Découvertes de séropositivité VIH chez les seniors en France, 2008-2016
// New HIV diagnoses in people aged 50 years or older in France, 2008-2016
Résumé
Cet article présente les caractéristiques des seniors (personnes âgées de 50 ans et plus) ayant découvert leur séropositivité VIH en 2016, en les comparant à celles des adultes de 25 à 49 ans à partir des déclarations obligatoires d’infection à VIH.
En 2016, le nombre de seniors ayant découvert leur séropositivité a été estimé à 1 184 [IC95%: 1 094-1 274], soit 20% de l’ensemble des découvertes. Ce nombre a régulièrement augmenté entre 2008 et 2014, cette augmentation concernant les hommes ayant des rapports sexuels avec les hommes (HSH) et les femmes nées à l’étranger contaminées par rapports hétérosexuels.
Les seniors ayant découvert leur séropositivité en 2016 se différenciaient des plus jeunes par une moindre proportion d’HSH et une proportion plus élevée d’hétérosexuels nés en France. Les proportions de personnes n’ayant jamais été testées pour le VIH avant la découverte de séropositivité et de celles diagnostiquées à un stade avancé de l’infection étaient significativement plus élevées chez les seniors que chez les 25-49 ans (respectivement 48% vs 42% et 38% vs 26%). La part des infections récentes chez les seniors (28%) témoigne de prises de risque dans cette classe d’âge.
Ce niveau de dépistage insuffisant chez les seniors peut être expliqué par une moindre perception du risque de contamination par le VIH, à la fois par les personnes elles-mêmes mais également par les professionnels de santé, alors que l’exposition à l’infection persiste au-delà de 50 ans. Il est donc important que les actions de prévention incluent cette population.
Abstract
This article presents the characteristics of new HIV diagnoses among seniors (aged ≥50 years) in 2016, and their comparison with those of adults aged 25 to 49 years of age, based on data from the HIV mandatory reporting in France.
In 2016, 1,184 [CI95%: 1,094-1,274] older adults were estimated to be newly diagnosed, accounting for 20% of all new HIV diagnoses. This number has steadily increased from 2008 to 2014; this increase affected men who have sex with men (MSM) and foreign-born women infected through heterosexual sex.
Older adults newly diagnosed in 2016 differ from the youngest by a lower proportion of MSM and a higher proportion of heterosexuals born in France. The proportions of people who have never been tested for HIV before their diagnosis and of those diagnosed at an advanced stage of infection were significantly higher among older people than in the 25-49 year-olds (respectively 48% vs 42% and 38% vs 26%). The proportion of recent infections among seniors (28%) shows evidence of risk-taking behaviors in this population.
This low level of HIV screening among older adults may be explained by a lower perception of HIV transmission, both in older adults and health professionals while HIV infection still occurs among people aged 50 years or older. This shows the importance of including this population in prevention programs.
Introduction
Durant la dernière décennie, l’infection par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) chez les personnes âgées de 50 ans et plus a fait l’objet de plusieurs études conduites dans les pays développés, qui ont constaté une tendance à l’augmentation du nombre de découvertes d’infection à VIH chez les personnes de cette classe d’âge 1,2,3,4,5,6. Dans l’ensemble des pays de l’Union européenne et de l’Espace économique européen (EU/EEE), ce nombre, rapporté à la population générale du même âge, a augmenté en moyenne de 2,1% chaque année entre 2004 et 20154.
En France, le système de surveillance de l’infection à VIH, coordonné par Santé publique France, repose en partie sur la déclaration obligatoire (DO) des nouveaux diagnostics d’infection à VIH 7. Les données ainsi recueillies permettent de connaître le nombre et les caractéristiques des personnes découvrant leur séropositivité VIH afin d’orienter les actions de prévention, de dépistage et de prise en charge, et apportent des éléments permettant leur évaluation. L’objectif de cet article est d’analyser les découvertes de séropositivité en 2016 chez les personnes âgées de 50 ans et plus (dénommées « seniors ») ainsi que l’évolution du nombre de ces découvertes depuis 2008.
Méthode
La DO du VIH est basée sur une déclaration conjointe aux autorités sanitaires (Agences régionales de santé et Santé publique France) du biologiste ayant confirmé le diagnostic d’infection à VIH et du clinicien prescripteur du test. Depuis avril 2016, cette déclaration doit se faire en ligne, via l’application e-do (www.e-do.fr).
