Les victimes de brûlures : patients hospitalisés en France métropolitaine en 2011 et évolution depuis 2008

// Burn victims: patients hospitalised in metropolitan France in 2011 and trends since 2008

Axelle Dupont, Anne Pasquereau, Annabel Rigou, Bertrand Thélot (b.thelot@invs.sante.fr)
Institut de veille sanitaire, Saint-Maurice, France
Soumis le 24.07.2015 // Date of submission: 07.24.2015
Mots-clés : Brûlures | Traumatismes | Hospitalisation | Surveillance épidémiologique
Keywords: Burns | Trauma | Hospitalisation | Epidemiological surveillance

Résumé

Introduction –

Les brûlures entraînent chaque année en France plusieurs centaines de décès et des séquelles physiques et psychologiques importantes.

Méthodes –

Les données du Programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI) de 2008 à 2011 ont été analysées pour la France métropolitaine. Tous les séjours hospitaliers de court séjour comportant un diagnostic principal de brûlure, codé en T20 à T32 dans la Classification internationale des maladies, 10e révision (CIM-10), ont été exploités.

Résultats –

En 2011, en France métropolitaine, 8 670 personnes (résidant en France métropolitaine) ont été hospitalisées pour brûlures, correspondant à 11 651 séjours hospitaliers. Les enfants de 0 à 4 ans représentaient plus du quart des victimes, les personnes de sexe masculin 63%. Pour 11,5% des patients hospitalisés en centre de traitement des brûlés, la brûlure était grave. Le taux d’incidence brut de victimes de brûlures hospitalisées était de 13,7 pour 100 000 habitants. Il était particulièrement élevé chez les enfants de moins de 5 ans (60,7) et chez les hommes (17,9 vs 9,9 chez les femmes). Le nombre de décès à l’hôpital était de 215, soit un taux de létalité intra-hospitalier de 2,5%.

Conclusion –

Ces résultats épidémiologiques, cohérents avec la littérature internationale, caractérisent les patients atteints de brûlures et leur prise en charge hospitalière. Ils montrent l’importance de développer des actions de prévention, notamment chez les enfants à partir du moment où ils commencent à marcher, et chez les personnes âgées, chez qui les brûlures sont moins fréquentes mais plus graves. Ils pourraient être très utiles pour la planification et l’organisation des moyens hospitaliers.

Abstract

Introduction –

Every year, burns are responsible for several hundreds of deaths, as well as physical and psychological sequalae.

Methods –

Data from the French National Hospital Discharge Programme were analysed over the period 2008-2011 for metropolitan France. All hospitalisations in acute care hospitals with a principal diagnosis of burns, coded T20 to T32 in the International Classification of Diseases, 10th revision (ICD10), were analysed.

Results –

In 2011 in metropolitan France, 8,670 patients (living in metropolitan France) were hospitalised for burn, representing 11,651 hospitalisations. Children aged 0-4 year-old accounted for more than a quarter of all burn victims, and men for 63%. Among patients hospitalised in burn centers, 11.5% of them had a severe burn. The crude incidence hospital rate was 13.7 per 100,000 inhabitants. It was particularly high among children under 5 years old (60.7) and in men (17.9 vs 9.9 in women). The number of hospital deaths was 215, representing a fatality rate of 2.5%.

Conclusion –

These epidemiological results, consistent with the international literature, characterize patients with burns and their hospital care. They highlight the importance of developing prevention interventions, particularly among children, from the moment they start walking, and among the elderly, in whom burns are less frequent but more severe. They could be very useful for planning and organising hospital resources.

Introduction

Les brûlures, qu’elles soient d’origine intentionnelle (agression, suicide) ou accidentelle (circulation, travail ou vie courante), peuvent entraîner des séquelles physiques et psychologiques graves, avec des répercussions majeures sur l’individu et son entourage. La prise en charge des victimes de brûlures nécessite des moyens importants et particulièrement coûteux 1.

