
Vulnérabilité à la chaleur : actualisation des connaissances sur les facteurs de risque
// Vulnerability to heat: update on the knowledge on risk factors
Résumé
Le Plan national canicule s’appuie sur des connaissances épidémiologiques afin d’identifier les populations vulnérables et définir des mesures de prévention adaptées pour réduire l’impact des vagues de chaleur. Cet article présente une revue des facteurs de risque liés à la chaleur afin de déterminer si de nouveaux facteurs ont émergé et si certaines populations devraient être mieux prises en compte.
Cette revue de la littérature s’appuie sur une première synthèse effectuée en 2003 et sur 39 articles d’intérêt identifiés via une recherche sur PubMed. Elle met en évidence des facteurs de risque influençant l’exposition à la chaleur (absence de végétation, îlot de chaleur urbain, pollution, humidité, professions exposées à la chaleur...), la sensibilité individuelle (âge, pathologies préexistantes : cardiaques, neurologiques, respiratoires, endocriniennes, prise de certains médicaments) et la capacité d’adaptation (pauvreté, isolement, comportements à risque). Trois études indiquent des risques liés à la grossesse (malformations congénitales ou prématurité) peu connus auparavant.
La plupart des facteurs de risque identifiés étaient déjà connus et sont pris en compte dans les plans de prévention visant des populations cibles telles que les personnes âgées, les travailleurs, les sportifs, par exemple. Les risques liés à la grossesse mériteraient une prévention adaptée d’autant que certaines mesures simples peuvent être proposées. Par ailleurs, les facteurs urbains (végétation, densité urbaine, qualité des bâtiments) justifient la mise en place de politiques d’adaptation de long terme associées à des mesures ponctuelles (arrosage urbain).
Abstract
The French National Heat Wave Prevention Plan is based on epidemiological knowledge to identify vulnerable populations and define prevention measures to reduce the impact of heat waves. This paper presents a review of heat-related risk factors, in order to determine if new factors have emerged and if specific populations should be better taken into account.
This literature review is based on a first synthesis conducted in 2003 and on 39 scientific papers of interest identified through a PubMed search. It highlights risk factors influencing the exposure to heat (lack of vegetation, urban heat island, pollution, humidity, occupational exposure to heat…), the individual sensitivity (age, pre-existing diseases as cardiac, neurological, endocrine, and drugs intake), and the adaptation capacity (poverty, social isolation, behaviour at risk). Three studies indicated pregnancy-related risks (congenital malformations, premature birth) that were little known until then.
Most of the identified risk factors were already known and taken into account into prevention plans targeting specific populations (elderly, workers, sportsmen, for example). The risks linked to pregnancy would deserve an adapted prevention, especially as some simple measures could be easily proposed. Moreover, urban factors (vegetation, urban density, housing quality) justify the implementation of long term adaptation policies associated to temporary measures (urban dousing).
Introduction
Bien que les risques liés à la chaleur aient été relativement bien documentés, le système de santé français a été pris de court par l’ampleur des conséquences sanitaires de la canicule de 2003 1. Les études épidémiologiques menées par l’Institut de veille sanitaire (InVS) dans ses suites, ainsi qu’une revue de la littérature, ont permis d’identifier des populations vulnérables et ont contribué à la définition des actions de prévention mises en place via le Plan national canicule (PNC) 2.
La population générale est a priori aujourd’hui bien sensibilisée et mieux préparée pour faire face à des vagues de chaleur importantes, comme ont pu le montrer une enquête auprès de la population 3 ou l’expérience de la canicule de juillet 2006, qui s’est traduite par une surmortalité inférieure à ce qui était attendu selon un modèle mortalité-température établi sur les années précédant 2003 4.
Cependant, la prévention peut laisser de côté certaines populations qui pourraient continuer à payer un lourd tribut aux canicules et l’évolution des facteurs de risques climatiques, démographiques et sociaux pourrait aggraver les conséquences sanitaires de la chaleur. Ces éléments conduisent à s’interroger sur les déterminants de la vulnérabilité à la chaleur, leurs évolutions et les opportunités qui pourraient en découler pour la surveillance et la prévention.
En 2013, la Direction générale de la santé (DGS) a saisi le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) afin de mettre à jour les recommandations du PNC pour le grand public et les professionnels de santé. Cet article résume les principaux éléments de la revue de la littérature réalisée à cette occasion.
