Étude épidémiologique sur l’état de santé, le recours aux soins et à la prévention des Gens du voyage
en Nouvelle-Aquitaine, 2019-2022

// Epidemiological study on health status, use of health care and prevention in Gypsies and Travellers in Nouvelle-Aquitaine, 2019–2022

Aude Mondeilh1,2, Gilles Brabant1, Sahar Haidar3, Leïla Saboni3, Marc Ruello3, Sophie Lesieur4, Christine Castor5, Erwan Autes-Treand6, Yann Le Strat3, Stéphanie Vandentorren2,3 (stephanie.vandentorren@santepubliquefrance.fr)
1 Fédération nationale des associations solidaires d’action avec les Tsiganes et les Gens du voyage (Fnasat – Gens du voyage), Paris
2 Bordeaux Population Health, Université de Bordeaux, Centre Inserm U1219, Bordeaux
3 Santé publique France, Saint-Maurice
4 Institut Pierre-Louis d’épidémiologie et de santé publique, Paris
5 Santé publique France – Nouvelle-Aquitaine, Bordeaux
6 Agence régionale de santé Nouvelle-Aquitaine, Bordeaux
Soumis le 21.07.2023 // Date of submission: 07.21.2023
Mots-clés : Populations vulnérables | État de santé | Inégalités sociales de santé | Conditions de vie | Couverture vaccinale | Gens du voyage
Keywords: Underserved population | Health status | Social inequalities in health | Living conditions | Vaccination coverage | Gypsies and Travellers

Résumé

Introduction –

En 2017, une épidémie de rougeole a sévi en France ; plusieurs cas ont été décrits au sein de populations éloignées du système de santé, dont des familles de Gens du voyage. Santé publique France a mené une étude avec des associations et l’Agence régionale de santé Nouvelle-Aquitaine pour décrire l’état de santé, le recours aux soins et à la prévention de ces familles.

Méthode –

Une étude participative transversale, avec plan d’échantillonnage, a été menée entre novembre 2019 et mars 2022 en Nouvelle-Aquitaine. Trois questionnaires (lieu de vie, adulte, enfant) ont été co-construits et administrés en face à face par des acteurs associatifs formés. Des mesures anthropométriques et des photographies des carnets de santé des enfants ont été recueillis.

Résultats –

Le taux de participation était de 73,6%, incluant 1 030 adultes et 337 enfants. Parmi les adultes, 36,6% souffraient d’obésité, 14,4% de diabète, 24,7% d’hypertension et 14,4% d’épisode dépressif majeur. Le renoncement aux soins au cours des 12 derniers mois s’élevait à 48,4%. Parmi les enfants, 45,3% avaient une couverture vaccinale rougeole-oreillon-rubéole complète à 24 mois et 17,9% souffraient d’obésité. L’insécurité du logement concernait 74,5% des ménages et 22,2% n’avaient pas accès à l’eau courante.

Conclusion –

Les Gens du voyage de cette étude font face à des conditions de vie et des expositions environnementales pouvant affecter leur santé et leur recours aux soins. Ces résultats plaident pour des actions ciblées « d’aller vers » comme la médiation en santé, tenant compte de leurs conditions de vie difficiles.

Abstract

Background –

In 2017, a measles outbreak occurred in France with several cases identified among underserved populations, including Gypsies and Travellers. Santé publique France, the French national public health agency, conducted a study with associations and the Nouvelle-Aquitaine regional health agency to describe the health status and the use of health care and prevention for Gypsies and Travellers.

Method –

A participatory and cross-sectional study with a random sample design was conducted between November 2019 and March 2022 in France’s Nouvelle-Aquitaine region. Three questionnaires (living environment, adult, child) were co-constructed and administered face-to-face by trained staff from the community-based associations. Anthropometric measurements and health records were also collected.

Results –

The participation rate was 73.6%, with 1,030 adults and 337 children included. Concerning the adults, 36.6% had obesity, 14.4% reported diabetes, 24.7% hypertension, and 14.4% major depression. The level of unmet health care needs in the preceeding 12 months was 48.4%. With regard to children, 45.3% had received full (i.e., two-dose) measles-mumps-rubella vaccination at 24 months and 17.9% had obesity. Finally, 74.5% of the households experienced housing insecurity, and 22.2% did not have access to running water.

Conclusion –

The children and adults of Gypsy and Traveller populations included in this study faced deleterious environmental and living conditions potentially affecting their health and their use of health care, including vaccination. These results argue in favour of targeted outreach interventions such as health mediation for underserved populations that take into account their difficult living conditions.