Il existe des études épidémiologiques françaises sur les brûlures réalisées à partir de l’activité de services hospitaliers. Ces travaux apportent des connaissances sur les causes de brûlures 2. Ils ciblent des populations spécifiques (personnes âgées 3,4, brûlures de la face chez l’enfant 5), un type de brûlure (chimiques et électriques 6) ou portent sur la mortalité 7. Une étude menée en Île-de-France rend compte de la prise en charge des enfants ayant recours aux urgences pour brûlures et en particulier des transferts vers les « Centres de grands brûlés », ou centres de traitement des brûlés (CTB) 8. Enfin, un ouvrage sur « Les brûlures » présente également des résultats épidémiologiques, qui comparent la situation en France à celles d’autres pays développés 9.

Depuis 2006, dans le cadre de ses missions de surveillance épidémiologique, l’Institut de veille sanitaire (InVS) produit des résultats sur les hospitalisations pour brûlures 10. Cet article présente l’épidémiologie descriptive des victimes de brûlures hospitalisées entre 2008 et 2011, en France métropolitaine, leur profil démographique, les taux d’incidence hospitaliers, les indicateurs de gravité et de létalité et les facteurs de risque associés à la mortalité par brûlures en milieu hospitalier.

Méthodologie

Les données retenues pour cette étude sont celles du Programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI) en médecine-chirurgie-obstétrique de court séjour (PMSI-MCO) pour les années 2008 à 2011. Chaque hospitalisation ou séjour hospitalier (en abrégé, séjour) donne lieu à la production d’un résumé de sortie standardisé (RSS) qui, anonymisé, devient un résumé de sortie anonyme (RSA). Les données exploitées sont donc celles de la base PMSI des RSA. Les hospitalisations survenues en France métropolitaine et ayant un diagnostic principal de brûlures codé en T20 à T32 « Brûlures et corrosions » selon la Classification internationale des maladies, 10e révision (CIM-10), ont été sélectionnées.

Les données ont été exploitées par année. Un patient atteint de brûlure a pu être hospitalisé dans l’un des 18 CTB existant en 2011 (19 CTB en 2010, 20 en 2009 et 2008). Mais il a aussi pu être hospitalisé dans un autre service, non CTB, en réanimation, en médecine interne, en chirurgie plastique, en dermatologie, etc. Les données du PMSI disponibles ne permettaient pas de distinguer les différents services au sein d’un hôpital. Par conséquent, dans cette étude, les séjours hospitaliers « en CTB » sont par définition ceux qui ont eu lieu « dans un hôpital disposant d’un CTB » ; les séjours hospitaliers « dans les autres services » ont donc été effectués dans les hôpitaux dépourvus d’un CTB.

La gravité des brûlures a été mesurée selon trois critères : le pourcentage de la surface du corps atteinte, la présence de brûlures au niveau des voies respiratoires et l’âge. Les brûlures graves sont définies comme les brûlures remplissant l’une des trois conditions suivantes :

  • brûlures couvrant au moins 20% de la surface du corps chez les enfants de moins de 5 ans ;
  • brûlures couvrant au moins 30% de la surface du corps chez les personnes âgées de 5 ans et plus ;
  • présence de brûlures au niveau des voies respiratoires.

Le degré de gravité des brûlures est représenté par l’indice x accolé aux codes T31x et T32x, qui donne l’information sur le pourcentage de surface de corps atteinte : si x=1, entre 10% et moins de 20% de la surface du corps est brûlée ; si x=2 entre 20% et moins de 30% l’est, et ainsi jusqu’à x=9 quand 90% et plus de la surface du corps est brûlée. Lorsque ce x n’est pas renseigné, il n’est pas possible d’analyser la gravité des brûlures. Et en effet, en 2011, la gravité n’était pas toujours renseignée : elle l’était dans 85% des séjours en CTB et seulement dans 24% des séjours dans les autres services. L’étude de la gravité des brûlures a ainsi porté uniquement sur les séjours dans les hôpitaux dotés d’un CTB.