Parmi les variables recueillies dans la DO du VIH, ont été analysés pour cet article les caractéristiques sociodémographiques des personnes (âge, sexe, pays de naissance et région de domicile), l’année de découverte de la séropositivité VIH, les antécédents de sérologie VIH négative, le mode de contamination, le nombre de lymphocytes CD4 et le stade clinique au moment du diagnostic, le résultat du test d’infection récente et les co-infections par une infection sexuellement transmissible (IST) bactérienne.
Les antécédents de sérologie VIH négative ont été regroupés en quatre classes, en fonction du délai entre la date du dernier test négatif et celle de la découverte de la séropositivité : inférieur à 12 mois, de 12 à 24 mois, supérieur à 24 mois, et « aucun » si aucune sérologie antérieure à la découverte de séropositivité n’avait été déclarée.
Un indicateur du délai entre contamination et diagnostic a été défini à partir de la combinaison du nombre de lymphocytes CD4 et du stade clinique au diagnostic. Un diagnostic a été considéré à un stade :
–« avancé » de l’infection si les CD4 étaient inférieurs à 200/mm3 en dehors d’une primo-infection, ou si la personne était au stade sida ;
–« intermédiaire » si les CD4 étaient supérieurs ou égaux à 200/m3 et inférieurs à 500/mm3 et si la personne était à un stade asymptomatique ou symptomatique non sida ;
–« précoce » si les CD4 étaient supérieurs ou égaux à 500/mm3 en l’absence de pathologie sida ou si la personne était en primo-infection.
Le test d’infection récente, réalisé par le Centre national de référence du VIH à partir d’un échantillon de sang déposé sur buvard par le biologiste, a permis de déterminer si l’infection par le VIH avait eu lieu, en moyenne, dans les six mois précédant la découverte de la séropositivité.
Les co-infections par une IST concernaient trois IST bactériennes (syphilis quel qu’en soit le stade, gonococcie et infection à Chlamydia trachomatis, dont la lymphogranulomatose vénérienne rectale), qu’elles aient été diagnostiquées de façon concomitante à la découverte de la séropositivité VIH ou dans les 12 mois précédents.
À partir du nombre de cas déclarés, le nombre total de découvertes de séropositivité VIH a été estimé en prenant en compte les délais de déclaration, le défaut d’exhaustivité, ainsi que les valeurs manquantes. La correction pour les délais de déclaration a été réalisée à partir de la distribution des délais des années antérieures et repose sur l’hypothèse de sa stabilité dans le temps. L’exhaustivité a été calculée en comparant le nombre de notifications reçues avec le nombre de sérologies positives non anonymes dans LaboVIH (système de surveillance de l’activité de dépistage du VIH dans les laboratoires). Cette exhaustivité a été estimée à 70% [66,6%-73,5%] en 2015. Enfin, les données ont été corrigées en utilisant une méthode d’imputation multiple 8 pour prendre en compte les valeurs manquantes des variables suivantes : mode de contamination, pays de naissance, stade clinique, nombre de CD4, antécédents de sérologie VIH négative, test d’infection récente et co-infections par une IST.
L’analyse a été réalisée à partir des déclarations reçues jusqu’au 30 juin 2017. Elle a permis de décrire les caractéristiques des seniors ayant découvert leur séropositivité VIH en 2016 et de les comparer à celles des personnes de 25 à 49 ans. Les seniors ont été subdivisés en trois classes d’âge : 50-59 ans, 60-69 ans et 70 ans et plus.
La tendance du nombre annuel de découvertes chez les seniors de 2008 à 2016 a été testée par la méthode des moindres carrés pondérée par la variance. Les différences des caractéristiques entre les seniors et les 25-49 ans ont été déterminées par les tests du rapport de vraisemblance à l’aide de la procédure Logistic et Mianalyse du logiciel SAS® (SAS version 9.4, SAS Inc, Cary, NC, États-Unis).
Des taux de découvertes de séropositivité par classes d’âge ont été calculés pour l’année 2016, en utilisant les données de population de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) au 1er janvier 2017 9.
Résultats
Nombre de découvertes de séropositivité VIH
Le nombre de personnes ayant découvert leur séropositivité VIH en 2016 a été estimé à 6 003 [IC95%: 5 751-6 255], dont 1 184 [1 094-1 274] étaient des seniors, soit 20% de l’ensemble des découvertes. La très grande majorité des seniors avaient entre 50 et 59 ans (73%), les 60-69 ans représentant 23% et ceux de 70 ans et plus 4%.
