delmas MC, Geoffroy-Perez B, Iwatsubo Y. Pré‑valence des symptômes et maladies respiratoires dans une cohorte de travailleurs du monde agricole dans cinq départements français en 2010. Bull Epidémiol Hebd. 2019;(7):121-7. http://invs.santepubliquefrance.fr/beh/2019/7/2019_7_1.html