Analyse de la mortalité par cause : pondération des causes multiples

// Analysis of cause-related mortality: weighting multiple causes

Grégoire Rey1 (gregoire.rey@inserm.fr), Clara Piffaretti1, Claire Rondet1, Agathe Lamarche-Vadel1, Margarita Moreno-Betancur1,2,3
1 Centre d’épidémiologie sur les causes médicales de décès – Institut national de la santé et de la recherche médicale (CépiDc-Inserm), Le Kremlin-Bicêtre, France
2 Clinical Epidemiology and Biostatistics Unit, Murdoch Children’s Research Institute, Melbourne, Australia
3 Department of Epidemiology and Preventive Medicine, Monash University, Melbourne, Australia
Soumis le 03.10.2016 // Date of submission: 10.03.2016
Mots-clés : Cause de décès | Part attribuable | Méthode statistique
Keywords: Cause of death | Attributable fraction | Statistical method

Résumé

Objectif –

L’analyse des données de mortalité est essentielle à l’observation en santé publique. Dans un contexte où les décès sont souvent attribuables à plusieurs maladies, cet article présente une nouvelle méthode permettant de réévaluer les taux standardisés de mortalité par cause, en considérant plusieurs causes par décès.

Méthode –

À partir des données de la base nationale des causes de décès en 2010, nous avons calculé des taux standardisés de mortalité par cause en utilisant : la cause initiale de décès et deux stratégies de pondération des causes multiples (PCM), qui attribuent un poids aux différentes causes mentionnées sur le certificat de décès.

Pour chaque décès, la somme des poids est égale à 1. Ainsi, l’influence de chaque décès sur les taux de mortalité reste la même. Les variations relatives des taux standardisés de mortalité selon les deux stratégies PCM par rapport aux taux obtenus avec la méthode en cause initiale ont été calculées.

Résultats –

L’utilisation d’une stratégie de pondération modifiait sensiblement la distribution des taux standardisés par cause. La variation relative du taux standardisé de mortalité obtenue avec la seconde stratégie PCM était supérieure à 20% pour cinq catégories de maladies : maladies génito-urinaires, hématologiques, endocriniennes, dermatologiques et troubles mentaux.

Conclusion –

Cette nouvelle méthode de pondération permet d’exploiter en totalité les causes médicales du certificat de décès pour tenir compte du caractère pluricausal de la mortalité et d’obtenir ainsi des indicateurs de mortalité par cause plus pertinents pour la santé publique.

Abstract

Objective –

The analysis of mortality data is important for public health monitoring. In a context where deaths are often caused by more than one disease, this article presents a new method for reevaluating standardized mortality rates by disease, by considering multiple causes of death.

Method –

Using data from the French National Cause-of-Death Register in 2010, we calculated standardized mortality rates by cause using: only the underlying cause of death and two experimental weighting multiple cause of death (WMC) strategies, that assign a weight to each cause mentioned on the death certificate.

The sum of the weights for each death always equalled 1, so that each death had an equal influence on death rates. Relative variations of standardized deaths rates were estimated according to the two WMC strategies, compared with the rates obtained with the classic method.

Results –

The use of a weighting strategy changed substantially the distribution of standardized rates by cause. The relative increase of standardized mortality rates obtained with the second WMC strategy exceeded 20% in five categories: genitourinary diseases, blood diseases, endocrine diseases, skin diseases and mental disorders.

Conclusion –

This new weighting method allows to study in depth the medical causes of the death certificate to reflect the multi-causal nature of mortality. Thus, it enables to obtain more relevant cause-specific mortality indicators for public health.

