Dépistage de l’infection par le VIH en France, 2003-2013

// HIV testing in France, 2003-2013

Françoise Cazein1 (f.cazein@invs.sante.fr), Yann Le Strat1, Aminata Sarr2, Charly Ramus1, Nadine Bouche2, Stéphane Le Vu1, Josiane Pillonel1, Florence Lot1
1 Institut de veille sanitaire, Saint-Maurice, France
2 Direction générale de la Santé, Bureau des infections par le VIH, des IST et des hépatites, Paris, France
Soumis le 04.09.2014 // Date of submission: 09.04.2014
Mots-clés : VIH | Surveillance | Dépistage | France
Keywords: HIV | Epidemiological surveillance | Testing | France

Résumé

Cet article présente un bilan, actualisé pour 2013, de l’activité de dépistage du VIH en France dans les laboratoires d’analyses médicales, à partir du recueil « LaboVIH » et des tests rapides d’orientation diagnostique (TROD) réalisés dans le cadre d’actions de dépistage communautaire.

En 2013, 5,2 millions (IC95%: [5,14-5,28]) de sérologies VIH ont été réalisées, soit 80 pour 1 000 habitants, nombre stable depuis 2011. Parmi elles, 11 278 [10 739-11 817] ont été confirmées positives, soit 172 par million d’habitants. Ce nombre a augmenté de 7% par rapport à 2011 à l’échelle nationale, augmentation observée dans les DOM et en métropole hors Île-de-France, mais pas en Île-de-France.

Environ 344 000 sérologies ont été réalisées dans un cadre anonyme et gratuit en 2013, avec une proportion de sérologies positives pour 1 000 tests plus élevée (3,6) que parmi les sérologies non anonymes (2,1).

Environ 56 500 TROD ont été réalisés par des structures associatives ou de prévention, dont 8,6 pour 1 000 se sont révélés positifs.

L’activité de dépistage du VIH en France a augmenté après la publication des recommandations d’élargissement du dépistage, puis s’est stabilisée depuis 2011. L’augmentation du nombre de sérologies confirmées positives depuis 2011 pourrait correspondre à un dépistage plus ciblé auprès de populations particulièrement exposées.

Abstract

This article presents updated data for 2013 on HIV testing in French medical laboratories, from the LaboVIH survey, and data on HIV rapid tests (TROD) performed in 2013 through community screening activities.

In 2013, 5.2 million ([95%CI: 5.14-5.28] HIV tests were performed, representing 80 tests per 1,000 inhabitants, this number has remained stable since 2011. Among these tests, 11,278 (95%CI: [10,739-11,817]) were confirmed HIV positive, representing 172 positive tests per million inhabitants. This number has increased since 2011 at the national scale (+7%), in the French overseas departments, and outside the Paris region, but not in the Paris region.

In 2013, around 344,000 free anonymous tests were performed, among which 3.6 per 1,000 were found HIV positive, more than in confidential testing (2.1).

Approximately 56,500 HIV rapid tests were performed in 2013, of which 8.6 per 1,000 were found positive.

HIV screening activity increased in France after the publication of screening enlargement recommendations, and has stabilized since 2011. The increase in the number of HIV positive tests since 2011 may reflect a more targeted screening, in particular in high risk populations.

Introduction

Le diagnostic précoce des personnes infectées par le VIH est un enjeu crucial de la lutte contre le virus car il permet, d’une part, un bénéfice individuel pour les personnes diagnostiquées, qui peuvent alors être prises en charge sur le plan médical et, d’autre part, un bénéfice collectif, le traitement antirétroviral constituant une forme de prévention (concept international du TASP « Treatment AS Prevention »). Le Plan national de lutte contre le VIH/sida et les infections sexuellement transmissibles (IST) 2010-2014 1 a donc recommandé de proposer le dépistage du VIH à l’ensemble de la population, hors notion d’exposition à risque, de répéter cette proposition pour les populations les plus exposées et de développer des actions de dépistage communautaire au moyen de tests rapides d’orientation diagnostique (TROD).

Cette stratégie a été appuyée par l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes), par des actions de communication adressées aux professionnels de santé 2, au grand public, aux migrants d’Afrique subsaharienne, aux personnes des départements français d’Amérique et aux hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH). Des opérations ponctuelles de promotion du dépistage ont également été menées. En 2013, la Direction générale de la santé (DGS), en lien avec les Agences régionales de santé (ARS), a mis en place une semaine du dépistage du VIH par TROD dans quatre régions (voir l’article d’A. Atramont et coll. dans ce numéro).

