Description des caractéristiques d’une sélection d’établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et des mesures de contrôle mises en place lors de la survenue de clusters de Covid-19 en région Nouvelle-Aquitaine en 2020

// Description of characteristics of selected nursing homes and control measures implemented throughout COVID-19 clusters, Nouvelle-Aquitaine region, France, 2020

Anne Bernadou1 (anne.bernadou@santepubliquefrance.fr), Ursula Noury1, Sullivan Evain1, Alice Herteau1, Cécile Binet2, Joëlle Chatenet2, Annabelle Ferret-Janicot2, Marion Saint-Jammes2, Saïd Acef2, Laurent Filleul1
1 Santé publique France – Nouvelle-Aquitaine, Bordeaux, Poitiers
2 Agence régionale de santé Nouvelle-Aquitaine, Bordeaux
Soumis le 29.03.2021 // Date of submission: 03.29.2021
Mots-clés : Covid-19 | Ehpad | Cluster | Mesures de contrôle | Nouvelle-Aquitaine
Keywords: COVID-19 | Nursing home | Cluster | Prevention and control | Nouvelle-Aquitaine

Résumé

En septembre 2020, une augmentation importante du nombre de clusters de Covid-19 en établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) a été signalée à l’Agence régionale de santé Nouvelle-Aquitaine (ARS), avec un grand nombre de cas rapportés. Une étude a été menée afin de comparer les caractéristiques des Ehpad ayant déclaré un cluster selon le niveau du taux d’attaque ainsi que les mesures de contrôle mises en place lors de la survenue de ces clusters.

Une étude transversale a été réalisée en octobre 2020 auprès de 45 Ehpad en Nouvelle-Aquitaine. Les données relatives aux caractéristiques des établissements, aux clusters, aux mesures préventives et de contrôle mises en place ont été recueillies à partir de quatre sources d’information dont un auto-questionnaire en ligne. Les Ehpad ayant rapporté un cluster d’impact élevé (taux d’attaque supérieur à 30% parmi les résidents ou parmi les membres du personnel) ont été comparés aux Ehpad ayant signalé un cluster d’impact modéré (taux d’attaque inférieur à 30%).

Sur les 45 Ehpad sélectionnés, 17 ont répondu à l’enquête en ligne dont 9 ayant eu un cluster d’impact élevé. Parmi ces derniers, il a notamment été observé une proportion de professionnels âgés de moins de 40 ans plus élevée, un ratio équivalents temps plein du personnel paramédical sur nombre de lits plus faible, du personnel moins bien formé en hygiène, une offre de chambres individuelles plus faible, un signalement des cas de Covid-19 plus tardif et des délais de mise en place des mesures de contrôle plus longs (résultats non statistiquement significatifs).

Cette étude a permis d’orienter l’ARS sur les facteurs pouvant favoriser la survenue de nombreux cas de Covid-19 en Ehpad dans le but de leur permettre de cibler les Ehpad qui réuniraient ces critères de vulnérabilité et leur fournir un soutien plus important. Compte-tenu de la taille limitée de l’étude et de l’absence de signification statistique, une étude sur la totalité des Ehpad est en cours pour compléter ces premiers résultats.

Abstract

In September 2020, the regional Health Agency Nouvelle-Aquitaine (ARS) reported an increase of the number of COVID-19 clusters in nursing homes with a very large number of reported cases. A study was carried out to compare the characteristics of the nursing homes that reported a cluster according to the attack rate level as well as the control measures implemented throughout the clusters.

A cross-sectional study was carried out in October 2020 in 45 nursing homes in Nouvelle-Aquitaine. Data on the characteristics of the facilities, clusters, and preventive and control measures implemented were collected from four sources of information including an online self-questionnaire. Nursing homes that reported a cluster with high impact (attack rate greater than 30%, among residents or staff members) were compared to nursing homes that reported a cluster with moderate impact (attack rate less than 30%).

In total, 17 responded to the online survey, involving 9 that reported a cluster with high impact. Among the latter, a higher proportion of professionals under 40 years of age, a lower ratio of full-time equivalent paramedical staff to number of beds, less well-trained staff in hygiene, fewer single rooms, later reporting of COVID-19 cases and longer delays in implementing control measures were observed (non-significant results).

This study helped to orient the ARS on the possible factors that may contribute the occurrence of a significant number of COVID-19 cases in nursing home, with the aim of targeting nursing home that would meet these criteria of vulnerability and providing them with greater support. Given the limited size of the study and the lack of statistical significance, a study of all nursing home is underway to complete these initial results.

Introduction

Le 24 janvier 2020, le premier cas français de Covid-19 est identifié à Bordeaux 1. Le virus SARS-CoV-2 s’est ensuite propagé sur l’ensemble du territoire national et la première vague épidémique apparaît en mars 2020. L’ensemble de la région Nouvelle-Aquitaine a été impacté, mais dans une moindre mesure comparativement à d’autres régions françaises. Une forte diminution de la circulation du SARS-CoV-2 a été observée entre mai et juillet 2020 en France, après le premier confinement. Dès le mois d’août 2020, une intensification de la circulation a été observée en région Nouvelle-Aquitaine. Cette recrudescence s’est accompagnée d’une augmentation du nombre de clusters signalés à partir du mois de septembre, notamment dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) 2. L’intensification de la circulation du virus en Nouvelle-Aquitaine s’est poursuivie jusqu’en novembre 2020.