Introduction

L’analyse des données de mortalité est essentielle au développement et à l’évaluation des politiques de santé. L’importance des données concernant les causes de décès se traduit par des efforts internationaux considérables de standardisation des certificats de décès et des règles de codage de la classification internationale des maladies (CIM) par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Le volet médical du certificat de décès, au format international, comprend deux parties. Dans la partie I, le médecin décrit le processus morbide principal ayant conduit au décès avec, sur la première ligne, la cause immédiate, c’est à dire la dernière ayant directement entrainé la mort, et sur la dernière ligne renseignée, la cause initiale à l’origine du processus morbide. Ainsi, la partie I comprend l’enchaînement causal provoqué par la cause initiale. Dans la partie II, toutes les autres maladies qui ont pu contribuer à la mort sont signalées. Les certificats ne sont pas toujours correctement remplis, raison pour laquelle il existe un ensemble de règles de l’OMS pour sélectionner la cause initiale de décès 1. Les statistiques de mortalité déclinées par cause sont principalement basées sur une unique cause par décès, le plus souvent la cause initiale de décès (méthode classique). Toutefois, l’hypothèse que tous les décès sont attribuables à une seule cause est remise en question. Dans le contexte d’une population vieillissante et d’une diminution du poids des maladies infectieuses sur la mortalité au profit des maladies chroniques et neurodégénératives, plusieurs maladies peuvent être considérées comme une des causes du décès 2.

Par ailleurs, les pays industrialisés utilisent de façon croissante des logiciels de codage automatique permettant de traiter et de conserver toutes les causes mentionnées sur le certificat de décès.

C’est pourquoi l’utilisation de méthodes dites en « causes multiples » de décès est de plus en plus répandue. Ce terme recouvre toute approche qui prend en compte d’autres causes que la cause initiale signalée sur le certificat de décès. Par exemple, des taux de mortalité associé à une maladie sont recalculés en considérant toute mention de celle-ci sur le certificat 3.

La méthode classique ne permet pas d’intégrer la possibilité qu’un décès soit attribuable à plusieurs causes simultanément, et donc ne permet pas de refléter la part imputable à chacune dans un décès. La méthode « toute mention », quant à elle, considère indistinctement toutes les causes relatives à un décès et utilise comme unité statistique la cause de décès et non plus le décès. Ceci peut amener à dénombrer plusieurs fois le même décès dans des calculs s’intéressant à différentes maladies, ainsi qu’à des indicateurs par maladie difficilement comparables et à une surestimation de la puissance statistique des analyses. Par ailleurs, la méthode « toute mention » attribue de façon égale un décès aux différentes causes mentionnées sur le certificat, sans distinguer de causes potentiellement plus contributives que d’autres au décès.

Le présent article vise à proposer une méthode de pondération des causes multiples de décès issues des certificats de décès. Il applique ensuite cette méthode à la mesure de la mortalité attribuable aux différentes causes. Il reprend les éléments d’articles précédemment publiés 4,5.

Matériel et méthodes

Cadre conceptuel

La méthode proposée, dite de pondération des causes multiples (PCM), est basée sur l’attribution d’un poids positif ou nul à chaque cause mentionnée sur le certificat de décès. Pour chaque certificat, la somme des poids de toutes les causes mentionnées est égale à 1. L’objectif de cette méthode est de permettre à toutes les causes qui contribuent au décès d’être prises en compte dans les analyses, tout en assurant que chaque décès ait une influence égale dans l’analyse quel que soit le nombre de causes mentionnées. Idéalement, le poids attribué à chaque maladie doit refléter l’importance relative de son rôle causal dans la survenue du décès. Il est important de considérer qu’à ce jour, le choix des stratégies d’attribution des poids est sujet à avis d’experts, tout comme l’est le choix de la cause initiale. À ce stade, l’utilisation de la méthode PCM doit être considérée comme une analyse de sensibilité.

Données

Pour illustrer les conséquences de l’application de cette nouvelle méthode sur la part de mortalité attribuable aux différentes causes, les données concernant tous les décès survenus en France au cours de l’année 2010 ont été utilisées. Toutes les causes de décès déclarées sur le certificat de décès ont été extraites, y compris la cause initiale de décès, codée par l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale) – CépiDc (Centre d’épidémiologie sur les causes médicales de décès) au moyen de la CIM-10 (Classification internationales des maladies, 10e révision).

Le regroupement des causes de décès en 17 chapitres a été utilisé. Les codes non pertinents, c’est à dire ne se référant pas à des maladies ou à des causes externes (chapitres I à XVIII et chapitre XX de la CIM-10) ont été exclus. Aucun de ces codes exclus ne peut être retenu comme cause initiale. Il s’agit des facteurs de risque, antécédents familiaux, circonstances socioéconomiques et psychosociales, types de blessures et d’empoisonnements et certaines autres conséquences de causes externes (commençant par la lettre S, T, U ou Z, ce qui correspond aux chapitres XIX, XXI et XXII de la CIM-10).