Méthode
La revue de la littérature s’appuie sur une synthèse réalisée en 2003 1 et sur les articles d’intérêt identifiés depuis et jusqu’en juin 2014 par une recherche sur PubMed à partir des mots-clés suivants, en anglais et en français : canicule, chaleur, vague de chaleur, chaleur extrême, vulnérabilité, vulnérable, facteur(s) de risque(s). Parmi les 182 articles obtenus, 39 revues de la littérature et études épidémiologiques ont été retenues. Les articles rejetés étaient redondants (même étude dans plusieurs revues ou études différentes apportant des résultats similaires) ou peu informatifs sur la chaleur (articles sur le changement climatique) ; d’autres concernaient la mortalité toutes causes sans information sur les facteurs de risque, ou étaient des commentaires d’articles.
Pour chaque article, les facteurs de risque ont été classés selon les trois composantes de la vulnérabilité à la chaleur décrites dans la figure.

Résultats
Parmi les 34 études retenues, 18 concernaient l’Europe, 12 l’Amérique du Nord, 3 l’Australie et 1 l’Asie. Le tableau indique pour chaque facteur de risque, issu de la revue de la littérature, à quelle composante de vulnérabilité il appartient, le(s) type(s) d’études et combien en font mention.
Facteurs liés à la sensibilité individuelle
Jeune âge
Les enfants (moins de 1 an, 5 ou 10 ans selon les études 6,7,8,9) ont une plus grande sensibilité individuelle due à un ratio masse/surface corporelle faible qui les rend plus susceptibles à la déshydratation 6 et, durant les premiers jours de vie, des mécanismes de thermorégulation encore immatures 10. Ces connaissances ont été confortées par une étude 10 qui a montré un effet de la chaleur sur la mortalité périnatale le jour du pic de chaleur, les plus forts effets étant retrouvés pour des pathologies cardiovasculaires, respiratoires, digestives et pour des troubles hémorragiques et hématologiques. Néanmoins, malgré cette sensibilité individuelle, une surmortalité est très rarement observée chez les enfants du fait de la vigilance de l’entourage 1.
Grossesse
Par rapport à la revue de la littérature menée en 2003, des effets de la chaleur sur le développement fœtal ont été identifiés. Une association significative entre une augmentation de la température minimale journalière de 2,8°C, en particulier pendant la période critique de développement (semaines 4 à 7), et la présence de cataracte congénitale (odds ratio, OR=1,51 ; intervalle de confiance à 95%, IC95%: [1,14-1,99]) a été retrouvée dans l’État de New-York 11. Une étude australienne a montré un risque plus élevé de naissances prématurées chez les femmes ayant subi une ou plusieurs périodes caniculaires au cours de leur grossesse. L’étude a contrôlé différents facteurs de confusion et trouvé une relation de type dose-réponse en fonction de l’augmentation des températures, la durée de la canicule n’augmentant le risque que pour les températures les plus élevées 12. De même, à Rome, un effet à court terme d’une augmentation de la température, et plus particulièrement des vagues de chaleur (+19% ; IC95%: [7,91%-31,69%]), a été observé sur les naissances prématurées 13. À Montréal, une étude sur 300 000 naissances de 1981 à 2010 a montré une augmentation non significative des naissances prématurées (avant 37 semaines de grossesse) en cas de fortes chaleurs sur plusieurs jours, ce risque devenant significatif pour les naissances précoces (entre 37 et 38 semaines de grossesse) 14.
Sexe
Le sexe peut être un facteur de risque différent selon l’âge et le lieu. Aux États-Unis, de 2010 à 2013, plus d’hommes que de femmes âgés de 50 à 89 ans sont décédés de la chaleur 8. Les effectifs sont cependant faibles (de 32 à 100 cas annuels chez les hommes pour cette tranche d’âge, entre 12 et 60 chez les femmes). Chez les enfants de moins de 1 an, une surmortalité plus élevée a été observée parmi les filles, avec un risque de décès 2 fois plus élevé que pour les garçons durant les jours très chauds, essentiellement en période périnatale ; les auteurs n’expliquent pas cette différence sur une base physiologique, mais supposent qu’elle pourrait être liée à la taille des effectifs, bien que l’étude ait inclus près de 1 500 décès d’enfants 10. Chez les personnes âgées, où le risque est le plus important, aucune différence de genre n’a été retrouvée après stratification sur l’âge 10.
En Allemagne, une étude sur l’ensemble de la population a montré une augmentation de la mortalité par ischémie myocardique plus élevée chez les femmes (18,4%) que chez les hommes (11,4%). Elle pourrait s’expliquer selon les auteurs par des facteurs populationnels (structure par âge, structures sociales, différences ethniques) ou physiologiques (ménopause, maladies préexistantes telles que le diabète) 15.