La procédure de chaînage des données permet de relier les séjours d’un même patient au cours d’une période déterminée. Les chaînages ont été effectués par année. Pour un patient ayant effectué plusieurs séjours hospitaliers pour brûlures dans l’année, c’est le premier séjour qui a été retenu, en faisant l’hypothèse que le motif de prise en charge pour brûlures des séjours suivants était lié à celui du premier séjour. Les résultats sur les patients concernent les personnes résidant et hospitalisées en France métropolitaine. Des taux d’incidence de personnes victimes de brûlures, résidant et hospitalisées en France métropolitaine, ont donc pu être calculés. Les taux bruts ont été calculés en rapportant le nombre de patients à la population au 1er janvier 2011 (estimations de l’Institut national de la statistique et des études économiques). Des taux standardisés sur l’âge ont été calculés en prenant comme référence la population française au recensement de 1999. Les analyses ont été réalisées à l’aide du logiciel SAS Enterprise Guide®, version 4.3.

Résultats

Caractéristiques des patients et de leurs séjours hospitaliers

En 2011, en France métropolitaine, 8 670 personnes (résidant en France métropolitaine) ont été hospitalisées pour brûlures, correspondant à 11 651 séjours hospitaliers. Le nombre de séjours pour brûlures par patient variait de 1 à 16 sur l’année calendaire et plus de 80% des patients ont eu une seule hospitalisation. Les enfants de moins de 15 ans étaient plus souvent réhospitalisés pour brûlures que les autres patients (figure 1) : ils représentaient les trois quarts des personnes hospitalisées au moins 4 fois dans l’année.

Figure 1 : Répartition des patients victimes de brûlures hospitalisés et résidant en France métropolitaine par classe d’âge, selon le nombre d’hospitalisations pour brûlures au cours de l’année 2011 (N=8 670)
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Les hommes (5 465 ; 63%) étaient plus nombreux que les femmes (3 205 ; 37%), soit un sex-ratio de 1,7. L’âge moyen des patients était de 30,4 ans : 29,8 ans pour les hommes et 31,4 ans pour les femmes. Les enfants de 0 à 4 ans représentaient plus du quart des personnes hospitalisées (27%) ; parmi eux la moitié avait 1 an révolu.

On observait une légère augmentation des hospitalisations pour brûlures durant les mois d’été, avec des différences significatives selon l’âge (figure 2). Les enfants de moins de 2 ans et les personnes de 50 ans et plus étaient plus fréquemment hospitalisées pour brûlures entre novembre et mars, alors que les personnes âgées entre 2 et 49 ans l’étaient davantage de mai à septembre.

Figure 2 : Répartition mensuelle des hospitalisations des victimes de brûlures hospitalisées et résidant en France métropolitaine par classe d’âge, 2011 (N=8 670)
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En 2011, 3 541 patients hospitalisés pour brûlures ont effectué leur premier séjour (pour ceux en ayant fait plusieurs pendant l’année) ou leur unique séjour dans un CTB, soit 41%. Les 5 129 autres personnes hospitalisées pour brûlures ont passé leur premier ou unique séjour dans un autre service (59%). Dans les CTB, la brûlure était grave pour 11,5% des patients. La part des personnes gravement brûlées dans chaque groupe d’âge augmentait avec l’âge en CTB : de 5% chez les enfants de moins de 5 ans à 19% chez les personnes de 50 à 79 ans. L’âge moyen des victimes de brûlures graves en CTB (40,5 ans ; médiane=43 ans) était significativement plus élevé que celui des victimes de brûlures peu graves en CTB (30,5 ans ; médiane=27 ans ; p<0,001).

Le nombre moyen de journées d’hospitalisation effectuées par patient dans l’année, appelé durée moyenne d’hospitalisation dans l’année (DMHA), était de 10,1 jours (alors que la durée moyenne de séjour hospitalier au sens RSS était de 7,5 jours) et la médiane était égale à 4 jours. La DMHA augmentait significativement avec l’âge, passant de 7 jours chez les 0-4 ans à 18 jours chez les 80 ans et plus (p<0,001). Parmi les patients qui ont séjourné en CTB, la DMHA était significativement plus élevée pour les brûlures graves (39,5 jours) que pour les brûlures peu graves (12,9 jours). La moitié des patients en CTB victimes de brûlures graves avaient des DMHA de plus de 30 jours.