Introduction

En France, le terme « Gens du voyage » (GDV) est une appellation administrative désignant les personnes vivant traditionnellement en habitat mobile terrestre. Sous cette appellation sont regroupées des familles quasi-exclusivement de nationalité française, historiquement rattachées à la culture tsigane, et dont les profils socio-économiques et culturels sont très divers 1. Cette appellation est distincte du terme « Roms », qui désigne dans le contexte français des personnes issues d’une immigration récente de l’Est de l’Europe. On estime entre 250 000 et 350 000 le nombre de personnes GDV en France en 2012 2, vivant habituellement en caravane sur le territoire français depuis plusieurs générations. Leur mobilité peut être régulière ou ponctuelle, volontaire ou subie 1.

Certains GDV subissent un cumul et une combinaison de déterminants socio-économiques et environnementaux défavorables qui accroîssent leur vulnérabilité face aux problèmes de santé et/ou d’accès au système de santé 3. Ces déterminants sont intriqués entre eux : mal logement, lieux de vie isolés et proches de sites pollués, difficultés d’accès et de maintien dans l’emploi ou dans le parcours scolaire. Ceux-ci influent sur des comportements ou des activités à risque pour la santé (ex : intoxications aux métaux lourds) 3,4,5. Pourtant, les données épidémiologiques concernant les GDV en France restent parcellaires. Globalement, l’état de santé des GDV est moins bon que celui de la population générale du fait de conditions de vie plus précaires, avec une espérance de vie de 10 ans moindre qu’en population générale 6. En Europe, quelques études ont montré des prévalences plus élevées chez les GDV qu’en population générale de maladies cardiovasculaires (comme l’hypertension artérielle ou l’infarctus du myocarde), de troubles respiratoires (comme l’asthme), de pathologies métaboliques (comme le diabète), de niveaux d’anxiété et de dépression et de morbidité infantile (comme le faible poids de naissance), notamment parmi les familles les plus défavorisées 7,8,9,10. À cela, peuvent s’ajouter un faible niveau de littératie en santé, des modalités d’accès difficiles au système de santé du fait de l’éloignement géographique des services de santé, ou des complexités administratives liées en partie à la dématérialisation des démarches de santé, et des comportements de prévention suboptimaux (dont une couverture vaccinale insuffisante), menant à un risque plus élevé d’infection lors d’épidémies 11,12.

En octobre 2017, une épidémie de rougeole en Nouvelle-Aquitaine, s’est propagée pour atteindre un total de 2 663 cas en France au 1er juillet 2018. Parmi ces cas, 1 101 (41%) se situaient en Nouvelle-Aquitaine, avec des cas groupés incluant des GDV (10 cas groupés et 57 cas au total) 13.

Le manque de données concernant les GDV en France reste un enjeu majeur et contribue à l’invisibilisation de ces populations dans les politiques de santé publique. L’objectif de cette étude est de décrire l’état de santé, le recours aux soins et à la prévention (dont la couverture vaccinale des enfants contre la rougeole, les oreillons et la rubéole (ROR)) de familles GDV en Nouvelle-Aquitaine, en lien avec leurs conditions de vie.

Méthode

Schéma et population d’étude

Cette étude participative transversale a été conduite dans quatre départements de Nouvelle-Aquitaine (Gironde, Charente-Maritime, Charente et Creuse) du 29 novembre 2019 au 16 mars 2020, puis du 18 octobre 2021 au 31 mars 2022 (interruption due à la crise sanitaire de la Covid-19) auprès d’adultes (18 ans et plus), habitant ou ayant habité en résidences mobiles terrestres, et de leurs enfants âgés de 7 à 13 ans. Les critères d’inclusion étaient : parler français, pouvoir donner un consentement éclairé et vivre sur un lieu de vie connu des associations locales membres du réseau de la Fédération nationale des associations solidaires d’action avec les Tsiganes et les GDV (Fnasat). Le lieu de vie pouvait être temporaire ou permanent : aire d’accueil ou de grand passage, stationnement sans titre, terrain familial, habitat social adapté ou encore habitat qualifié d’ordinaire.

Échantillonnage

Un plan de sondage à trois degrés a permis le tirage au sort des lieux de vie, puis des ménages (quand il y en avait plusieurs) au sein des lieux de vie, et enfin des personnes (un adulte et un enfant entre 7 et 13 ans) au sein des ménages. La base de sondage des lieux de vie, constituée par les associations, était stratifiée sur le secteur géographique (17 sur les 4 départements) et le type d’habitat, classé en quatre catégories selon la typologie européenne de l’exclusion liée au logement (Ethos) adaptée par les associations : adéquat (occupation légale, sécurisée, sans sur-occupation avec normes de logement respectées, qu’il s’agisse d’habitat en résidence mobile ou en dur), inadéquat (idem adéquat mais avec des normes de logement non respectées ou une sur-occupation), précaire (résidence mobile sur un terrain appartenant à une personne publique ou privée avec convention d’occupation temporaire ou sur un espace d’accueil sous-équipé), et enfin précaire et illégal (résidence mobile sur un terrain sans convention d’occupation temporaire ou soumis à une demande d’expulsion).