Afin de contribuer à l’évaluation de la politique de dépistage, l’Institut de veille sanitaire (InVS) publie chaque année les données d’activité de dépistage du VIH en laboratoires d’analyses de biologie médicale 3. Ces données sont complétées par celles des associations ou structures de prévention qui réalisent, depuis septembre 2011, un dépistage communautaire par TROD 4 dans le cadre d’appels à projets DGS/CnamTS. Cet article décrit l’activité de dépistage du VIH en 2013 en France et son évolution depuis 2003.

Objectifs et méthodes

La surveillance de l’activité de dépistage du VIH en laboratoire (LaboVIH) a pour objectifs de suivre l’évolution nationale et régionale du nombre de sérologies VIH réalisées en France, d’aider à interpréter les données de la notification obligatoire du VIH et d'en estimer l'exhaustivité. Elle inclut les sérologies réalisées en laboratoire 5, les tests prescrits dans les Consultations de dépistage anonyme et gratuit (CDAG) et les Centres d’information de dépistage et de diagnostic des infections sexuellement transmissibles (Ciddist), le plus souvent anonymes et gratuits 6, et les TROD réalisés dans les laboratoires. Elle exclut les sérologies réalisées à l’occasion d’un don de sang.

L’Institut de veille sanitaire (InVS) sollicite chaque semestre tous les laboratoires d’analyses de biologie médicale de France, en ville et à l’hôpital (environ 4 300 sites), pour recueillir le nombre de personnes testées pour le VIH et le nombre de personnes confirmées positives pour la première fois par le laboratoire (1). Une même personne est donc comptée plusieurs fois si elle a réalisé plusieurs sérologies dans l’année. Une sérologie positive n’est comptée qu’une seule fois pour un laboratoire donné, mais plusieurs fois si elle est diagnostiquée successivement par plusieurs laboratoires.

Les données présentées ici correspondent à l’activité de l’ensemble des laboratoires, qu’ils aient répondu ou non au recueil LaboVIH. Les nombres de sérologies VIH réalisées et de sérologies positives ont été estimés en considérant que les laboratoires participant à LaboVIH constituent un échantillon issu d'un plan de sondage stratifié sur la région et le type de laboratoire (ville ou hôpital). Les médianes des nombres de sérologies ont été préférées aux moyennes pour calculer les poids de sondage, afin de générer des estimations plus robustes au biais de non-participation. Ces poids ont permis d’estimer les valeurs centrales en utilisant un estimateur par prédiction. Les variances des nombres de sérologies réalisées et de sérologies positives ont été estimées en utilisant une méthode de bootstrap.

Les données analysées sont les nombres de sérologies VIH réalisées et de sérologies confirmées positives, la proportion de sérologies positives pour 1 000 sérologies réalisées en 2013 et leur évolution depuis 2003. Pour comparer les régions entre elles, les nombres de sérologies sont rapportés au nombre d’habitants. Les tailles de populations utilisées sont celles de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) au 1er janvier 2013, et août 2012 pour Mayotte 7,8. Les tendances dans le temps ont été testées par une droite des moindres carrés pondérés par l’inverse de la variance du nombre de sérologies. Le nombre de sérologies positives non anonymes, issu de LaboVIH, est utilisé pour estimer l’exhaustivité de la déclaration obligatoire du VIH, ce qui permet de calculer le nombre annuel de découvertes de séropositivité et d’en suivre l’évolution. Ces analyses ont été publiées précédemment 9.

Parallèlement aux données LaboVIH, sont également présentées les données relatives à la réalisation de TROD par les structures associatives, dans le cadre des appels à projets DGS/CnamTS 2011 et 2012 de soutien aux activités de dépistage communautaire de l’infection à VIH, pour une expérimentation jusqu’en 2014. Ces données sont issues des rapports annuels d’activité (2) transmis par ces associations aux caisses primaires d’assurance maladie (CPAM), aux ARS et à la DGS. Les données renseignées portent sur l’activité de dépistage réalisée par les 60 structures subventionnées et notamment sur le profil des personnes dépistées et leur orientation médicale en cas de découverte de séropositivité. Ces données font l’objet d’une analyse annuelle par la DGS pour mesurer l’intérêt du dispositif en termes de santé publique. Elles n’incluent pas les TROD réalisés hors du cadre des appels à projets.