Le nombre annuel de découvertes chez les seniors a augmenté, passant de 1 041 en 2008 à 1 268 en 2014, soit 22% d’augmentation (p=0,001), puis s’est stabilisé. L’augmentation a essentiellement concerné les 50-59 ans et les 60-69 ans, alors que le nombre est resté stable chez les personnes âgées de 70 ans et plus. Chez les 25-49 ans, le nombre de découvertes a régulièrement diminué sur la période 2008-2016, passant de 4 720 à 4 079, soit une diminution de 14% (p=0,002) (figure 1).
Taux de découvertes de séropositivité VIH
Le nombre de découvertes de séropositivité VIH en 2016 chez les seniors, rapporté à la population du même âge, était de 46 par million d’habitants, taux 4 fois plus faible que celui des 25-49 ans (194 par million d’habitants) (tableau 1).
Chez les seniors, le taux de découvertes le plus élevé était observé chez les 50-59 ans (98 par million d’habitants). Au sein de chacune des classes d’âge, les taux étaient toujours plus importants chez les hommes que chez les femmes (d’un facteur 3 environ).
Caractéristiques des seniors ayant découvert leur séropositivité (tableau 2)
Sexe, mode de contamination et lieu de naissance
En 2016, près des trois-quarts (72%) des seniors ayant découvert leur séropositivité VIH étaient des hommes, la moitié d’entre eux (51%) ayant été contaminés lors de rapports hétérosexuels et l’autre moitié (47%) par des rapports sexuels entre hommes. Cette dernière proportion était moindre que celle observée chez les hommes de 25-49 ans, dont les deux tiers (66%) ont été contaminés lors de rapports entre hommes.
Parmi les hommes seniors hétérosexuels, 53% sont nés à l’étranger (dont les deux-tiers en Afrique subsaharienne), proportion plus faible que chez les 25-49 ans (70%). La quasi-totalité des femmes, les seniors comme les plus jeunes, ont été contaminées lors de rapports hétérosexuels. Parmi ces femmes seniors hétérosexuelles, 59% sont nées à l’étranger, principalement en Afrique subsaharienne (80%). Comparativement, 82% des femmes de 25-49 ans sont nées à l’étranger.
La part des usagers de drogues injectables (UDI) parmi les découvertes de séropositivité était identique entre les seniors et les 25-49 ans (1%).
Les tendances du nombre de découvertes de séropositivité VIH chez les seniors différaient selon le mode de contamination et le pays de naissance (figure 2). Le nombre d’HSH de 50 ans et plus ayant découvert leur séropositivité a fortement augmenté entre 2008 et 2016 (p=0,02), qu’ils soient nés en France ou à l’étranger. Sur la même période, le nombre d’HSH de 25-49 ans ayant découvert leur séropositivité est resté stable. Le nombre annuel de découvertes a également augmenté chez les femmes hétérosexuelles nées à l’étranger, de façon assez régulière entre 2008 et 2014 (p=0,01), tandis qu’il a diminué dans ce groupe chez les 25-49 ans.
Le nombre annuel de découvertes est resté stable chez les hommes seniors hétérosexuels, ainsi que chez les femmes seniors hétérosexuelles nées en France.
Répartition géographique
En 2016, la proportion de seniors parmi les découvertes de séropositivité VIH variait selon la région de domicile (figure 3). Elle était la plus élevée en Martinique (34%), Bourgogne Franche-Comté (32%) et en Guadeloupe (30%), et la plus faible en Guyane (13%), Normandie (14%), Auvergne-Rhône-Alpes (15%) et Pays de la Loire (16%).
Proportion de seniors parmi les découvertes de séropositivité VIH en France en 2016 (données corrigées de la déclaration obligatoire du VIH au 30 juin 2017)
Antécédent de sérologie négative
En 2016, aucun test de dépistage avant la découverte de l’infection par le VIH n’avait été déclaré par 48% des seniors, pourcentage significativement plus élevé (p<0,0001) que chez les 25-49 ans (42%). La dernière sérologie négative datait de plus de 24 mois avant le diagnostic pour 30% des seniors, entre 12 et 24 mois pour 10% d’entre eux et de moins de 12 mois pour 12%. Cette dernière proportion était de 19% chez les 25-49 ans.
Caractère précoce ou tardif du diagnostic
En 2016, les seniors étaient plus nombreux à avoir découvert leur séropositivité au stade sida par rapport aux 25-49 ans (20% vs 10%, p<0,0001) et au stade symptomatique non sida (15% vs 12%, p=0,006). La proportion de découvertes de séropositivité à moins de 200 lymphocytes CD4/mm3 était également plus importante chez les seniors que chez les 25-49 ans (36% vs 25%, p<0,0001).