Les parties les plus fréquemment lésées étaient la tête et le cou (21%), le poignet et la main (19%), le tronc (16%), la hanche et le membre inférieur, hors cheville et pied (13%).

Mortalité hospitalière

En France métropolitaine, en 2011, 215 personnes (résidant en France métropolitaine) sont décédées à l’hôpital des suites d’une brûlure (tableau 1). Le taux de létalité intra-hospitalier, rapporté aux 8 670 patients, était donc de 2,5%. Il s’agissait de 135 hommes et 80 femmes. L’âge moyen des personnes décédées était de 63,9 ans, plus de deux fois plus élevé que l’âge moyen de l’ensemble des patients victimes de brûlures (30,4 ans). Plus de la moitié de ces décès (113) sont survenus chez des personnes âgées de plus de 65 ans, 22% chez des plus de 85 ans et 3 décès concernaient des enfants de moins de 5 ans. Les trois quarts des décès (75%) ont eu lieu en CTB. La durée moyenne du dernier séjour effectué par le patient, celui qui s’est terminé par un décès, était de 16,2 jours, très proche de la durée moyenne de l’ensemble des séjours effectués dans l’année par les patients décédés (17 jours).

Tableau 1 : Évolution des caractéristiques des victimes de brûlures hospitalisées et résidant en France métropolitaine, 2008-2011
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Une analyse multivariée des déterminants associés à la mortalité par brûlures a été réalisée à partir de variables relatives à la personne, à la brûlure et à la période de la première hospitalisation. Le risque de décéder suite à une hospitalisation pour brûlure augmentait avec l’âge (tableau 2). Les personnes âgées de 65 à 84 ans et celles âgées de 85 ans et plus hospitalisées pour brûlures avaient respectivement 8 et 28 fois plus de risque de décéder (mesuré par des odds-ratios assimilés à des risques relatifs) que les personnes âgées de 25 à 44 ans. Les patients hospitalisés en CTB avaient 2,7 fois plus de risque de décéder que les patients hospitalisés dans les autres services, probablement en raison de la différence de gravité des brûlures traitées. Les femmes étaient moins susceptibles (dans un rapport 0,7) de décéder que les hommes.

Tableau 2 : Facteurs associés à la mortalité par brûlures à l’hôpital des patients brûlés hospitalisés et résidant en France métropolitaine, 2011 (analyse en régression logistique)
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Taux d’incidence par âge, sexe et région

En 2011, en métropole, on a enregistré un taux d’incidence brut annuel de victimes de brûlures hospitalisées égal à 13,7 cas pour 100 000 habitants (13,4 après standardisation sur l’âge). Les taux d’incidence bruts par classe d’âge (figure 3) étaient très élevés chez les enfants de moins de 5 ans (60,7/100 000). L’incidence était autour de 10 pour 100 000 pour les 5 ans et plus, avec une augmentation entre 15 et 24 ans (12,6/100 000) et une augmentation pour les âges les plus élevés (13,8/100 000 pour les 85 ans et plus).

Le taux brut de personnes hospitalisées pour brûlures était près de deux fois plus élevé chez les hommes (17,9/100 000) que chez les femmes (9,9/100 000). À tous les âges, les hommes avaient des taux d’incidence supérieurs à ceux des femmes. Chez les moins de 5 ans et chez les plus de 65 ans, l’incidence chez les hommes était 1,3 fois plus élevée que chez les femmes. La différence était la plus forte entre 15 et 64 ans, avec une incidence 2,3 fois plus élevée chez les hommes (16/100 000 contre 7/100 000 chez les femmes).