Résultats

Participation

Pour l’année 2013, 89% des laboratoires d’analyses médicales ont participé à LaboVIH (3 815/4 300), 92% des laboratoires hospitaliers et 88% des laboratoires de ville. Leur participation variait selon la région (de 81% à 100%) et selon le département (de 17% à 100%).

Sérologies VIH réalisées

En 2013, on estime que les 4 300 laboratoires ont réalisé 5,21 millions (intervalle de confiance à 95%, IC95%: [5,14-5,28]) de sérologies VIH, soient 80 sérologies pour 1 000 habitants. Après avoir augmenté en 2011, ce nombre s’est depuis stabilisé en France entière (figure 1a). Cette stabilisation est observée dans les trois inter-régions considérées : l’Île-de-France, la métropole hors Île-de-France et les départements d’outremer (DOM) (figure 1b). Sur cette période 2011-2013, on observe cependant une diminution du nombre de sérologies réalisées dans deux régions, Auvergne (-18%, p<10-3) et Provence-Alpes-Côte d'Azur (Paca) (-8%, p=0,02).

Figure 1 : Sérologies VIH réalisées en France. LaboVIH, 2003-2013
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Le nombre de sérologies pour 1 000 habitants par inter-région en 2013 est présenté en figure 2a. Pour l’ensemble de la métropole, hors Île-de-France, ce taux était de 70 pour 1 000 habitants.

En 2013, les laboratoires de ville ont réalisé environ les trois quarts des sérologies VIH. Entre 2011 et 2013, le nombre de sérologies réalisées a augmenté à l’hôpital (+7%, p=0,03), mais pas en ville.

Figure 2 : Sérologies VIH réalisées et sérologies confirmées positives, France, 2013
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En 2013, 7% des sérologies ont été réalisées dans un cadre anonyme (le plus souvent pour des consultants en CDAG/Ciddist), proportion stable au cours du temps, soit environ 344 000 sérologies anonymes.

Parallèlement à l’activité de dépistage en laboratoires, environ 56 500 TROD ont été réalisés en 2013 par des associations et structures de prévention, nombre plus élevé que les années précédentes : 4 000 en 2011 et 31 700 en 2012 (3). Le public touché par ce dépistage communautaire s’est diversifié : les HSH, qui constituaient 69% des personnes dépistées par TROD en 2011, n’en représentaient plus que 40% en 2012 et 30% en 2013. Après avoir augmenté entre 2011 et 2012, la part des migrants (1% en 2011, 30% en 2012, 27% en 2013), des usagers de drogue (respectivement 4%, 7% et 5%) et des personnes qui se prostituent (1% en 2011, 2% en 2012 comme en 2013) s’est stabilisée. La part des personnes n’appartenant pas à ces publics cibles a augmenté sur les trois années (16% en 2011, 21% en 2012 et 36% en 2013). Près d’un tiers (30%) des personnes testées n’avaient jamais bénéficié d’un dépistage du VIH au cours de leur vie.

Sérologies VIH positives

Le nombre de sérologies VIH confirmées positives en laboratoire en 2013 a été estimé à 11 278 (IC95%: [10 739-11 817]), soient 172 par million d’habitants. Ce nombre a augmenté entre 2011 et 2013 (+7%, p=0,008) (figure 3a). En revanche il n’y a pas eu d’augmentation significative entre 2012 et 2013.

L’évolution du nombre de sérologies positives est contrastée entre les régions. En Île-de-France et dans les DOM, elle s’inscrit dans une tendance globale à la diminution entre 2004 et 2011 (p<10-3), suivie d’une stabilisation en Île-de-France et d’une augmentation (+14%, p<10-3) dans les DOM. En métropole hors Île-de-France en revanche, la tendance est à la hausse continue depuis 2007 (p<10-3) (figure 3b).

Figure 3 : Sérologies VIH confirmées positives en France. LaboVIH, 2003-2013
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Le nombre de sérologies positives par million d’habitants et par région est présenté en figure 2b. Le taux global pour la métropole, hors Île-de-France, est de 100 sérologies positives par million d’habitants.

En 2013, environ 1 200 sérologies anonymes étaient confirmées positives, soient 12% des sérologies positives, proportion stable au cours du temps.

