Mortalité avec valvulopathie en France : caractéristiques des patients et évolution 2000-2014
// Mortality due to valvular heart disease in France: Patients characteristics and trends 2000-2014
Résumé
Introduction –
En France, l’incidence des patients hospitalisés pour valvulopathies est en augmentation. L’objectif de cette étude était d’estimer la mortalité avec valvulopathie en France et de décrire son évolution entre 2000 et 2014.
Méthodes –
Les patients, domiciliés en France, dont le certificat de décès faisait mention d’une valvulopathie ont été identifiés à partir de la base nationale du CépiDC (sélection en causes multiples des certificats de décès) des années 2000 à 2014. Les caractéristiques démographiques des patients ont été décrites pour l’année 2014. Les taux de mortalité nationaux et départementaux standardisés sur l’âge, ainsi que l’évolution nationale entre 2000 et 2014, ont été étudiés.
Résultats –
En 2014, 11 certificats de décès faisaient mention d’une valvulopathie, dont 56% en cause initiale. Les taux de mortalité standardisés étaient de 11,8/100 000 personnes-années (PA) pour les valvulopathies non rhumatismales et de 0,056/100 000 PA pour les valvulopathies congénitales, stables entre 2000 et 2014. En revanche, le taux de mortalité standardisé des valvulopathies rhumatismales a diminué de 42% entre 2000 et 2014, il était de 3,5/100 000 PA en 2014. Des disparités départementales ont été observées pour ces maladies, avec une mortalité des valvulopathies rhumatismales plus élevée à l’Est de la France et une mortalité des valvulopathies non rhumatismales plus élevée au Nord-Ouest. Le rétrécissement aortique non rhumatismal était la valvulopathie la plus fréquente, avec un taux de mortalité standardisé de 10,3/100 000 PA en 2014.
Conclusion –
Malgré le vieillissement de la population, l’amélioration de la prise en charge des valvulopathies et de leurs facteurs de risque pourraient expliquer la stabilité de la mortalité avec valvulopathie non rhumatismale. La diminution de la mortalité avec valvulopathie rhumatismale s’explique probablement par l’amélioration de la prise en charge du rhumatisme articulaire aigu.
Abstract
Introduction –
In France, the incidence of hospitalized patients for valvular heart disease is increasing. The aim of this study was to estimate the mortality of patients with valvular heart disease in France and to describe the time trends between 2000 and 2014.
Methods –
Patients living in France whose death certificate mentioned a valvular heart disease were identified from the mortality national database (multiple causes of death certificates) from the years 2000 to 2014. Demographic characteristics of patients were described for the year 2014. National and departmental aged standardized mortality rates and national time trends between 2000 and 2014 were studied.
Results –
In 2014, 11,179 death certificates mentioned a valvular heart disease, of which 56% were the initial cause. Standardized mortality rates were 11.8/100,000 persons-years (PY) for non-rheumatic valve diseases, 0.056/100,000 PY for congenital valve diseases, stable between 2000 and 2014. In contrast, the standardized mortality rate for rheumatic valve disease decreased by 42% between 2000 and 2014, and was 3.5/100,000 PY in 2014. Departmental disparities were observed for these diseases, with high rheumatic valve disease mortality in eastern France and higher non-rheumatic valve disease mortality in the northwest. Non-rheumatic aortic stenosis was the most common valvular heart disease, with a standardized mortality rate of 10.3/100,000 PY in 2014.
Conclusion –
Despite the ageing of the population, improvements in the management of valvular heart diseases and their risk factors could explain the decrease in mortality due to rheumatic valve disease and the stability of mortality due to non-rheumatic valve disease. The decrease in mortality due to rheumatic valve disease is likely related to an improvement of the streptococcal A angina management.
Introduction
Les valvulopathies sont des maladies cardiaques fréquentes. Aux États-Unis, leur prévalence a été estimée, par une recherche échographique systématique, à 2,5% de la population 1. Ces maladies peuvent être à l’origine de complications cardiaques et d’une augmentation du risque de mortalité 1,2,3.