Collecte des données

Une pré-visite des acteurs associatifs sur les lieux de vie a permis de présenter l’étude et de sensibiliser sur l’importance de la participation, avec des dépliants imagés et des posters co-construits avec les associations, afin de pallier les éventuelles difficultés de lecture. Après obtention du consentement éclairé, les données étaient recueillies par trois questionnaires co-construits avec les associations, testés et validés par des GDV volontaires puis administrés en face à face par les acteurs associatifs (profil d’accompagnateur social) préalablement formés. Durant la formation, il leur était recommandé de distinguer leur rôle d’enquêteur et leur rôle d’accompagnateur social, pendant le temps consacré au questionnaire et à l’étude. Si une situation difficile était repérée chez une personne enquêtée ou si un besoin était exprimé, les enquêteurs pouvaient proposer une aide ou orienter cette personne vers une prise en charge adaptée dans un second temps dédié au travail social, en dehors de l’étude. Le premier questionnaire était centré sur les nuisances environnementales et le lieu de vie ; le deuxième concernait les caractéristiques démographiques et socio-économiques, l’état de santé perçu, la santé mentale, et le recours aux soins des adultes. Les prévalences des pathologies chroniques ont été évaluées de manière déclarative, selon la confirmation d’un diagnostic médical et la prise d’un traitement actuel ou passé. Enfin, le troisième questionnaire (administré au parent), portait sur l’état de santé physique et mentale des enfants.

Ces questionnaires ont été construits à partir d’outils validés pour comparaison avec la population générale : Baromètre santé de Santé publique France, Enquête santé et protection sociale de l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé (Irdes), Minimum European Health Module (MEHM), Mini-International Neuropsychiatric Interview (MINI) pour les épisodes dépressifs majeurs, Strengths and Difficulties Questionnaire (SDQ) et Enquête trajectoires et origines de l’Institut national d’études démographiques (Ined).

Concernant la collecte des données cliniques, les mesures anthropométriques des adultes et des enfants étaient mesurées à l’aide d’une balance (Seca® Robusta 813) et d’une toise électronique (Soehnle® 503). Le surpoids et l’obésité des enfants étaient estimés selon les standards de l’International Obesity Task Force, en calculant l’indice de masse corporelle 14. La couverture vaccinale ROR était estimée à partir des photographies des carnets de santé anonymisés des enfants âgés de 2 à 17 ans (pas de sélection aléatoire parmi ces enfants).

Analyses statistiques

Les estimations des prévalences ont été pondérées, afin de tenir compte de la probabilité d’inclusion des individus au sein des ménages et des lieux de vie, et post-stratifiées sur le sexe, afin de corriger un déséquilibre entre les hommes et les femmes (population de référence : Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) 2021). Les différences de prévalences des indicateurs de santé selon le type d’habitat ont été testées à l’aide du Chi2 d’indépendance de Pearson, avec correction du second ordre de Rao-Scott. Une p-valeur inférieure à 0,05 a été considérée comme statistiquement significative. Compte tenu des effectifs faibles pour le type d’habitat « inadéquat », nous avons rassemblé cette modalité avec le type d’habitat « précaire ». L’estimateur de Kaplan-Meier a été utilisé pour obtenir une estimation de la couverture vaccinale ROR complète (2 doses) des enfants en fonction de l’âge (en années). Les données ont été censurées à droite si l’enfant n’avait pas reçu les 2 doses de vaccin au moment de l’enquête. Les analyses statistiques ont été réalisées avec le logiciel R (R Core Team®, 2022, version 4.1.2).

Éthique et réglementation

Le traitement des données suit la méthodologie de référence MR-004, l’enquête a ainsi été inscrite dans le registre de Santé publique France qui dispose d’une déclaration de conformité à cette MR (déclaration n°2204676). Les données ont été collectées de manière strictement anonyme. Les participants ont été informés de manière orale et écrite sur les finalités de l’étude et les modalités d’exercice de leur droit d’opposition et de rectification.

Résultats

Taux de participation

Au total, 1 030 adultes et 337 enfants âgés de 7 à 13 ans ont été inclus sur 475 lieux de vie (figure 1). Le taux de participation s’élevait à 73,6%. Les raisons de refus les plus citées étaient le manque d’intérêt (35%) et le manque de temps (18,5%).