Les laboratoires de ville étaient à l’origine de 37% des sérologies VIH positives en 2013. Le nombre de sérologies positives a augmenté depuis 2011 à l’hôpital (+13%, p<10-3), mais pas en ville.

En ce qui concerne le dépistage communautaire, 486 TROD se sont révélés positifs en 2013, dont 80% (N=389) correspondaient à des découvertes de séropositivité.

Sérologies VIH positives pour 1 000 sérologies réalisées

La proportion de sérologies confirmées positives pour 1 000 réalisées a été estimée à 2,2 en 2013. Cette proportion était plus élevée en Guyane (9,2 en 2013), Île-de-France (3,9), Guadeloupe (3,0) et Martinique (2,9). Dans les autres régions, elle s’échelonnait entre 0,5 et 2,0/1 000, et était de 1,4 pour l’ensemble de la métropole hors Île-de-France.

La proportion de sérologies positives était plus élevée pour celles réalisées dans un cadre anonyme en 2013 (3,6 pour 1 000, IC95% : [3,5-3,8]) que pour celles réalisées dans un cadre nominatif confidentiel (2,1 pour 1 000 [1,9-2,2]) (figure 4).

Figure 4 : Proportion de tests VIH positifs pour 1 000 réalisés. France, 2003-2013
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En 2013, la proportion de TROD positifs était de 8,6 pour 1 000 TROD réalisés (figure 4), dont 6,9 pour 1 000 correspondaient à des découvertes de séropositivité (8 pour 1 000 en 2012). Le taux de positivité était de 17,9 pour 1 000 pour les HSH, 2,4 pour 1 000 pour les usagers de drogue, 7,1 pour 1 000 pour les migrants, 24,9 pour 1 000 pour les personnes prostituées et 1,7 pour 1 000 pour les autres publics. Environ 60% des personnes ayant eu un TROD positif ont été orientées dans les trois mois vers une prise en charge.

L’analyse des TROD par région (tableau) montre que 10 régions comptabilisaient 94% des TROD positifs, dont plus de la moitié en Île-de-France. La proportion de TROD positifs était plus importante en Midi-Pyrénées, Guyane, Nord-Pas-de-Calais, Île-de-France et Paca. Les tests positifs en Midi-Pyrénées concernaient essentiellement des HSH (10/14), sans notion de regroupement de cas.

Par comparaison, ces 10 régions représentaient 81% des sérologies positives en laboratoire. La proportion de positifs était globalement 4 fois plus élevée parmi les TROD que parmi les sérologies en laboratoire, avec des exceptions notables, comme la Guyane, où les deux proportions étaient voisines, les régions Midi-Pyrénées et Nord-Pas-de-Calais, où la proportion de tests positifs était environ 10 fois plus élevée parmi les TROD que parmi les sérologies en laboratoires.

Tableau : Nombre de TROD communautaires réalisés et positifs (source DGS) et comparaison avec les sérologies réalisées en laboratoire, dans les mêmes régions (source LaboVIH), pour 10 régions françaises dénombrant 94% des TROD positifs en 2013
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Discussion

La participation des laboratoires d’analyse de biologie médicale à LaboVIH a atteint 89% en 2013, ce qui atteste de la forte implication des biologistes dans la surveillance du VIH. Cette participation reste cependant faible dans quelques départements, pour lesquels il est impossible de disposer de données fiables.

Il est difficile de comparer l’activité de dépistage en France avec celle des pays voisins, car plusieurs pays d’Europe occidentale (Royaume-Uni, Espagne, Italie, Allemagne…) ne collectent pas cette donnée à l’échelle nationale. Néanmoins, parmi 14 pays de l’Union européenne ayant communiqué leur activité de dépistage du VIH en 2012, la France, avec 80 sérologies pour 1 000 habitants, est le pays qui réalise le plus de dépistages, suivie de la Belgique (63 pour 1 000). 10

L’activité de dépistage du VIH en France en laboratoire a augmenté en 2011, année qui a suivi le changement de stratégie de dépistage, passant de 5,0 à 5,2 millions de sérologies réalisées, puis s’est stabilisée. Le nombre de TROD réalisés en milieu communautaire, très faible par rapport au nombre total de sérologies, ne modifie pas cette tendance.