Les étiologies des valvulopathies sont nombreuses. Les plus fréquentes sont la dégénérescence liée à l’âge, le rhumatisme articulaire aigu (RAA), l’endocardite, l’infarctus du myocarde ou les étiologies fonctionnelles sur une insuffisance cardiaque gauche 4,5,6,7,8. Ces dernières années, une modification de la répartition des causes des valvulopathies a été mise en évidence. En effet, la meilleure prise en charge de l’angine à streptocoques A a permis une diminution de l’incidence du RAA dans les pays occidentaux 7,9,10,11. À l’inverse, le vieillissement de la population est à l’origine d’une augmentation de l’incidence des valvulopathies non rhumatismales (VNR) par calcification de valve 10,12,13. Par ailleurs, des progrès thérapeutiques, notamment l’avènement des techniques percutanées, ont engendré une augmentation de l’incidence des patients pris en charge pour une valvulopathie en France 14. Ainsi, entre 2006 et 2016, une augmentation de 43% de l’incidence des patients hospitalisés pour une VNR a été observée. À l’inverse, durant la même période, l’incidence des patients hospitalisés pour une valvulopathie rhumatismale (VR) a diminué de 42%. Ainsi, en 2016, l’incidence des patients hospitalisés pour VNR était de 52/100 000 personnes-années (PA) et celle des VR de 3/100 000 PA 15.
Ces modifications d’incidence des patients hospitalisés et pris en charge pour une valvulopathie peuvent avoir un impact sur les taux de mortalité des patients atteint d’une valvulopathie. Ainsi, aux États-Unis, une diminution de la mortalité du rétrécissement aortique semble s’amorcer depuis 2013 16.
L’objectif de cette étude était d’estimer la mortalité des patients atteints d’une valvulopathie mentionnée sur leur certificat de décès en France et de décrire son évolution entre 2000 et 2014.
Méthodes
Sources de données et population
Cette étude observationnelle a été réalisée à partir des données issues de la base nationale du Centre d’épidémiologie sur les causes médicales de décès (CépiDc-Inserm) des années 2000 à 2014. Cette base nationale comporte les certificats de décès des personnes décédées en France (hors Mayotte). Le certificat de décès est rempli par le médecin qui constate le décès, puis les causes de décès sont codées selon la Classification internationale des maladies – 10e révision (CIM-10) et la cause initiale de décès est sélectionnée 17. La cause initiale de décès est définie par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) comme : « la maladie ou le traumatisme qui a déclenché l’évolution morbide conduisant directement au décès ou les circonstances de l’accident ou de la violence qui ont entraîné le traumatisme mortel ».
Tous les décès dont le certificat faisait mention d’une valvulopathie, en cause de décès initiale ou associée (analyse en causes multiples), ont été sélectionnés et inclus dans cette étude. Les codes de valvulopathies utilisés pour identifier ces décès sont issus de CIM-10 et sont disponibles dans le tableau 1. L’atteinte multivalvulaire a été définie par la présence d’un code d’atteinte multiple (I08) ou par la présence de plusieurs codes de valvulopathies identifiant des atteintes de différentes valves sur un même certificat.
Analyses statistiques
Les caractéristiques démographiques (âge et sexe) des patients décédés avec valvulopathies, ainsi que le type de valvulopathie, ont été décrites pour la dernière année disponible (2014). Les descriptions ont été faites sur l’ensemble de la population (analyses des certificats de décès en causes multiples), restreintes aux patients dont la cause initiale de décès était une valvulopathie, puis stratifiées avec analyses en causes multiples selon l’étiologie de la valvulopathie (rhumatismale, non rhumatismale ou congénitale) et le type d’atteinte identifiable.