Figure 1 : Diagramme de flux de sélection des participants. Étude sur la santé des Gens du voyage,
Nouvelle-Aquitaine, 2019-2022
Agrandir l'image

Caractéristiques sociodémographiques et économiques des adultes et des enfants

La part des femmes était de 51,7% dans notre échantillon. L’âge moyen des participants était de 42,3 ans (écart type : 14,4) et l’âge médian de 42 ans (étendue : 18-92) (tableau 1). Concernant leur situation familiale, 72,1% des adultes déclaraient vivre en couple, 6,6% avaient au moins 4 enfants (en moyenne 1,3 enfants par ménage) et 7,5% avaient poursuivi leur scolarité jusqu’au lycée. Au moment de l’enquête, environ un tiers (28,7%) des participants déclaraient travailler. Les femmes, par rapport aux hommes, étaient plus souvent sans emploi (82,1% vs 34,9%) et leur activité professionnelle était plus fréquemment de type occasionnelle (75,6% vs 55,6%). Chez les enfants, l’âge moyen était de 10,4 ans (écart type : 0,1) et l’âge médian de 11 ans (étendue : 7 à 13 ans), la part des filles était de 48,9% et la proportion d’enfants scolarisés de 76,2% (73,6% pour les filles et 84,4% pour les garçons, p=0,038).

Tableau 1 : Caractéristiques démographiques et socio-économiques des adultes selon le sexe (N=1 030). Étude sur la santé des Gens du voyage, Nouvelle-Aquitaine, 2019-2022
Agrandir l'image

État de santé des adultes et des enfants (7 à 13 ans)

La moitié des adultes (50,0%) déclaraient un état de santé moyen, mauvais ou très mauvais (tableau 2). Presque trois quarts (72,8%) étaient en situation de surpoids ou d’obésité. Au cours des 12 derniers mois, 14,4% déclaraient être atteints de diabète, 24,7% d’hypertension artérielle, 17,3% d’asthme et 41,9% de douleurs chroniques du dos. Un peu moins de la moitié (46,3%) déclaraient une pathologie buccodentaire au moment de l’enquête. Évaluée à l’aide du MINI, la prévalence d’épisode dépressif majeur était de 14,4%. Plus précisément, les hommes étaient plus touchés par les pathologies chroniques telles que l’hypertension artérielle (27,0% vs 22,5% chez les femmes) et le diabète (19,1% vs 10,1% chez les femmes), mais aussi par l’obésité (41,1% vs 31,7%). Parmi les enfants, la prévalence du surpoids était de 17,8% et celle de l’obésité de 17,9%. Au cours de l’année précédente, 10,2% des enfants avaient eu des symptômes évocateurs d’asthme (sifflements et toux sèche nocturne). Enfin, en termes de santé mentale, 7,6% présentaient des troubles comportementaux et émotionnels (tableau 2).

Tableau 2 : État de santé perçu des adultes (N= 1 030) et des enfants (N=337). Étude sur la santé des Gens du voyage, Nouvelle-Aquitaine, 2019-2022
Agrandir l'image

Recours, renoncement aux soins et couverture maladie

La plupart des adultes (92,3%) déclaraient avoir une assurance complémentaire santé et 6,3% ne pas en posséder ; 83,6% bénéficiaient d’une complémentaire santé solidaire (CSS) et 8,7% d’une mutuelle privée. Au cours de l’année précédente, 82,6% des adultes déclaraient avoir consulté au moins une fois un médecin généraliste, 52,2% un dentiste et 31,4 % s’être rendus aux urgences. Presque la moitié (48,4%) rapportaient avoir renoncé au moins une fois à se faire soigner au cours de l’année écoulée ; les raisons les plus citées étaient : un manque de temps ou d’autres préoccupations (40%), un délai d’attente trop long pour un rendez-vous (12,3%), un manque de connaissance du système de soins (11,3%), des raisons financières (8,2%) ou l’absence de moyens de transport (7,1%). Enfin, 20 % des adultes déclaraient avoir été confrontés à un refus de soin de la part d’un professionnel de santé ; les raisons les plus citées étaient l’absence de rendez-vous pris (26,6%), la non-prise en charge de nouveaux patients (25,1%), un ressenti de discrimination en lien avec les origines supposées (22,3%) ou bien être couvert par la CSS (7,7%).

Couverture vaccinale rougeole-oreillons-rubéole des enfants (2 à 17 ans)

La couverture vaccinale du ROR a été estimée à partir des photographies des 460 carnets de santé des enfants de 2 à 17 ans (N=1 242). Les raisons

les plus fréquemment évoquées par les enquêteurs pour l’absence de photos du carnet étaient une perte ou une indisponibilité du carnet le jour même de l’interview. La couverture vaccinale ROR complète (2 doses) à 2 ans était estimée à 45,3%, tandis que celle pour une dose de vaccin à 75,6%. Un rattrapage progressif de la couverture vaccinale ROR complète jusqu’à l’âge de 12 ans était observé (figure 2).