Les données Biolam de l’Assurance maladie (4) constituent une autre source d’information sur l’activité de dépistage du VIH. Ces données sont partielles, puisqu’elles excluent notamment les actes non remboursés et ceux réalisés dans les établissements publics de santé ou dans les établissements de santé privés d'intérêt collectif. Cependant, Biolam montre, comme LaboVIH, une augmentation des sérologies VIH réalisées en 2011, suivie d’une stabilisation en 2012-2013 (2,6 millions de sérologies en 2013).

La proposition de dépistage généralisé à la population générale, recommandée dans le Plan national de lutte contre le VIH/sida et les IST 2010-2014, n’a pas été largement appliquée, comme le montre la faible augmentation de l’activité de dépistage en 2011 et sa stabilité au cours des deux années suivantes. Le groupe d’experts du rapport Morlat 11 relève en 2013 les difficultés d’application de cette recommandation, notamment celle de la mobilisation des professionnels de santé liée à la difficulté de prescrire un test en dehors de toute exposition et de tout contexte clinique, et préconise en conséquence de réajuster la stratégie de dépistage.

L’augmentation du nombre de sérologies positives en laboratoires, observée en 2012 et 2013, pourrait être en partie liée aux actions de dépistage communautaire mises en place fin 2011 auprès de populations ciblées, puisqu’un TROD trouvé positif doit donner lieu à une confirmation sérologique en laboratoire. Cette augmentation pourrait aussi correspondre, comme en 2012, à une plus grande précocité des diagnostics qui sera appréciée, au regard des données 2013 de la déclaration obligatoire du VIH, par l’analyse des stades d’infection des personnes découvrant leur séropositivité.

Les données de 2013 confirment les disparités régionales observées précédemment. Dans les DOM, en Île-de-France et en Paca, l’activité de dépistage rapportée à la population est de 1,2 à 2,5 fois plus importante que la moyenne nationale. En Paca, région où l’activité de dépistage est depuis plusieurs années plus élevée que dans le reste de la métropole, cette activité tend à diminuer au cours du temps. Sachant que cette région était caractérisée par une proportion élevée de diagnostics précoces, il faudra vérifier que la diminution du nombre de sérologies ne s’y traduit pas par une diminution de la précocité des diagnostics.

Les laboratoires de ville, à l’origine de 4 sérologies positives sur 10, et les structures de dépistage anonyme et gratuit, qui dépistent une population plus exposée que celle qui recourt à une sérologie VIH dans un cadre nominatif confidentiel, jouent un rôle important dans le dépistage du VIH en France.

Le dispositif des TROD en milieu associatif, qui prend de l’ampleur progressivement, permet d'aller à la rencontre de publics éloignés des structures de dépistage. C’est le cas pour 30% des personnes ayant bénéficié d’un TROD VIH en 2013, puisqu’elles n’avaient jamais été testées auparavant. L’arrivée prochaine sur le marché français des autotests, annoncée pour la fin de l’année 2014, diversifie encore l’offre de dépistage et poursuit le même objectif d’atteindre des personnes ne recourant pas habituellement au dispositif classique de dépistage.

La proportion de TROD positifs, plus élevée que parmi les sérologies classiques, montre que ce dispositif touche une population particulièrement exposée au VIH. Cependant, la proportion des « autres publics » dépistés par TROD a augmenté entre 2012 et 2013, montrant un élargissement de la population dépistée par ce dispositif vers des publics moins à risque que les populations dites prioritaires.

Conclusion

L’activité de dépistage du VIH en France a augmenté dans la première année qui a suivi les recommandations d’élargissement du dépistage, puis s’est stabilisée sur 2011-2013, montrant les limites de faisabilité de la stratégie de dépistage généralisé. L’augmentation du nombre de sérologies positives observée depuis 2011 peut être expliquée par un dépistage plus ciblé, qu’il s’agisse de dépistage communautaire par TROD ou de la répétition de tests dans des populations particulièrement exposées, qui sont les deux autres axes de la stratégie de dépistage du Plan national de lutte contre le VIH/Sida et les IST 2010-2014.

Remerciements

Nous remercions vivement tous les biologistes participant à LaboVIH (3 815 laboratoires ont participé pour l’année 2013). La présente analyse serait impossible sans leur travail de transmission d’information.

Nous remercions également les 60 associations qui participent à l’appel à projets DGS/CnamTS de soutien aux activités de dépistage communautaire de l’infection à VIH.