Au total, les seniors étaient proportionnellement plus nombreux à avoir découvert leur séropositivité à un stade avancé de l’infection que les 25-49 ans (38% vs 26%, p<0,0001). Néanmoins, la proportion de découvertes à ce stade a nettement diminué chez les seniors entre 2008 et 2016 (passant de 44% à 38%, p=0,003), alors que la diminution a été moins marquée chez les 25-49 ans (de 29% à 26%).
La part des infections récentes parmi les découvertes chez les seniors en 2016 était de 28%, pourcentage équivalent à celui chez les 25-49 ans (31%).
Co-Infection VIH/IST
Une co-infection VIH/IST bactérienne était moins fréquente chez les seniors que chez les 25-49 ans (14% vs 19%, p<0,0001).
Discussion
En France, on estime qu’environ 1 200 personnes de 50 ans et plus ont découvert leur séropositivité VIH en 2016, ce qui représente 20% de l’ensemble des découvertes de l’année, pourcentage comparable à celui observé dans l’ensemble des pays de l’UE/EEE (19% en 2016) 6.
Les seniors ayant découvert leur séropositivité VIH en 2016 sont majoritairement des hommes (72%), contaminés dans des proportions comparables par des rapports hétérosexuels (51%) et par des rapports sexuels entre hommes (47%). La part d’hommes hétérosexuels, et notamment d’hommes hétérosexuels nés en France, est plus importante chez les seniors que chez les 25-49 ans. Chez les femmes seniors contaminées lors de rapports hétérosexuels, la part de celles nées en France est également plus élevée comparativement aux 25-49 ans. Ceci pourrait s’expliquer par une moindre proportion, dans la population générale, de personnes de 50 ans et plus nées en Afrique subsaharienne (1,2% vs 2,7% chez les 25-49 ans) 10.
Les seniors sont moins touchés par le VIH que la population des 25-49 ans, puisque leur taux de découvertes de séropositivité est quatre fois plus faible (respectivement 46 et 194 cas par million d’habitants). Cependant, ces chiffres doivent être interprétés avec prudence, dans la mesure où les diagnostics d’infection VIH ne sont qu’un reflet indirect du nombre de nouvelles contaminations car ils dépendent aussi du dépistage, qui varie notamment selon l’âge. Or, nos données montrent que la réalisation d’un test de dépistage dans l’année précédant le diagnostic est moins fréquente chez les seniors que chez les plus jeunes, et que les seniors sont plus nombreux à n’avoir jamais été testés pour le VIH. L’enquête Baromètre santé 2016, réalisée par Santé publique France, montre que le recours au dépistage dans les 12 derniers mois en population générale dépend de l’âge : 5% des personnes de 50 ans et plus déclarent avoir été dépistées dans l’année vs 15% des 25-49 ans (données non publiées). Ce moindre recours au dépistage peut être expliqué par une perception individuelle du risque de contamination par le VIH plus faible chez les seniors. L’enquête KABP 2010 11 avait ainsi montré que seuls 32% des 45-54 ans ont la perception d’avoir « un risque d’être contaminé par le VIH supérieur ou égal à la moyenne des gens », proportion plus faible que chez les 31-44 ans (42%) et les 18-30 ans (58%). Parallèlement, les professionnels de santé sont peut-être moins à l’aise pour discuter de sexualité avec leurs patients les plus âgés 5 et sont probablement moins enclins à leur proposer un dépistage, car ils les considèrent peu exposés au risque d’infection par le VIH. Une enquête qualitative sur le dépistage du VIH, menée fin 2002 par l’Observatoire régional de la santé (ORS) Rhône-Alpes auprès de généralistes, gynécologues, dermatologues et anesthésistes, avait ainsi montré que certains médecins estimaient difficile de parler des prises de risque et du VIH en raison de l’âge des patients (chez les plus de 50 ans, voire les plus de 40 ans) 12.
Chez les HSH, le recours au dépistage est également plus faible chez les seniors que chez les plus jeunes. L’enquête « Rapport au sexe » réalisée en 2017 via Internet par Santé publique France a ainsi montré que 40% des HSH seniors avaient été dépistés pour le VIH dans l’année, vs 50% des 25-49 ans (données non publiées).