Figure 2 : Estimation de la couverture vaccinale complète (2 doses) contre la rougeole, les oreillons
et la rubéole (ROR) chez les enfants de 2 à 17 ans (N=460). Étude sur la santé des Gens du voyage,
Nouvelle-Aquitaine, 2019-2022
Agrandir l'image

Conditions de vie et habitat

Concernant l’habitat, 19,3% des ménages enquêtés avaient un habitat adéquat, 52,1% un habitat inadéquat ou précaire, et 28,6% un habitat précaire et illégal (tableau 3). Plus de la moitié des ménages (62,3%) habitaient exclusivement en caravane. Près d’un quart (22,2%) n’avaient pas d’accès à l’eau courante, 23,6% n’étaient pas raccordés à un compteur électrique et 41,0% n’étaient pas équipés de blocs sanitaires avec douche et WC. Moins de la moitié des ménages (44,5%) avaient au moins une activité de ferraillage ou de récupération sur son lieu de vie dont : le démontage de voitures (30,1%), le stockage de métaux (26,9%), le découpage et la manipulation de métal (26,0%), la récupération de batteries (25,2%), et la récupération de câbles électriques (24,6%). Sur le plan environnemental, 43,0% des ménages vivaient à moins de 200 mètres d’un axe routier majeur (nationale ou autoroute) ou ferroviaire, et près d’un cinquième vivaient à proximité d’une zone commerciale (22,9%) ou de cultures agricoles (20,8%). Enfin, 8,8% des ménages interrogés étaient situés à moins de 500 mètres d’une déchetterie, et 19,7% à moins de 200 mètres d’un site industriel.

Tableau 3 : Conditions de vie et expositions environnementales des ménages (N= 1 030). Étude sur la santé des Gens du voyage, Nouvelle-Aquitaine, 2019-2022
Agrandir l'image

Une association entre le type d’habitat et certains indicateurs de santé était observé : la prévalence d’épisode dépressif majeur et la prescription de médicaments au-delà de 6 mois étaient significativement plus élevées parmi les personnes vivant en habitat précaire et illégal par rapport à celles en habitat adéquat (respectivement 19,8% vs 14,7%, p=0,025 et 57,1% vs 43,4%, p=0,040) (tableau 4). Enfin, la couverture vaccinale ROR complète était significativement plus élevée chez les enfants vivant en habitat adéquat, par rapport aux enfants vivant en habitat précaire et illégal (85,1% vs 79,3%, p=0,02).

Tableau 4 : Indicateurs de santé des adultes selon le type d’habitat (N= 1 030). Étude sur la santé des Gens du voyage, Nouvelle-Aquitaine, 2019-2022
Agrandir l'image

Discussion

Les adultes de notre étude étaient globalement en moins bon état de santé que la population générale : la moitié (50,0%) déclaraient que leur état de santé était moyen, mauvais ou très mauvais (vs 31,9%) 15. Ce résultat est similaire à celui des familles sans domicile fixe en France (46,4%) – une autre population en situation d’exclusion sociale par le logement – interpellant sur le rôle clé du logement comme déterminant structurel de santé 16. La prévalence de l’obésité était plus importante dans notre étude qu’en population générale (36,6% vs 17%) 17. Les prévalences du diabète (14,4%), de l’hypertension artérielle (24,7%), d’un antécédent d’infarctus du myocarde (3,9%), de l’asthme (17,3%), et des douleurs chroniques du dos (41,9%), étaient plus importantes dans notre échantillon qu’en population générale (4,4%, 14,6%, 1,0%, 3,3% et 13,0%, respectivement) 18. En termes de santé mentale, 14,4% des adultes présentaient un épisode dépressif majeur, comparé à moins de 10% en population générale 19. Concernant les enfants, 7,6% présentaient des difficultés émotionnelles et comportementales, ce qui est similaire à la population générale (8,0%) 20. La prévalence du surpoids et de l’obésité était en revanche beaucoup plus élevée qu’en population générale (respectivement 17,8% vs 13,1%, et 17,9% vs 3,9%) 17. Ces prévalences étaient similaires, quel que soit le type d’habitat (résultats non montrés). L’obésité résultant de l’intrication de plusieurs facteurs, il aurait été intéressant de disposer de meilleurs indicateurs caractérisant – entre autres – l’accessibilité à une source d’alimentation saine, afin d’en explorer le lien.