Figure 3 : Taux d’incidence brut (pour 100 000 habitants) de victimes de brûlures hospitalisées et résidant en France métropolitaine par classe d’âge selon le sexe, 2011
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L’incidence des victimes de brûlures n’était pas homogène sur l’ensemble du territoire français. En 2011, l’Alsace, l’Aquitaine et l’Île-de-France avaient les taux d’incidence les plus faibles (entre 10 et 11/100 000). Le Nord-Pas-de-Calais, la Picardie et le Languedoc- Roussillon avaient les taux les plus élevés (entre 17 et 18/100 000).

Évolutions 2008-2011

Les résultats portant sur l’année 2011 sont proches de ceux des années 2008 à 2010 (tableau 1). Le nombre de patients hospitalisés pour brûlures reste en France au même niveau, près de 9 000 par an. La répartition par âge et sexe, les caractéristiques des personnes gravement brûlées en CTB et le taux d’incidence des hospitalisations sont restés stables sur les quatre années.

Quelques évolutions peuvent toutefois être relevées, notamment pour les personnes décédées à l’hôpital suite à une brûlure. Leur nombre a augmenté légèrement entre 2008 (189 décès) et 2011 (215 décès) ainsi que le taux de létalité intra-hospitalier (2,1 à 2,5%). La part des hommes parmi les décès est passée de 57 à 63% ; l’âge moyen des personnes décédées a atteint 63,9 ans en 2011 contre 61,8 en 2008. L’incidence des hospitalisations pour brûlures a également marqué une hausse chez les personnes de 85 ans et plus, passant de 11,6 en 2008 à 13,9 pour 100 000 habitants en 2011.

Discussion

Chaque séjour hospitalier en France faisant l’objet d’un RSS dans le PMSI, les données du PMSI sont exhaustives. Les codes permettant de rendre compte des brûlures sont peu nombreux et clairement définis dans la CIM-10. On peut faire l’hypothèse que le résumé de sortie de tout patient pris en charge en hospitalisation pour brûlure comporte un code CIM-10 de brûlure.

Les séjours pour brûlures ont été sélectionnés sur le diagnostic principal (DP), qui rend compte du motif d’hospitalisation. Cependant, dans les cas où les motifs d’hospitalisation sont multiples (brûlure accompagnée d’autres traumatismes, par exemple), un DP doit être choisi, et la brûlure peut être codée en diagnostic associé (DA) ou en diagnostic relié (DR) en cas de séquelles. En sélectionnant tous les séjours dont les résumés de sortie comportent un code T20 à T32 en DP ou en DA ou en DR, on obtient 15 169 hospitalisations pour brûlures en 2011 en France métropolitaine, pour les résidents en France métropolitaine (au lieu de 11 651 avec le seul DP). L’incidence de personnes hospitalisées pour brûlures passerait ainsi de 13,7 pour 100 000 habitants à 17,6, soit une augmentation de 28%. Parmi les patients dont les séjours ont un code brûlure en DA ou en DR, les plus de 50 ans, plus souvent pris en charge pour plusieurs pathologies, sont surreprésentés (47% contre 25% avec le seul DP). Le choix fait dans la présente étude de se limiter aux DP garantit que les hospitalisations analysées ont été directement et principalement motivées par une brûlure. La sélection dans les études d’autres pays a été réalisée soit en DP uniquement 11 soit en prenant tous les diagnostics 12,13,14, sans quantification de l’apport des séjours sélectionnés sur les DA. Par ailleurs, dans certaines études, les diagnostics de corrosion (T32, et certains sous-diagnostics entre T20 et T31) ont été exclus. En 2011 en France, 410 séjours avaient un DP de corrosion, soit 3,6% des 11 651 séjours pris en compte dans ce travail.