Les taux de mortalité bruts et standardisés sur l’âge des patients, ont été calculés pour l’ensemble de la population, ainsi que par sexe. Ils sont exprimés pour 100 000 PA. Les données de populations moyennes nationales pour les années 2000 à 2014 sont issues de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee). La population européenne de 2010 a servi de référence pour le calcul des taux standardisés.
Les évolutions annuelles moyennes de la mortalité (entre 2000 et 2014) ont été réalisées par une régression de Poisson, conduite par catégorie d’âge et par sexe, avec le log des populations en variable offset, en fonction de l’étiologie de la valvulopathie. Les évolutions de deux types de lésions valvulaires sont présentées ici : le rétrécissement aortique non rhumatismal et l’insuffisance mitrale rhumatismale.
Pour l’étude des disparités territoriales, les données de 2012 à 2014 ont été regroupées afin d’obtenir un effectif suffisant pour permettre l’estimation des taux de mortalité standardisés au niveau départemental. Les pourcentages d’écart entre les taux d’incidence standardisés départementaux et le taux d’incidence standardisé moyen national ont été calculés et représentés sur des cartes.
Les analyses ont été réalisées avec le logiciel SAS® Enterprise guide 7.1.
Résultats
Caractéristiques des patients décédés avec une valvulopathie en 2014
En France, en 2014, 11 179 personnes sont décédées avec une valvulopathie retrouvée en cause initiale ou associée de leur certificat de décès (6 231 en cause initiale et 4 928 en cause associée uniquement). Parmi les 4 928 patients décédés avec une valvulopathie codée en cause associée uniquement, 40% avaient une affection cardiaque codée en cause initiale et 16% une affection tumorale (tableau 2). L’âge moyen au décès était de 84 ans, et la proportion de femmes étaient de 55,7%. Le taux de mortalité standardisé sur l’âge était de 15,75/100 000 PA (tableau 2). Les valvulopathies les plus fréquemment retrouvées étaient d’origine non rhumatismale (VNR) (8 480 décès, 75,9%). Les valvulopathies rhumatismales (VR) concernaient 2 442 décès (21,8%) et les valvulopathies congénitales (VC) concernaient 39 décès (0,3%). L’atteinte aortique, et notamment le rétrécissement aortique, était le plus fréquemment retrouvées.
Description des patients décédés et évolution des taux de mortalité selon l’étiologie de la valvulopathie
Le profil des patients différait en fonction de l’origine de la valvulopathie (tableau 3). Les patients décédés avec une VNR, une VR ou une VC avaient, respectivement, en moyenne 85 ans, 82 ans et 32 ans. Près de deux tiers des patients décédés avec VR étaient des femmes (55% des VNR, 44% des VC).
selon l’étiologie de la valvulopathie, France
Le taux de mortalité standardisé des VNR était de 11,8 pour 100 000 PA en 2014 (figure 1). Ce taux était relativement stable depuis 2000 mais reflétait des évolutions différentes en fonction de l’âge (figure 2). Une diminution annuelle moyenne significative de la mortalité avec valvulopathie était observée dans les classes d’âge les plus jeunes (de -2 à -8% par an) alors qu’elle augmentait chez les patients de plus de 85 ans (de 1,5 à 3,4%). Le taux de mortalité standardisé des VR était de 3,5 pour 100 000 PA en 2014. Ce taux a diminué de 42,6% entre 2000 et 2014 (figure 1). Cette diminution concernait toutes les classes d’âge. La diminution annuelle moyenne la plus importante était observée pour les patients décédés entre 45 et 65 ans (-4,7 à -5,4%) (figure 2). Enfin, le taux de mortalité standardisé des VC était de 0,056/100 000 PA (figure 1). Les analyses d’évolutions temporelles restreintes aux patients décédés avec une valvulopathie codée en cause initiale montraient des tendances similaires (données non présentées).
(France, 2000-2014)
Disparités territoriales
La figure 3 illustre les disparités territoriales des taux de mortalité avec valvulopathie, selon l’origine rhumatismale ou non, en France (2012 à 2014).