Quant au recours aux soins et à la prévention des adultes, les fréquences de consultation d’un dentiste ou d’un médecin généraliste dans l’année passée, étaient globalement similaires à la population générale (respectivement 52,2 vs 54,9% et 82,6 vs 87,6%), malgré un état de santé globalement moins favorable 21. En revanche, 31,4% (vs 18% en population générale) s’étaient rendus aux services des urgences l’année précédente et 20,9% avaient été hospitalisés au moins une nuit (vs 12,1%) 21. Le renoncement aux soins était deux fois plus élevé que dans la population générale (48,4% vs 25%) 21. La principale raison citée était un manque de temps ou l’existence d’autres sujets de préoccupation (40%), suggérant une moindre perception et/ou une compétitivité des besoins (au détriment de ceux de santé). Les raisons financières étaient moins citées qu’en population générale (8,2% vs 25%) 21. En revanche, une part plus importante mentionnait des problèmes de transports (7,1% vs 3%) 21. Enfin, une faible proportion (6,3%) des adultes n’avaient pas de couverture complémentaire (vs 4,6% en population générale) 21 et la plupart (83,6%) bénéficiaient de la CSS (vs 8,2%) 22.

Concernant le recours à la prévention, la couverture vaccinale ROR complète à 24 mois était de 45,3%, ce qui est plus faible que la prévalence estimée en population générale à partir des certificats de santé au même âge (89,6%) 23. Seuls 37% (460/1 242) des carnets de santé des enfants ont pu être consultés. La principale raison évoquée par les enquêteurs était l’absence du carnet (perte ou indisponibilité). Dans l’hypothèse d’un éventuel biais de désirabilité sociale (qui aurait pu conduire à une surestimation de la couverture vaccinale par disponibilité plus importante des carnets des enfants les mieux vaccinés), la couverture vaccinale n’en demeure pas moins bien inférieure à l’objectif national de vaccination de 95% nécessaire à l’éradication de la maladie 24.

Cependant, un rattrapage vaccinal progressif était observé jusqu’à l’âge de 12 ans. La différence entre la couverture vaccinale ROR pour une dose à 24 mois estimée dans notre étude et celle estimée en population générale était moins marquée (75,6% vs 92%) que pour la couverture vaccinale ROR 2 doses, soulignant le retard de l’administration de la seconde dose de ROR.

Concernant les conditions de vie, une large proportion des ménages avait des conditions d’habitat précaires (habitat légal ou non) (74,5%), sans accès à l’eau courante (22,2%), et vivait proche de sites industriels (19,7%) ou d’un axe routier majeur (43,0%), les exposant à différentes sources de pollution. Ces résultats sont concordants avec l’étude de 2022 sur la localisation de l’offre publique d’accueil des GDV menée par la Fnasat, qui souligne la relégation géographique, sociale et symbolique des lieux de vie 25. En outre, nos résultats montrent que les personnes qui vivaient dans les conditions d’habitat les plus défavorables étaient celles qui présentaient les prévalences les plus élevées d’épisodes dépressifs majeurs, de prescription de médicaments au long cours, et les couvertures vaccinales les plus basses chez les enfants, en comparaison avec les personnes qui vivaient en habitat adéquat. Ces éléments soulignent que l’habitat, comme cadre de vie d’une personne, reste un déterminant important des inégalités sociales de santé, particulièrement prégnantes chez les GDV.

Forces et limites

Trois principales limites peuvent être évoquées. Premièrement, les enquêteurs étaient déjà connus des personnes interrogées en tant qu’intervenants associatifs, ce qui a pu induire un biais de désirabilité sociale pour certaines réponses. Deuxièmement, les prévalences des pathologies ont été évaluées de manière déclarative et non clinique. Cependant, la demande d’une confirmation d’un diagnostic médical et de la prise d’un traitement actuel ou passé au cours des 12 derniers mois devrait avoir limité un éventuel biais d’information. De plus, les prévalences citées en population générale étaient évaluées également de manière déclarative, ce qui permet la comparaison. Devant l’absence d’études comparables menées en France chez les GDV, cette étude offre alors un ordre de grandeur de l’importance des maladies chroniques au sein de cette population. Enfin, l’étude a été interrompue en raison du premier confinement en mars 2020. La crise sanitaire de la Covid-19 a impacté considérablement la durée de l’enquête, mais a donné l'opportunité d'analyser le vécu de la pandémie. Toutefois, les comparaisons des prévalences déclarées entre les deux phases de l’étude étaient globalement similaires (résultats non montrés).

Malgré ces limites, cette étude épidémiologique multidimensionnelle est la première en France consacrée à des familles GDV à cette échelle. Elle repose sur une méthodologie de sondage permettant de disposer d’indicateurs fiables et tend à représenter la diversité de l’ensemble des familles GDV connues des associations. Un aspect original de ce travail est la co-construction du questionnaire et des outils de communication (dépliants, posters) avec les associations et des GDV volontaires. Cette approche participative a permis d’éviter certains obstacles lors des entretiens (adaptation éventuellement nécessaire d’éléments de langage, reformulation de questions pouvant être considérées comme délicates, etc.) et in fine une meilleure appropriation de l’étude par tous. Nous pensons que cette démarche, ainsi que le lien de confiance établi depuis de nombreuses années entre les associations et les GDV contactés, explique en partie le taux de participation élevé de l’étude (73,6%).