Pathologies
Diverses manifestations pathologiques peuvent augmenter en cas de pic de chaleur, les plus fréquemment citées étant les pathologies cardiovasculaires, respiratoires, neurologiques/psychiatriques, rénales/urinaires et le diabète 10,15,16,17,18,19,20,21. En ce qui concerne les maladies psychiatriques, une relation a pu être trouvée entre chaleur et hospitalisations pour troubles bipolaires à Taïwan, surtout chez les femmes adultes 22.
Le décalage entre le pic de chaleur et la survenue des manifestations est le plus souvent de 0 à 2 jours 15, mais il peut aller jusqu’à 6 jours, en particulier pour les pathologies psychiatriques et respiratoires. Un sur-risque de décès de 30% (risque relatif, RR: 1,3 ; IC95%: [1,21-1,40]) à 2 jours et de 40% (RR: 1,4 ; IC95%: [1,30-1,52] à 6 jours pour les maladies psychiatriques a été rapporté en Catalogne 10, tandis qu’aux États-Unis, un effet cumulatif a été montré pour les maladies respiratoires, avec un risque d’hospitalisation accru de 2,2% [IC95%: 1,3%-3,1%], lors d’une augmentation de la température de 5,6°C la semaine précédant l’hospitalisation 20. D’autres pathologies peuvent être aggravées par la chaleur comme les maladies cérébrovasculaires 16, digestives ou infectieuses 10, ou les déséquilibres électrolytiques 21. Une étude suisse a montré une augmentation des gastroentérites infectieuses pendant les vagues de chaleur, surtout après un délai de 7 jours, et une augmentation des maladies inflammatoires intestinales avec un effet immédiat 23. À Toronto (Canada), les passages aux urgences pour troubles mentaux et du comportement augmentent au-dessus de 28°C, en particulier dans un délai de 0 à 4 jours 24.
L’obésité 18 et le diabète 19, surtout chez les personnes âgées 25, constituent des facteurs de risque en période caniculaire. Enfin, une recrudescence des causes externes de mortalité, principalement suicides 10,18, chutes et noyades 10, a été observée.
Médicaments
De nombreux médicaments, par leur mécanisme d’action ou par les effets indésirables qu’ils entraînent, sont susceptibles d’aggraver les symptômes liés aux températures extrêmes. Il s’agit notamment des antiparkinsoniens, des antidépresseurs 26, des neuroleptiques ou des vasodilatateurs 27 ; les diurétiques peuvent entraîner une déshydratation, tandis que les bétabloquants et les anticholinergiques concourent à une réduction de la vasodilatation et de la transpiration, et les inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine font diminuer la sensation de soif 19.
Facteurs liés à l’exposition
Environnement
Les personnes vivant en centre-ville 28, dans des quartiers à forte densité urbaine 19 ou à forte densité de population 7 sont plus vulnérables à la chaleur. L’îlot de chaleur urbain 16,29 constitue un facteur de risque, de même que le manque de végétation, qu’il soit réel 30 ou perçu (RR:1,29 ; IC95%: [1,01-1,65] 9). Les personnes vivant dans des logements anciens 7,9, mal isolés contre la chaleur ou dont la chambre se situe sous les toits 26 sont également plus vulnérables.
Enfin, d’autres facteurs aggravent le risque lié aux fortes températures : la pollution 16,30, l’humidité, un vent faible ou nul et un fort rayonnement thermique 31.
Profession
Dans les quartiers à forte proportion de travailleurs manuels, les risques de décéder de la chaleur peuvent être plus élevés (RR: 1,25 ; IC95%: [0,96-1,64]) 9. Les travailleurs exerçant une activité dans des environnements non protégés de la chaleur, surtout dans des conditions socioéconomiques défavorables, sont plus vulnérables 31. Pour les travailleurs, les risques sont principalement l’épuisement dû à la chaleur et le coup de chaleur et, pour l’entreprise, la baisse de productivité. Une augmentation de l’indice WBGT(1) de 25 à 40°C se traduit par une diminution progressive de la capacité de travail, qui devient presque nulle 31. Ces températures, fréquemment rencontrées pendant la saison chaude des pays tropicaux, peuvent également se rencontrer dans les pays tempérés, mais beaucoup moins fréquemment et sur des périodes moins longues. Bien que les personnes âgées aient payé le plus lourd tribut à l’épisode caniculaire d’août 2003 (91% de la surmortalité), une surmortalité de +9% (soit un peu plus de 1 200 décès en excès entre le 1er et le 20 août) a été enregistrée chez les 35-64 ans, en grande partie chez les hommes 32. Bien qu’aucune précision ne soit donnée dans cette étude sur la profession des personnes décédées, cette tranche d’âge correspond à une population professionnellement active, incluant en particulier des travailleurs exposés à la chaleur (bâtiment, etc.).