Analyses statistiques

Les décès ont été dénombrés par groupe de causes de décès selon que celles-ci sont retenues en cause initiale ou sont mentionnées sur le certificat. Nous avons également examiné le nombre moyen de causes déclarées sur les certificats de décès.

Nous avons ensuite calculé les taux standardisés de mortalité selon l’âge et le sexe pour chaque groupe de causes de décès en utilisant : a) la méthode classique, en ne considérant que la cause initiale de décès et b) les deux stratégies de la méthode PCM décrites ci-dessous.

Stratégies de pondération des causes multiples

Deux stratégies de pondération sont proposées pour appliquer la méthode PCM. Elles sont exposées ci-dessous et illustrées dans le tableau 1.

Tableau 1 : Application des stratégies de pondération à un certificat de décès. Poids attribués à un certificat renseigné de façon correcte
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La première stratégie de pondération (PCM1) attribue un poids égal à chaque cause déclarée sur le certificat de décès. Ainsi, si la cause c est mentionnée sur le certificat i et un total de causes ni sont rapportés, le poids attribué à la cause c est :

La seconde stratégie de pondération (PCM2) attribue un poids wCI à la cause sélectionnée comme cause initiale de décès, wCI étant une constante fixée entre 0 et 1, et le poids restant est distribué entre les autres causes mentionnées sur la partie II du certificat, comme suit :

nII,i est le nombre de causes mentionnées en parte II du certificat de décès, à l’exception de la cause initiale (si elle est reportée en partie II, ce qui peut arriver suite à l’application de certaines règles de codage de l’OMS). Si une seule cause est mentionnée sur le certificat, celle-ci est nécessairement la cause initiale et a un poids wc,i de 1. Cette stratégie vise à ne prendre en compte, en plus de la cause initiale, que les causes considérées sur un chemin causal différent de celui du processus morbide principal qui commence par la cause initiale. C’est pourquoi les causes mentionnées en partie I, qui font partie de l’enchaînement causal provoqué par la cause initiale, se voient attribuer un poids nul. L’étude de ces processus morbides distincts est ainsi d’interprétation causale plus simple. C’est pourquoi nous détaillons plus précisément dans la suite les variations obtenues avec cette stratégie que nous considérons plus intéressante.

Dans la méthode classique en cause initiale, wCI = 1, ce qui signifie que le décès est attribué intégralement à la cause initiale, indépendamment des autres causes mentionnées. En attribuant un poids inférieur à la cause initiale de décès, il est possible de distribuer le poids restant entre d’autres causes. Dans cette phase exploratoire, la valeur retenue de wCI a fait l’objet d’un choix arbitraire, tout comme l’est le choix wCI = 1. Dans le cas de l’application de la stratégie PCM2, il est aisément vérifiable empiriquement et sur le plan théorique que la distribution de la mortalité par cause obtenue avec un poids variant entre deux bornes se situe entre les distributions obtenues pour ces deux bornes. C’est pourquoi, dans nos analyses, nous avons fixé une constante relativement faible de 0,5 pour mieux illustrer l’impact de la méthode PCM2 comparée à la méthode classique.

Calcul de taux standardisés à partir de la méthode PCM

Une fois les poids affectés à chacune des causes pour chaque certificat en utilisant une des stratégies de la méthode PCM, des taux de mortalité standardisés sur l’âge (ici groupé en tranches de 5 ans) et le sexe peuvent être calculés pour chaque cause de la façon suivante.

Premièrement, la somme des poids attribués à la cause c pour tous les individus i est calculée dans le groupe d’âge a et de sexe s comme :

DCa,s est l’ensemble des décès d’âge a et de sexe s et wc,i est le poids attribué à la cause c sur le certificat de décès de l’individu i.

Puis le taux standardisé de mortalité pour la cause c est obtenu par :

et popa,s sont respectivement les effectifs des populations de référence et d’étude, dans le groupe d’âge a et de sexe s.

La population de référence utilisée dans cette étude était la population Standard UE-27 + EFTA publiée par Eurostat en 2013.