La répartition départementale des patients décédés entre 2012 et 2014 avec une valvulopathie était différente selon l’origine de la valvulopathie. Les taux de mortalité standardisés des patients décédés avec une VNR étaient les plus élevés dans la Manche (19,0/100 000 PA), le Pas-de-Calais (18,9/100 000 PA), le Finistère (18,3/100 000 PA), le Morbihan (17,9/100 000 PA), le Bas-Rhin (17,7/100 000 PA) et la Haute-Saône (16,8/100 000 PA). Ces taux étaient les plus bas dans le Sud-Est de la France (Alpes-de-Haute-Provence (6,7/100 000 PA) et les départements d’outre-mer [DOM : Guyane (5,5) ; Martinique (3,6) ; Guadeloupe (3,2)]. Les taux de mortalité des patients décédés avec une VR étaient les plus importants dans les départements de la Loire (7,8 pour 100 000 PA), le territoire de Belfort (7,2/100 000 PA), la Haute-Loire (6,5/100 000 PA), et la Haute-Saône (5,9/100 000 PA).
Évolution des taux de mortalité 2002-2014 selon le type de valvulopathie
Parmi les patients dont l’atteinte était précisée, 73% de ceux décédés avec mention d’une VNR présentaient un rétrécissement aortique. Concernant les VR, le type d’atteinte le plus fréquemment retrouvé était l’insuffisance mitrale (IM). Enfin, concernant les décès d’une VC, la majorité des valvulopathies touchait la valve aortique ou tricuspide (tableau 3).
Les évolutions de 2002 à 2014 de la mortalité du rétrécissement aortique non rhumatismale (RAnr) et de l’IM rhumatismale sont représentées sur la figure 4. Le taux de mortalité standardisé des RAnr étaient de 10,3/100 000 PA chez les hommes et de 7,3/100 000 PA pour les femmes en 2014. Ces taux ont augmenté jusqu’en 2012 (+16% chez les hommes et +8% chez les femmes) et ont ensuite diminué légèrement entre 2012 et 2014 (-7% chez les hommes et -4% chez les femmes).
(France, 2000-2014)
En revanche, la mortalité de l’IM rhumatismale a diminué de plus de 50% chez les hommes et les femmes, le taux de mortalité standardisé de 1,8 pour les hommes et de 1,9 pour les femmes en 2002 passant respectivement à 0,85 et 0,91 en 2014 (figure 4).
Discussion
Principaux résultats et comparaison à la littérature
En 2014, 11 179 certificats de décès faisaient mention d’une valvulopathie. Plus de 80% de ces patients décédés présentaient une VNR. Nous avons mis en évidence une relative stabilité de la mortalité liée aux VNR, avec néanmoins une diminution de la mortalité chez les jeunes et une augmentation chez les sujets âgés de plus de 85 ans. Cela suggère une meilleure survie des porteurs de VNR, un décès à un âge plus élevé, donc une augmentation de la prévalence.
L’étude des hospitalisations pour valvulopathie avait montré une forte augmentation de l’incidence des patients âgés hospitalisés pour VNR 15. Ces tendances pourraient s’expliquer par plusieurs éléments. Tout d’abord, l’augmentation de l’incidence des VNR pourrait être en lien avec le vieillissement de la population 12. De plus, le développement des implantations de valve aortique par voie transcutanée (TAVI), permettant un remplacement valvulaire chez des patients ayant des contre-indications à la chirurgie ouverte, a augmenté le nombre de patients pris en charge en hospitalisation 18,19. Enfin, les améliorations dans la prise en charge des patients atteints de valvulopathie pourraient expliquer une survie plus longue des porteurs de ces maladies, à l’origine d’une augmentation de la prévalence de la maladie, sans augmentation de la mortalité.
Une étude américaine récente suggère une augmentation de la mortalité du rétrécissement aortique jusqu’en 2013 et une amorce de diminution entre 2013 et 2017 16. Dans notre étude, nous avons trouvé une augmentation de plus de 10% de la mortalité des RAnr (entre 2000 et 2012), et une diminution durant les deux dernières années d’étude (entre 2012 et 2014). Cependant, cette tendance devra être confirmée dans les années à venir.