Conclusion

Cette étude démontre la nécessité d’actions ciblées et concertées, tenant compte des conditions de vie difficiles des GDV. Il est indispensable d’agir sur les déterminants structurels de leur santé, lutter contre la discrimination et les refus de soins, agir sur la localisation de leurs lieux de vie en incitant à des évaluations d’impact en santé préalables à toute nouvelle implantation d’offre publique liée à l’accueil et à l’habitat et d’interroger la reconnaissance de l’habitat caravane comme tout ou partie du logement.

Enfin, la démarche participative de cette étude a été d’autant plus cruciale qu’elle a concerné des personnes peu représentées et trop souvent confrontées à l’exclusion sociale et aux discriminations. En ce sens, la médiation en santé est une intervention intéressante à développer car elle repose sur un lien de confiance permettant de mieux conscientiser la santé et promouvoir la prévention et l’accès aux services de santé de cette population qui en est structurellement éloignée.

Remerciements

Cette étude a reçu le soutien financier de l’Agence régionale de santé Nouvelle-Aquitaine et de Santé publique France. Les auteurs remercient particulièrement les acteurs associatifs partenaires : l’AAISC (Barbezieux), l’ALQR (Cognac), le Centre social Les Alliers (Angoulême), Le Chemin du Hérisson (Roumazières), l’AAPIQ (Rochefort), le Centre socio-culturel de Royan, le Centre d’Animation et de Citoyenneté de Surgères, la Mission Fraternité (La Rochelle), le Centre social tsigane – UDAF (Guéret), l’ADAV-33 (Talence), ainsi que Laurent El Ghozi, Stéphane Lévêque, Frédérique Quirino-Chaves, Camille Septe de la Fnasat – Gens du voyage. Les auteurs remercient également Élodie Richard de l’équipe projet de recherche ; Anne Gosselin, Ana Rivadeneyra et Laurence Kotobi du comité d’appui thématique ; Cécile Allaire et Olivier Mayer pour la co-conception des outils de communication de l’étude, ainsi que Anne Laporte, Grégoire Deleforterie, Christel Guillaume, Jean-Claude Desenclos et Anne-Catherine Viso de Santé publique France pour leur soutien.

Liens d’intérêt

Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêt au regard du contenu de l’article.