Parmi les limites liées au PMSI, on peut rappeler qu’il n’est pas possible de distinguer la fréquentation des différents services, CTB ou non, au sein d’un établissement comportant un CTB. La gravité des brûlures à partir du PMSI a pu être étudiée uniquement pour les CTB, qui codent assez couramment cet item dans le PMSI contrairement aux autres services. Les décès dénombrés dans cette étude permettent de rendre compte de la mortalité hospitalière, qui ne reflète pas l’ensemble des décès par brûlures puisqu’une partie intervient sur le lieu de l’accident. D’après les données du Centre d’épidémiologie sur les causes médicales de décès (CépiDc-Inserm), 535 personnes sont décédées par le feu, à l’hôpital ou non, en 2010 15. Les causes externes de morbidité ne sont que très peu renseignées actuellement dans le PMSI. En 2013, le codage des causes de brûlures, à partir d’un thésaurus réalisé par l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH), l’InVS et la Société française d’étude et de traitement des brûlures, a été rendu obligatoire. En fonction des remontées des données, il sera possible à l’avenir d’étudier les causes de brûlures.

Certains des patients hospitalisés une année peuvent aussi avoir été hospitalisés l’année précédente. Le nombre de patients obtenu par chaînage des séjours sur deux années est inférieur à la somme des patients de la première et de la deuxième année. Mais il apparaît que l’écart est assez faible : sur les 8 670 patients de 2011, seulement 150 (1,7%) ont déjà été hospitalisés en 2010 ; sur les 8 846 de 2010, 154 (1,7%) l’ont été en 2009 ; et sur les 8 825 de 2009, 160 (1,8%) l’ont été en 2008. Les taux d’incidence, avec ces corrections, passeraient respectivement de 13,7 à 13,5, de 14,1 à 13,8, et de 14,1 à 13,8 pour 100 000. Enfin, chacun des 172 séjours ne comportant pas de données permettant le chaînage a été considéré comme concernant des patients à séjour unique en 2011, ce qui a probablement conduit à une surestimation de l’ordre de 35 patients.

Le pourcentage de surface cutanée brûlée peut être précisé en utilisant les codes CIM-10 T31 et/ou T32 en DP ou DA. En 2011, ce pourcentage est indiqué dans seulement 20% des séjours hors CTB et 79% en CTB. En analysant ces derniers, il apparaît que la répartition de la surface cutanée brûlée diffère selon l’âge : 95% des enfants de moins de 5 ans hospitalisés en CTB pour leur premier ou unique séjour sont brûlés à moins de 20% (et parmi eux 79% à moins de 10%). Chez les plus de 5 ans, 83% ont été brûlés à moins de 20% (dont 93% à moins de 10%). Tous âges confondus, la répartition des surfaces cutanées brûlées est représentée figure 4 : elle apparaît très proche de celle relevée dans les services de grands brûlés (burn centers) des États-Unis 16. Par ailleurs, 147 patients avaient un code T27 en 2011 (dont 109 (74%) ont été hospitalisé en CTB), soit seulement 1,7% des 8 670 patients, ce qui n’a pas permis de faire des comparaisons internationales.

Figure 4 : Comparaison des pourcentages de surface cutanée atteinte de brûlures chez les patients hospitalisés en centre de traitement des brûlés (PMSI 2011, France métropolitaine) et les burn centers américains 16
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L’incidence des victimes de brûlures hospitalisées de cette étude, 13,4 pour 100 000 habitants en 2011, est cohérente avec plusieurs études menées en France 9 et à l’étranger. Au Portugal, entre 1993 et 1999, l’incidence s’élevait à 21,4 pour 100 000 habitants par an en moyenne 17. En Australie, l’incidence était évaluée à 25,3 pour 100 000 par an entre 2000 et 2006 18. En Suède, entre 2000 et 2004, 13,3 patients ont été hospitalisés pour brûlures chaque année pour 100 000 habitants 12. En Norvège, le taux d’incidence, calculé à partir d’un système d’information similaire au PMSI avec une exhaustivité nationale, s’élevait à 15,5 pour 100 000 en 2007 14.