Par ailleurs, notre étude a montré que la mortalité associant des VR a fortement diminué entre 2000 et 2014 en France. Cela est cohérent avec la diminution de l’incidence des patients hospitalisés pour VR dans notre pays 15, reflétant une diminution du RAA liée à la meilleure prise en charge des angines à streptocoques du groupe A. En 2013, la mortalité due aux cardites rhumatismales a été estimée à 4,4 pour 100 000 PA dans le monde avec une diminution importante dans les pays occidentaux 10,20,21.
Concernant la répartition géographique de la mortalité avec VNR, on retrouvait un gradient Nord/Sud et Ouest/Est avec une mortalité plus élevée au Nord et à l’Ouest. Un des éléments permettant d’expliquer ces disparités pourrait résider dans l’inégale répartition des facteurs de risque cardiovasculaires des VNR en France. Cependant, les disparités départementales de mortalité n’étaient pas totalement superposables aux disparités d’incidence des patients hospitalisés pour valvulopathies 15. L’incidence des patients hospitalisés pour VNR était beaucoup plus importante que la moyenne nationale dans le Sud-Est et dans les DOM, ce que nous n’avons pas retrouvé en termes de mortalité. Cependant les cartes de mortalité correspondaient à des données plus anciennes (mortalité : 2012-2014 – incidence : 2014-2016). Concernant les VNR, l’incidence des patients hospitalisés était plus élevée autour de Rouen, Toulouse et Clermont-Ferrand que dans le reste de la France. Or, ces centres ne présentaient pas un taux de mortalité plus élevé dans notre étude. Cela pourrait s’expliquer par la prise en charge d’un grand nombre de patients par TAVI dans les CHU de ces trois villes, sans que cela n’augmente la mortalité dans ces départements. À l’inverse, le taux de mortalité pour VNR était élevé en Bretagne, alors que l’on ne retrouvait pas une incidence particulièrement élevée des patients hospitalisés pour valvulopathie dans ces départements. Une des hypothèses pour expliquer cela serait une moindre hospitalisation des patients atteints de valvulopathie dans ces départements, donc des différences de pratiques ou d’accès aux soins.
Forces et limites
La principale force de cette étude réside dans l’exhaustivité des données, avec une base rassemblant l’ensemble des décès survenus en France. Néanmoins, notre étude comporte des limites.
Les causes de décès sont notifiées par le médecin réalisant le certificat de décès. Cette étape de la certification peut être imprécise ou incomplète (causes associées), puisque le médecin peut méconnaître l’historique des raisons de la mort du patient 17. Ainsi, si le médecin n’a pas mentionné la valvulopathie sur le certificat de décès, nous ne pouvions pas l’identifier et cela a pu nous amener à sous-estimer les incidences.
Par ailleurs, l’analyse en causes multiples, incluant les patients décédés de valvulopathie (cause initiale) ou dont la valvulopathie a participé au processus morbide ou était présente chez le patient (cause associée), est à interpréter avec précaution. En effet, seule la cause initiale de décès fait l’objet d’une définition formelle. Il est ainsi difficile d’évaluer le poids et l’importance de la valvulopathie codée uniquement en cause associée dans le processus létal 17. Dans notre population d’étude et plus particulièrement pour les patients décédés avec mention d’une valvulopathie uniquement dans les causes associées, nous ne pouvons pas affirmer un lien direct de causalité entre le décès et la valvulopathie. Ainsi, pour 7% des patients décédés avec valvulopathie, la cause initiale de décès était une affection tumorale (soit 16% des patients décédés avec une valvulopathie en cause associée uniquement). Cependant, la valvulopathie a probablement participé indirectement au décès en fragilisant le patient. Une analyse spécifique réduite aux patients ayant une valvulopathie codée en cause initiale de décès a montré que les caractéristiques des patients et les évolutions étaient similaires. De plus, cette analyse en causes multiples a permis de comparer nos résultats à l’étude américaine de Bevan et coll., restreinte à la mortalité avec rétrécissement aortique, qui montrait des résultats similaires 16.