Références

1 Plan national de lutte contre le VIH/SIDA et les IST 2010-2014. Paris: Ministère de la Santé et des Sports; 2010. 266 p. http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/plan_national_lutte_contre_le_VIH-SIDA_et_les_IST_2010-2014.pdf
2 Institut national de prévention et d’éducation pour la santé. Dépistage du VIH et des infections sexuellement transmissibles (IST). Informations et ressources pour les professionnels de santé. Saint-Denis: Inpes; 2011. 11 p. http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/Depistage_du_VIH_et_des_IST_a_destination_des_professionnels_de_sante.pdf
3 Cazein F, Le Strat Y, Dutil J, Couturier S, Ramus C, Semaille C. Dépistage de l’infection par le VIH en France, 2003-2012. Bull Epidémiol Hebd. 2013;(33-34):410-6. http://opac.invs.sante.fr/index.php?lvl=notice_display&id=11752. Erratum : Bull Epidémiol Hebd. 2013;(41-42):552. http://opac.invs.sante.fr/index.php?lvl=notice_display&id=11862
4 Ministère de la Santé et des Sports. Arrêté du 9 novembre 2010 fixant les conditions de réalisation des tests rapides d’orientation diagnostique de l’infection à virus de l’immunodéficience humaine (VIH 1 et 2). JO du 17/11/2010. http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000023093746&dateTexte=&categorieLien=id
5 Ministère de la Santé et des Sports. Arrêté du 28 mai 2010 fixant les conditions de réalisation du diagnostic biologique de l'infection à virus de l'immunodéficience humaine (VIH 1 et 2) et les conditions de réalisation du test rapide d'orientation diagnostique dans les situations d'urgence. JO du 28/05/2010. http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000022320859&fastPos=1&fastReqId=62601366&categorieLien=cid&oldAction=rechTexte
6 Secrétariat d’État à la Santé et aux Handicapés. Arrêté du 3 octobre 2000 relatif aux consultations de dépistage anonyme et gratuit. JO du 20/10/2000. http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000220016&fastPos=2&fastReqId=29445009&categorieLien=id&oldAction=rechTexte
7 Institut national de la statistique et des études économiques (Insee). Estimation de population au 1er janvier, par région, sexe et âge quinquennal. Année 2013. http://www.insee.fr/fr/themes/detail.asp?ref_id=estim-pop®_id=99
8 Institut national de la statistique et des études économiques. 212 600 habitants à Mayotte en 2012 – La population augmente toujours fortement. Insee Mayotte Infos. 2012;(61):1-4. http://www.insee.fr/fr/themes/document.asp?ref_id=19214#p0
9 Cazein F, Lot F, Pillonel J, Le Strat Y, Sommen C, Pinget R, et al. Découvertes de séropositivité VIH et sida – France, 2003-2012. Bull Epidémiol Hebd. 2014;(9-10):154-62. http://opac.invs.sante.fr/index.php?lvl=notice_display&id=12010
10 European Centre for Disease Prevention and Control, WHO Regional Office for Europe. HIV/AIDS surveillance in Europe 2012. Stockholm: ECDC; 2013. p. 68. http://www.euro.who.int/__data/assets/pdf_file/0018/235440/e96953.pdf?ua=1
11 Dépistage. In: Morlat P (dir.). Prise en charge médicale des personnes vivant avec le VIH. Recommandations du groupe d’experts. Rapport 2013. Paris : La Documentation Française ; 2013. p. 41-55. http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/Rapport_Morlat_2013_Mise_en_ligne.pdf

Citer cet article

Cazein F, Le Strat Y, Sarr A, Ramus C, Bouche N, Le Vu S, et al. Dépistage de l’infection par le VIH en France, 2003-2013. Bull Epidémiol Hebd. 2014;(32-33):534-40. http://www.invs.sante.fr/beh/2014/32-33/2014_32-33_1.html

2 Modèle de rapport annuel d'activité de l'appel à projets TROD VIH disponible en ligne sur : http://sante.gouv.fr/IMG/doc/Modele_
Rapport_activite_TROD_decembre_
2011.doc
3 L’activité 2011 portait sur quatre mois et ne concernait que les 32 associations subventionnées en 2011. L’activité 2012 portait sur 12 mois pour les 32 associations subventionnées dès 2011 et sur huit mois pour les 31 associations retenues au terme de l’appel à projets 2012. L’année 2013 est la première année « pleine », portant sur l’ensemble des 60 structures subventionnées (63 structures initialement dont 3 ont renoncé)