Aux États-Unis, en Arizona, une étude a montré que les hommes travaillant dans l’agriculture ou la construction avaient un sur-risque de décès (OR entre 2 et 3,5), tout particulièrement les agriculteurs de plus de 65 ans 33. En Australie, une étude a trouvé une augmentation des déclarations d’accidents de 0,2% pour une augmentation de 1°C de la température maximale, certaines professions et industries étant particulièrement touchées (agriculture, foresterie, pêche, construction, etc.) 34. En Ontario, les pathologies liées à la chaleur parmi les travailleurs se rencontrent plus fréquemment chez les hommes, les travailleurs jeunes, les travailleurs manuels et ceux ayant un contrat de travail court 35.
La pratique d’activités sportives, à titre professionnel ou non, fait partie des expositions à risque. Le coup de chaleur d’exercice (CCE) est susceptible d’entraîner le décès s’il n’est pas pris en charge suffisamment tôt. Son incidence a été estimée à 25/100 000 aux États-Unis en 2011 et à 19,8/100 000 parmi les militaires français en 2010 36. Si la présence de pathologies cardiovasculaires, d’une inflammation chronique ou aigüe, la surcharge pondérale, la privation de sommeil, certains facteurs génétiques et la prise de certains médicaments ou d’alcool constituent des facteurs de risque, une prévention adaptée peut réduire le risque de CCE : éviter toute activité pratiquée au soleil ou aux heures les plus chaudes de la journée, acclimatation au contexte thermique, entraînement physique en endurance et d’intensité suffisante et hydratation en particulier 37.
Facteurs liés à la capacité d’adaptation
Facteurs sociaux
Les personnes considérées comme vulnérables d’un point de vue socioéconomique (indice de Towsend), c’est-à-dire, chômeurs, ménages ne possédant pas de voiture ou n’étant pas propriétaires, habitant des logements surpeuplés 7 ou vivant sous le seuil de pauvreté 29, présentent un risque plus élevé pendant les vagues de chaleur, en particulier parce qu’elles n’ont pas facilement accès aux ressources pour lutter contre la chaleur 26 ou à la climatisation 6,25.
En France, les populations vivant dans les cantons les plus défavorisés ont été plus touchées par la vague de chaleur de 2003 : à Paris, les taux de surmortalité étaient 2 fois plus élevés dans les arrondissements les plus défavorisés (indice de désavantage social >80e percentile de la distribution de l’indice) 38. D’autres études n’ont cependant pas retrouvé de lien entre le niveau socioéconomique et le risque de décès pendant les vagues de chaleur 39,40,41.
Les personnes marginalisées socialement 28, isolées, vivant seules 7,25, appartenant à des minorités ethniques (États-Unis), ayant un faible niveau d’éducation, sont également plus à risque. Un excès de risque de décès à Paris en 2003 chez les personnes non mariées a été retrouvé (OR:1,63 ; IC95%: [1,23-2,15]), essentiellement chez les hommes 42. En France, en 2003, les personnes jeunes décédées étaient souvent sans abri ou socialement et économiquement isolées 43. L’isolement caractérise des personnes âgées qui vivent plus souvent seules et ont moins d’interactions sociales 19,29.
Facteurs comportementaux
Parmi les facteurs comportementaux cités, on trouve l’habillement excessif, surtout chez les personnes âgées, ou une moindre mobilité ne permettant pas de mettre en œuvre aisément des stratégies de lutte contre la chaleur comme se rendre seul dans un endroit frais 26. La prise de boissons alcoolisées ou de caféine 19 sont d’autres facteurs de risques comportementaux.
Facteurs relevant de plusieurs composantes de la vulnérabilité
Âge élevé
L’âge élevé est souvent retrouvé comme un facteur de risque de surmortalité pendant les vagues de chaleur, avec un seuil de définition différent selon les études qui considèrent les 60 ans et plus 8,44, les 65 ans et plus 6,7,9,20,25,28 ou les 70 ans et plus 10.
Durant les vagues de chaleur, les personnes âgées cumulent une sensibilité individuelle (pathologies préexistantes, réduction de la thermorégulation, diminution de la sensation de chaud et de soif, diminution des capacités de l’appareil circulatoire à lutter contre la chaleur) avec une capacité d’adaptation moindre (mobilité réduite, prise de médicaments altérant les fonctions sudoripares ou cognitives, entraînant somnolence et moindre besoin de boire, hypotension ou augmentation de la température corporelle) 6,19.