Ce recours insuffisant au dépistage chez les seniors a pour conséquence une part importante de diagnostics tardifs, constat retrouvé dans d’autres pays 1,2,3,4,5, même si certains de ces diagnostics tardifs peuvent être le reflet de contaminations survenues avant l’âge de 50 ans. Chez les seniors, la part non négligeable d’infections récentes (28%), datant en moyenne de moins de six mois avant le diagnostic, témoigne cependant de prises de risque dans cette classe d’âge.
Les tendances observées chez les seniors diffèrent de celles observées chez les 25-49 ans, que ce soit globalement ou par mode de contamination. Le nombre de seniors ayant découvert leur séropositivité a augmenté entre 2008 et 2014 alors que, dans le même temps, ce nombre a diminué chez les 25-49 ans, d’où une augmentation de la proportion de seniors parmi les découvertes de séropositivité VIH. Cette augmentation a également été observée dans l’ensemble des pays de l’EU/EEE entre 2007 (13% de seniors) et 2016 (19%) 4.
Chez les seniors, l’augmentation du nombre de découvertes de séropositivité est essentiellement liée à celle observée chez les HSH, une tendance qui n’est pas observée chez les 25-49 ans. Cette augmentation chez les HSH seniors ne semble pas liée à une moindre appropriation des moyens de prévention que chez les plus jeunes. En effet l’enquête « Rapport au sexe » 2017 a montré que 46% des HSH seniors avaient utilisé un moyen de protection (préservatif, TasP, PrEP ou TPE) lors de leur dernier rapport sexuel, proportion plus importante que celle observée chez les 25-49 ans (39%) (données non publiées). Mais le moindre recours au dépistage du VIH des seniors, empêchant la mise rapide sous antirétroviraux, est sans doute un facteur explicatif majeur de cette augmentation du nombre de découvertes chez les seniors.
Concernant les hétérosexuels, hommes ou femmes, aucune diminution du nombre de découvertes n’est observée chez les seniors entre 2008 et 2016, alors que ce nombre a diminué chez les 25-49 ans. L’absence de diminution chez les seniors hétérosexuels pourrait être expliquée par une moindre appropriation des mesures de prévention dans cette classe d’âge. L’enquête Baromètre santé 2016 en population générale a en effet confirmé le fait que, si le multipartenariat ou le fait d’avoir eu un nouveau partenaire dans les 12 derniers mois était moins fréquent chez les seniors que chez les plus jeunes (10% vs 19%), l’usage du préservatif dans ces situations était plus faible (49% des seniors multipartenaires ou avec un nouveau partenaire dans l’année déclaraient avoir utilisé des préservatifs vs 79% des 25-49 ans) (données non publiées).
Les disparités régionales de la proportion de seniors parmi les découvertes de séropositivité VIH peuvent s’expliquer par plusieurs facteurs : les structures par âge et/ou par pays de naissance de la population générale et la dynamique de l’épidémie par mode de contamination et origine géographique, qui diffèrent d’une région à l’autre.
Conclusion
Cette analyse ciblée sur les seniors montre que le nombre de découvertes de séropositivité VIH a augmenté jusqu’en 2014 et que l’infection est souvent diagnostiquée tardivement dans cette population. Ces résultats soulignent l’importance d’accroitre le recours au dépistage des seniors, en les sensibilisant au risque d’infection à tout âge de la vie, et de promouvoir la proposition de dépistage par les professionnels de santé chez les plus de 50 ans. Pour les seniors n’ayant jamais été dépistés, cette proposition de dépistage peut s’inscrire dans les recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS) qui a confirmé, en 2017, l’intérêt de proposer un test de dépistage du VIH au moins une fois dans la vie à la population générale de 15 à 70 ans. Pour ceux ayant déjà bénéficié d’un test VIH au cours de la vie, l’offre de dépistage doit être renouvelée en cas d’exposition au VIH depuis leur dernier test.
Les nouvelles contaminations qui continuent à se produire au-delà de 50 ans montrent l’importance de poursuivre des actions de prévention incluant cette population.
Remerciements
À Lotfi Benyelles, Maria-Clara Da Costa, Pierre Pichon et Charly Ramus pour leur travail sur les données de la surveillance
du VIH ; à Lucie Duchesne, Delphine Rahib et Leïla Saboni pour les extractions de données à partir des bases de population
de l’Insee et des enquêtes « Baromètre Santé 2016 » et « Rapport au sexe 2017 » de Santé publique France.
Merci aussi à tous les biologistes, cliniciens et techniciens d’études cliniques participant à la déclaration obligatoire
du VIH.