Pour chaque cause, nous avons calculé globalement, par groupe d’âge et par sexe, la variation relative du taux standardisé de mortalité en fonction de la stratégie de la méthode PCM, par rapport au taux obtenu avec la méthode en cause unique.

Résultats

Description des données

Un total de 552 571 décès a été enregistré en France en 2010. En moyenne, 3,4 causes de décès étaient renseignées par certificat.

Les variations du nombre moyen de causes mentionnées sur le certificat par âge étaient faibles : 80% des décès sont survenus entre 55 ans et 93 ans, avec un nombre moyen de causes compris entre 3,2 et 3,6 (figure). Cependant, le nombre moyen de causes était plus faible pour les 15-34 ans (entre 2,6 et 3,1 causes).

Figure : Nombre moyen de causes mentionnées par certificat de décès selon l’âge et le sexe, France, 2010
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Les catégories de causes initiales de décès associées aux nombres moyens de causes mentionnées les plus élevés étaient les maladies du système musculo-squelettique, de la peau, endocriniennes, et hématologiques (tableau 2). Ces mêmes catégories étaient associées à un ratio élevé du nombre de mentions de ces causes sur le nombre de décès avec ces causes retenues comme cause initiale. Cependant, pour la catégorie des états morbides mal définis, ce ratio était le plus élevé alors que le nombre moyen de causes reportées était le plus faible.

Tableau 2 : Ratio entre dénombrement des décès « toutes mentions » et en cause initiale des causes mentionnées sur le certificat de décès
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Variation relative des taux standardisés de mortalité selon la stratégie de pondération

Dans la suite, nous commentons uniquement les résultats obtenus avec la stratégie PCM2, théoriquement la plus simplement interprétable et intéressante.

Avec cette stratégie, l’augmentation relative du taux standardisé de mortalité est supérieure à 20% pour cinq catégories de causes de décès : les maladies génito-urinaires, hématologiques, endocriniennes, dermatologiques et les troubles mentaux (tableau 3). Avec un niveau plus fin de regroupement de causes, d’autres sous-catégories ressortent, comme les pathologies rhumatismales (telles que l’arthrite rhumatoïde et l’ostéoarthrite, avec 44% d’augmentation – résultats non montrés). Enfin, une variation nulle ou faiblement à la baisse était observée pour les maladies cardiovasculaires, les maladies du système respiratoire et les affections périnatales.

Tableau 3 : Variation relative des taux standardisés de mortalité1
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En particulier, comme attendu, notre méthode entraîne une diminution du poids des causes quasi-systématiquement retenues comme cause initiale lorsqu’elles sont mentionnées sur un certificat de décès. C’est le cas des causes externes, des tumeurs, des malformations congénitales et des maladies du système digestif. Cette diminution était particulièrement nette avec la stratégie PCM1, notamment pour les catégories de causes initiales pour lesquelles le nombre de causes associées était élevé, puisque cette stratégie n’attribue pas à la cause initiale un poids plus élevé qu’aux autres causes.

Discussion

Nos résultats retrouvent les augmentations du poids que prennent certaines catégories de maladies dans la mortalité, déjà identifiées dans des études préalables comme rarement sélectionnées en tant que cause initiale de décès et ayant un poids sous-estimé sur la mortalité avec la méthode classique. C’est le cas du diabète 6,7,8, des pathologies dermatologiques et hématologiques 9,10 et des maladies rénales 6,3. Certaines catégories de maladies pour lesquelles une augmentation de leur poids sur la mortalité est retrouvée en utilisant les méthodes de pondération étaient moins connues dans la littérature, comme les troubles mentaux 11 et les pathologies rhumatismales, en particulier l’arthrite rhumatoïde et l’ostéoarthrite 12.

D’autres catégories de maladies, comme les maladies cardiovasculaires, n’étaient pas ou peu influencées par l’application de la stratégie PCM2, ce qui est également cohérent avec la littérature 6. En revanche, contrairement à de précédents résultats 6, notre étude retrouve une baisse du poids de plusieurs maladies sur la mortalité, comme la grippe ou les causes externes.