Enfin, l’analyse en causes multiples a permis de s’affranchir d’un potentiel biais de sélection lié aux priorisations de codage de la valvulopathie entre cause initiale et associée et entre les différents types de lésions valvulaires pour les patients atteints d’affections multivalvulaires. En effet, l’analyse en causes multiples a permis d’identifier les atteintes multivalvulaires et ainsi de classer dans plusieurs sous-groupes de type de lésions valvulaires un même patient.
Cependant, les taux de décès avec atteintes multivalvulaires selon l’étiologie de la valvulopathie sont à interpréter avec prudence puisqu’un code spécifique existe pour les atteintes multivalvulaires rhumatismales (I08), alors qu’il n’en existe pas pour les atteintes multivalvulaires non rhumatismales. Ces dernières ne pouvaient donc être identifiées que par le codage de plusieurs lésions de valves. Les décès avec VR codées I08 étaient également classés dans les lésions de valves spp, ce qui peut expliquer le taux plus important de valvulopathies aortiques, mitrales et tricuspides spp parmi les VR que parmi les VNR.
Enfin, dans certains certificats de décès, nous trouvions un code de VR et un de VNR, ce qui ne nous permettait pas de définir précisément l’étiologie de la valvulopathie. Cependant, cela concernait un nombre restreint de patients (403 patients en 2014). Ces patients ont été classés dans les deux groupes : les tendances observées étaient en accord avec la littérature scientifique, ce qui nous a conforté dans l’utilisabilité de ces données et dans leur utilité pour la surveillance des valvulopathies en France.
Enfin, la déclinaison des indicateurs de mortalité selon le type précis de valvulopathie était limitée par l’utilisation importante des codes de valvulopathies « sans précision » (atteinte valve aortique sans précision, atteinte valve mitrale sans précision, etc.). Entre 2000 et 2002, nous avons observé une diminution importante des atteintes de la valve mitrale rhumatismale sans précision (I059) avec, en regard, une importante augmentation des insuffisances mitrales rhumatismales (I051). De ce fait, nous n’avons pas pu analyser les tendances temporelles 2000-2002 car elles reflétaient essentiellement une modification des pratiques de codage.
Conclusion
En 2012-2014, des disparités départementales de mortalité avec valvulopathie ont été mises en évidence par cette étude. De plus, entre 2000 et 2014, la mortalité avec VR a diminué tandis que celle avec VNR est restée stable. Le vieillissement de la population et l’amélioration de la prise en charge des valvulopathies et de leurs facteurs de risque pourraient expliquer ces tendances nationales et s’intensifier dans les années à venir.
Liens d’intérêt
C. Grave, P. Tuppin, A. Weill, A. Gabet et V. Olié déclarent n’avoir aucun lien d’intérêt au regard du contenu de l’article. Y. Juillière déclare avoir des liens d’intérêt, en dehors du cadre de cette étude, avec les laboratoires Abbott Vascular, Air Liquide Santé International, Amgen, Bayer, Boston Scientific, Bristol-Myers Squibb, GSK, SD/Schering-Plough, Novartis, The Medicines Company, Roche Diagnostics, Sanofi-Aventis, Servier et St. Jude Medica. C. Tribouilloy déclare avoir des liens d’intérêt, en dehors du cadre de cette étude, avec les laboratoires Actelion, Astra Zenaca, Bayer, Bristol-Myers Squibb, Edwards, Novartis, LIVA NOVA et MSD.
Références
publiquefrance.fr/beh/2020/4/2020_4_1.html
2008-2017. JAMA. 2019;321(22):2236-2238.
Citer cet article
france.fr/beh/2020/4/2020_4_2.html