La littérature offre cependant des exemples récents de communautés de personnes âgées ayant mis en place des mesures de prévention adaptées. Ainsi, à Phoenix (États-Unis) 45, des communautés avec un fort taux de personnes de 65 ans et plus enregistrent moins d’appels de détresse en lien avec la chaleur : il s’agit de communautés aisées, où les habitants sont bien sensibilisés aux comportements à adopter en cas de fortes chaleur et ont un accès facile aux soins médicaux.
Conclusion
Dans un contexte de changement climatique 46, il devient encore plus important de mieux identifier les populations les plus vulnérables aux températures extrêmes et les stratégies d’intervention et d’adaptation les plus appropriées, en particulier d’un point de vue coût-efficacité.
Cette revue de la littérature a confirmé les connaissances sur plusieurs facteurs de risque tels que l’âge, certains médicaments ou pathologies, l’environnement (densité urbaine, îlot de chaleur urbain, pollution), la pauvreté, l’isolement social ou certains comportements. Les résultats selon le sexe diffèrent suivant les études et ne permettent pas de conclure.
Ces risques ont donné lieu à la mise en place de mesures de prévention, au travers du PNC en particulier. Les effets positifs de la prévention confortent la nécessité de la maintenir et, dans certains cas, de la renforcer : ainsi, la prise en charge des jeunes enfants a très certainement contribué à une surmortalité non significative en août 2003 en France 32, alors qu’elle avait été de 29 000 décès lors de la canicule de 1911 47. De même, la prévention collective dans certaines communautés de personnes âgées s’est avérée efficace 45. En France, l’expérience de nouvelles canicules comparables à celle de 2003 manque pour juger pleinement l’efficacité du PNC, même si la surmortalité de la canicule de juillet 2006 a été inférieure à celle attendue 4.
Les personnes âgées restent sans doute la population la plus vulnérable et quantitativement la plus importante. Cela devrait s’accentuer dans les années à venir au vu des projections démographiques. Ainsi, en 2060, les personnes âgées de plus de 75 ans devraient être 11,9 millions versus 5,2 millions en 2007 48. La prévention auprès de cette population doit être maintenue et améliorée, par exemple en confortant le rôle du médecin généraliste, souvent le mieux à même d’identifier les facteurs de risque personnels de leur patient et de l’aider à mettre en place des stratégies de lutte contre la chaleur 19. La solidarité, mise en avant dans le PNC, et les messages de prévention diffusés par l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes) permettent également d’aider les personnes âgées à se protéger des effets de la chaleur. La solidarité peut être individuelle envers les personnes de l’entourage, ou collective via les centres communaux d’action sociale, les listes municipales de personnes vulnérables, etc.
Cependant, certaines populations ne sont actuellement pas ou peu prises en compte dans le PNC. Il s’agit en particulier des femmes enceintes, pour lesquelles des mesures simples peuvent être mises en place même si peu d’études sont actuellement disponibles, des travailleurs exposés à la chaleur, pour lesquels les risques sont encore peu étudiés dans les pays tempérés et devraient être confirmés par des études épidémiologiques, des sportifs chez qui le coup de chaleur d’exercice peut être évité par des mesures appropriées.
Si cette revue de la littérature confirme les orientations prises dans le PNC, et sur certains aspects, encourage à les compléter, elle met aussi en exergue l’influence du contexte culturel sur les facteurs de risque. Aussi, une étude sur la perception du risque et sa gestion auprès de la population et des acteurs pourrait apporter des éléments utiles, notamment pour adapter les conclusions des travaux étrangers au contexte français.
S’agissant des aspects environnementaux, la prévention et l’adaptation des villes concernant la pollution et les îlots de chaleur urbains doivent être poursuivies et améliorées. Concernant la pollution de l’air extérieur, les mesures recommandées sont parfois contradictoires avec celles destinées à lutter contre la chaleur (aérer contre fermer les fenêtres par exemple) et les messages doivent être plus clairs sur les mesures prioritaires en cas de pic de chaleur et de pollution concomitants. Pour les îlots de chaleur urbains, les essais de prévention ponctuelle, tel l’arrosage urbain testé à Paris depuis l’été 2012, doivent se poursuivre afin de déterminer les mesures les plus appropriées. Elles doivent être complétées par des mesures de long terme concernant l’isolation des bâtiments et les stratégies urbaines pour réduire les températures, surtout dans les quartiers les plus chauds.
Références
n° DGS/DUS/DGOS/DGCS/DGSCGC/DGT n° 2013-152 du 10 avril 2013 relative au Plan National Canicule 2013. http://www.sante.gouv.fr/fichiers/bo/2013/13-05/ste_20130005_0000_0069.pdf