Une limite de cette étude, partagée par toutes les études traitant des causes multiples de décès, provient du fait que la qualité et la comparabilité des données sont imparfaites 13,14,15. De plus, les nombreuses règles de codage ainsi que la multiplicité et la complexité des combinaisons de causes possibles sur un certificat peuvent entrainer des interprétations erronées. Cependant, les données de mortalité demeurent une référence pour le suivi d’indicateurs de santé, et toutes les approches visant à améliorer leur exploitation doivent être considérées, notamment celles prenant en compte les causes multiples de décès. Les pays bénéficiant d’un recueil des causes multiples de décès similaire à la France sont de plus en plus nombreux grâce à l’adoption graduelle de logiciels internationaux de codage des causes de décès. Pour les autres pays, cette méthode pourrait être vue comme une incitation à mettre en place un système de recueil plus systématique des causes de décès.

La stratégie PCM2 vise à prendre en compte uniquement la cause initiale et les causes contributives en partie II du certificat de décès, considérées comme appartenant à un chemin causal différent de celui du processus morbide principal menant au décès. Cette hypothèse n’est vraie que si le certificat de décès est complété correctement, ce qui est loin d’être systématique. D’autre part, cette stratégie est moins adaptée lorsque la question de recherche concerne plutôt des complications de la maladie que la maladie initiale elle-même. Lorsqu’un chercheur s’intéresse à une problématique spécifique, les causes à considérer peuvent être choisies en conséquence : par exemple, une étude sur des causes externes pourrait intégrer certains codes précisant le type de traumatismes ou d’empoisonnement (commençant par les lettres S et T), exclus de la présente étude.

La principale limite relative à la méthode provient du fait que la pondération des causes multiples de décès ne permet d’obtenir qu’une vision synthétique du processus causal par lequel les maladies se combinent pour mener au décès 5. Ainsi, en l’absence d’éléments externes venant objectiver le choix d’une stratégie de pondération ou de ses différents paramètres, l’attribution d’une valeur aux poids de pondération reste arbitraire et devra être accompagnée d’une analyse de sensibilité. À l’avenir, comme c’est le cas pour la cause initiale de décès aujourd’hui, la stratégie de pondération devrait faire l’objet d’un consensus international. De futurs travaux seraient nécessaires pour explorer la faisabilité d’estimer les poids comme les fractions attribuables aux différentes maladies pour chaque décès. Ces dernières estimations sont aussi limitées par la subjectivité qui entoure l’attribution de « responsabilité causale » à différentes maladies causant ensemble le décès. De plus, cela nécessiterait d’utiliser des bases de données longitudinales enregistrant les maladies et les évènements dans le temps, ce qui en France n’est envisageable qu’à travers l’exploitation de bases de données médico-administratives. Enfin, il serait utile de construire des règles de décision internationales pour attribuer un rôle spécifique aux différentes causes mentionnées sur le certificat de décès, par exemple les états morbides mal définis et l’arrêt cardiaque, qui devraient vraisemblablement avoir un faible poids attribué. Ces règles supplémentaires aideraient à distinguer de façon plus systématique les maladies présentes sur des chemins causaux différents, ce qui peut guider la stratégie de pondération. Ces efforts viendraient s’ajouter dans la continuité de ceux commencés depuis de nombreuses années vers la standardisation de la certification et du codage des décès au sein des pays et à l’international pour améliorer la comparabilité des statistiques obtenues à partir de ces données.

Conclusion

La cause initiale de décès est une information importante, mais la contribution à la mortalité d’autres causes mentionnées sur le certificat de décès ne doit pas être négligée.

Les analyses exploratoires réalisées dans cette étude pour mesurer le poids des différentes maladies sur la mortalité sont prometteuses et suggèrent de nouvelles possibilités d’analyses des données de causes multiples de décès. L’utilisation de cette méthode de pondération dans l’étude étiologique de la mortalité attribuable à des causes, en particulier fondée sur des modèles de régression de Cox pour des données de survie, a été développée par ailleurs 5.

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Citer cet article

Rey G, Piffaretti C, Rondet C, Lamarche-Vadel A, Moreno-Betancur M. Analyse de la mortalité par cause : pondération des causes multiples. Bull Epidémiol Hebd. 2017;(1):13-9. http://invs.santepubliquefrance.fr/beh/2017/1/2017_1_2.html