Dans cette étude, l’incidence chez les enfants de moins de 5 ans est de 61/100 000. Toutes les études, dont les américaines menées à partir d’un registre sur les brûlures 19,20, montrent que les brûlures touchent plus largement les enfants, souvent victimes de brûlures peu graves 12,14,17,18 : 76/100 000 en Australie 18, 83/100 000 en Norvège 14, un peu moins dans une étude américaine (35/100 000) 21 et au Canada (30/100 000) 11. Parmi les 0-4 ans, la moitié était âgée de 1 an, comme en Australie (46%) 22. La prédominance du sexe masculin (sex-ratio de 1,7) est retrouvée en Australie (1,6) 18, en Norvège (1,8) 14, en Suède (2,2) 12 et à Singapour (2,2) 23.

La létalité intra-hospitalière dans cette étude (2,5%) est similaire à celles de l’Australie (2,3%) et de la Norvège (2,1%), et proche de celle de la Suède (3%). Mais elle est inférieure à d’autres études internationales comme au Portugal (3,7%) et à Singapour (4,6%). La létalité est faible chez les 0-4 ans, en France (3 décès en 2011), comme dans la littérature 22. A contrario, les personnes les plus âgées présentent une surmortalité, liée à la plus grande gravité des brûlures, mais aussi probablement à l’état de santé global dans ces classes d’âges. L’analyse des déterminants associés à la mortalité par brûlures à l’hôpital montre l’augmentation du risque avec l’âge, résultat retrouvé dans d’autres études 13,20, et notamment aux États-Unis où le risque de décéder était respectivement 2,3 et 5,4 fois plus élevé chez les 65 à 74 ans et chez les 75 ans et plus par rapport aux 55 à 64 ans.

La durée moyenne de séjour était semblable dans les différentes études, montrant une augmentation avec l’âge : 5 jours chez les 0-4 ans en France et en Australie, 6 jours chez les 0-19 ans aux États-Unis, pour atteindre 14 jours chez les 60 ans et plus en France et aux États-Unis 20,21,22.

Les hospitalisations étaient plus nombreuses pendant les mois d’été chez les adultes et, à l’inverse, pendant les mois d’hiver chez les enfants en bas âge et les personnes âgées 11. On peut émettre l’hypothèse que la survenue d’accidents domestiques liés aux appareils de chauffage, aux produits chauds de l’alimentation pour les plus âgés et les plus petits, est plus fréquente en hiver, et que les accidents liés aux loisirs (barbecues, surexposition au soleil) sont plus fréquents pendant l’été chez les adultes 24.

Conclusion

Ces résultats, qui contribuent à la surveillance épidémiologique des victimes de brûlures, peuvent apporter une aide à l’organisation hospitalière. Les principaux indicateurs ont été déclinés au niveau régional et interrégional 10, la prise en charge des brûlés s’organisant au niveau interrégional. Le nombre important d’hospitalisations pour brûlures, et la gravité de certaines d’entre elles, confirment l’importance de développer des actions de prévention. Pour les enfants, cette dernière doit s’exercer surtout à partir du moment où ils commencent à marcher. Chez les personnes âgées, les brûlures sont plus graves et mènent plus souvent au décès. La prévention peut notamment passer par l’adoption de mesures réglementaires visant à rendre plus sûr l’environnement domestique. La limitation de la température de l’eau chaude par l’arrêté du 30 novembre 2005 va dans ce sens, comme l’obligation pour l’industrie du tabac de produire des cigarettes à faible propension à l’inflammation en Europe depuis 2011. L’obligation d’installer, depuis le 8 mars 2015, un détecteur avertisseur autonome de fumée dans tous les logements laisse attendre une diminution importante des hospitalisations et des décès par brûlure.

Remerciements

À L. Lasbeur, L-M. Paget et G. Pédrono pour leur relecture, et aux relecteurs anonymes dont les remarques ont contribué à améliorer l’article.

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Citer cet article

Dupont A, Pasquereau A, Rigou A, Thélot B. Les victimes de brûlures : patients hospitalisés en France métropolitaine en 2011 et évolution depuis 2008. Bull Epidémiol Hebd. 2016;(5-6):71-9. http://www.invs.sante.fr/beh/2016/5-6/2016_5-6_2.html