Références

1 Reyniers A. Tsiganes, Roms, Gens du voyage ? Quelques données pour y voir plus clair. Études Tsiganes. 2014;4(52-53):6-13.
2 Cour des comptes. L’accueil et l’accompagnement des Gens du voyage. Paris: Cour des comptes; 2012. 341 p. https://www.ccomptes.fr/fr/publications/laccueil-et-laccompagnement-des-gens-du-voyage
3 Vandentorren S, Roingeard C. Effets de santé des déterminants environnementaux chez les Gens du voyage. Études Tsiganes. 2019;3(67):16-23.
4 Acker W. Où sont les « gens du voyage » ? Inventaire critique des aires d’accueil. Rennes: éditions du Commun; 2021. 448 p.
5 Vandentorren S, Brabant G, Spanjers L, Coudret S, Haidar S, Mondeilh A, et al. Activities at risk of lead exposure and lead poisoning in children of travellers’ families in Charente, France. Heliyon. 2023;9(1):e13056.
6 Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA). Roms et Gens du voyage dans six pays – Enquête sur la situation des Roms et des Gens du voyage. Luxembourg: Office des publications de l’Union européenne; 2021. https://fra.europa.eu/sites/default/files/fra_uploads/fra-2020-roma-travellers-six-countries_fr.pdf
7 Parry G, Van Cleemput P, Peters J, Walters S, Thomas K, Cooper C. Health status of Gypsies and Travellers in England. J Epidemiol Community Health. 2007;61(3):198-204.
8 Abdalla S, Cronin F, Daly L, Drummond A, Fitzpatrick P, Frazier K, et al. All Ireland Traveller Health Study. Dublin: University College Dublin; 2010. https://www.ucd.ie/t4cms/AITHS_SUMMARY.pdf
9 Ministerio de Sanidad. Segunda encuesta nacional de salud a población gitana 2014. Madrid: Ministerio de Sanidad; 2014. 258 p. https://www.sanidad.gob.es/areas/promocionPrevencion/promoSaludEquidad/equidadY
Desigualdad/comunidadGitana/encuestasNacionales/encuesta2014.htm
10 Goward P, Repper J, Appleton L, Hagan T. Crossing boundaries. Identifying and meeting the mental health needs of Gypsies and Travellers. J Ment Health. 2006;15(3):315-27.
11 Cook B, Wayne GF, Valentine A, Lessios A, Yeh E. Revisiting the evidence on health and health care disparities among the Roma: A systematic review 2003-2012. Int J Public Health. 2013;58(6):885-911.
12 Fournet N, Mollema L, Ruijs WL, Harmsen IA, Keck F, Durand JY, et al. Under-vaccinated groups in Europe and their beliefs, attitudes and reasons for non-vaccination; two systematic reviews. BMC Public Health. 2018;18(1):196.
13 Bernadou A, Astrugue C, Méchain M, Le Galliard V, Verdun-Esquer C, Dupuy F, et al. Measles outbreak linked to insufficient vaccination coverage in Nouvelle-Aquitaine Region, France, October 2017 to July 2018. Euro Surveill. 2018;23(30):1800373.
14 Cole TJ, Bellizzi MC, Flegal KM, Dietz WH. Establishing a standard definition for child overweight and obesity worldwide: International survey. BMJ. 2000;320(7244):1240-3.
15 Fourcade N, von Lennep F, Grémy I, Bourdillon F (dir.). L’état de santé de la population en France – Rapport 2017. Paris: Drees; 2017. 436 p. https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/publications-documents-de-reference/rapports/letat-de-sante-de-la-population-en-france-rapport-2017
16 Arnaud A, Caum C, de Watrigant T, Garcin A, Guyavarch E, Jangal C, et al. Enfants et familles sans logement personnel (ENFAMS) en Île-de-France – Premiers résultats de l’enquête quantitative. Paris: Observatoire du samu social de Paris; 2014. 442 p. https://www.santepubliquefrance.fr/docs/enfams-enfants-et-familles-sans-logement-personnel-en-ile-de-france-premiers-resultats-de-l-enquete-quantitative
17 Verdot C, Torres M, Salanave B, Deschamps V. Corpulence des enfants et des adultes en France métropolitaine en 2015. Résultats de l’étude Esteban et évolution depuis 2006. Bull Épidémiol Hebd. 2017;(13):234-41. http://beh.santepubliquefrance.fr/beh/2017/13/2017_13_1.html
18 Coste J, Valderas JM, Carcaillon-Bentata L. Estimating and characterizing the burden of multimorbidity in the community: A comprehensive multistep analysis of two large nationwide representative surveys in France. PLoS Med. 2021;18(4):e1003584.
19 Fond G, Lancon C, Auquier P, Boyer L. Prevalence of major depression in France in the general population and in specific populations from 2000 to 2018: A systematic review of the literature. Presse Med. 2019;48(4):365-75.
20 Shojaei T, Wazana A, Pitrou I, Kovess V. The strengths and difficulties questionnaire: Validation study in French school-aged children and cross-cultural comparisons. Soc Psychiatry Psychiatr Epidemiol. 2009;44(9):740-7.
21 Célant N, Guillaume S, Rochereau T. L’Enquête santé européenne – Enquête santé et protection sociale (EHIS-ESPS) 2014. Paris: Irdes; 2017. 286 p. https://www.irdes.fr/recherche/rapports/566-enquete-sante-europeenne-ehis-enquete-sante-et-protection-sociale-esps-2014.pdf
22 Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques. Fiche 35 – La complémentaire santé solidaire (CSS). In: Cabannes PY, Richet-Mastain L (dir.). Minima sociaux et prestations sociales – Ménages aux revenus modestes et redistribution – Édition 2021. pp.268-74. Paris: Drees; 2021. https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/sites/default/files/2021-09/Fiche%2035%20-%20La%20compl%C3%A9mentaire%20sant%C3%A9%20solidaire%20%28CSS%29.pdf
23 Lévy-Bruhl D, Fonteneau L, Vaux S, Barret AS, Antona D, Bonmarin I, et al. Assessment of the impact of the extension of vaccination mandates on vaccine coverage after 1 year, France, 2019. Euro Surveill. 2019;24(26):1900301.
24 Montalti M, Kawalec A, Leoni E, Dallolio L. Measles Immunization policies and vaccination coverage in EU/EEA countries over the last decade. Vaccines. 2020;8(1):86.
25 Loiseau G, Granal L. La localisation de l’offre publique d’accueil et d’habitat des gens du voyage. Paris: Fédération nationale des associations solidaires d’action avec les Tsiganes et les Gens du voyage (Fnasat-GDV); 2022. 255 p.
http://www.fnasat.asso.fr/Lalocalisationdeloffrepubliquedaccueiletdhabitatdesgensduvoyage2022.pdf

Citer cet article

Mondeilh A, Brabant G, Haidar S, Saboni L, Ruello M, Lesieur S, et al. Étude épidémiologique sur l’état de santé, le recours aux soins et à la prévention des Gens du voyage en Nouvelle-Aquitaine, 2019-2022. Bull Épidémiol Hebd. 2024;(4):58-67. http://beh.santepubliquefrance.fr/beh/2024/4/2024_4_1.html