En septembre 2020, l’ARS a sollicité la cellule régionale de Santé publique France de Nouvelle-Aquitaine (CRNA) pour un appui à l’investigation de clusters en Ehpad. À la suite de ces investigations, plusieurs interrogations sont apparues : pourquoi observe-t-on une flambée du nombre de cas dans certains établissements ? Ont-ils des caractéristiques particulières ? Les mesures de contrôle sont-elles mises en place correctement ?

Afin d’apporter rapidement des éléments de réponse dans un contexte épidémique, l’ARS et la CRNA ont réalisé un travail visant à identifier les facteurs favorisant l’augmentation du nombre de cas en Ehpad, avec pour finalité de cibler les établissements qui réuniraient ces facteurs de vulnérabilité et de mieux les soutenir.

L’objectif de cette étude était de comparer les caractéristiques des Ehpad selon le niveau du taux d’attaque et les mesures de contrôle mises en place lors de la survenue de ces clusters.

Méthode

Une étude transversale a été réalisée en octobre 2020. Au total, 45 Ehpad ont été sélectionnés : tous les Ehpad dans lesquels un cluster avait été signalé à l’ARS lors de la 2e vague épidémique entre le 1er août et le 30 septembre 2020 (N=35) et 10 Ehpad où un cluster avait été signalé lors de la première vague épidémique entre le 1er mars et le 30 juin 2020 (sélectionnés initialement par l’ARS dans le cadre d’une étude apparentée).

Les données ont été recueillies grâce à plusieurs sources d’information. L’ARS a fourni les données du tableau de bord de la performance 2018 pour obtenir des données sur les caractéristiques des établissements 3. La CRNA de Sante publique France a complété les informations sur les caractéristiques des clusters avec les outils de recueil Voozanoo Covid-19 Ehpad/EMS et le système d’information (SI) MONIC (monitorage des clusters), un système de signalement pour suivre des clusters 4,5. Enfin, l’ARS et la CRNA ont élaboré un auto-questionnaire standardisé en ligne afin de recueillir les caractéristiques des clusters, les mesures préventives et de contrôles mises en place pour la gestion du cluster et des éléments de contexte. Les Ehpad ciblés ont été invités à répondre au questionnaire du 14 au 23 octobre 2020, via l’application Solen du ministère de la Santé. Une relance a été réalisée le 21 octobre.

Un cluster a été défini comme la survenue d’au moins trois cas confirmés de Covid-19 dans un Ehpad, parmi les membres du personnel ou les résidents, dans une période de 7 jours 4. Un cluster d’impact élevé a été défini par un taux d’attaque supérieur ou égal à 30% parmi les résidents ou parmi les membres du personnel. Le taux d’attaque a été calculé à partir des cas confirmés uniquement. Les clusters avec des taux d’attaque inférieurs à 30%, ont été classés en clusters d’impact modéré.

Le taux d’attaque a été calculé comme suit pour les résidents et le personnel, selon la disponibilité des données :

définition 1 : nombre de cas confirmés (résidents ou personnel) signalés par l’établissement via l’enquête rapporté au nombre total de résidents ou de personnel présents lors de l’épisode rapporté par l’établissement via l’enquête ;

si les données étaient indisponibles pour la définition 1, la définition 2 a été appliquée : nombre de cas confirmés (résidents ou personnel) dans le SI-MONIC rapporté au nombre de lits / nombre de personnel dans le tableau de bord de la performance 2018 ;

si les données étaient indisponibles pour les définitions 1 et 2, la définition 3 a été appliquée : nombre de cas confirmés dans le SI-MONIC rapporté au nombre de résidents / nombre de personnel déclarés dans l’outil Voozanoo Covid-19 Ehpad/EMS.

La description des clusters a porté sur les caractéristiques des Ehpad, les mesures préventives mises en place dans le cadre de la crise Covid-19 et les mesures de contrôle mises en place en situation de clusters (encadré). Pour la description des caractéristiques des Ehpad, une première analyse a été réalisée sur tous les Ehpad sélectionnés puis une deuxième uniquement sur les Ehpad ayant répondu à l’enquête.

Des analyses univariées ont été réalisées, afin de comparer les clusters d’impact modéré aux clusters d’impact élevé. Toutes les comparaisons des variables catégorielles ont été effectuées avec un test de Chi2 ou un test de Fisher pour les effectifs faibles. La comparaison des moyennes a été réalisée avec un test de Wilcoxon. Les analyses ont été effectuées avec le logiciel R.

Encadré :
Liste des caractéristiques d’une sélection d’Ehpad et mesures préventives et de contrôles étudiées
lors de la survenue de clusters de Covid-19. Région Nouvelle-Aquitaine, 2020

Résultats

Description des clusters et participation des Ehpad à l’enquête

Sur les 45 Ehpad sélectionnés, 20 ont répondu à l’enquête. Pour 3 d’entre eux, les données étaient inexploitables (mauvaise compréhension). Parmi les 17 ayant répondu correctement à l’enquête (39%), 5 sont des Ehpad ayant eu un cluster en 1re vague et 12 en 2e vague. Parmi ces 17 Ehpad, le taux d’attaque moyen était de 30% chez les résidents et de 25% parmi le personnel (figure). Neuf clusters répondaient à la définition d’un cluster à impact élevé dont 4 signalés lors de la 2e vague.

Figure : Sélection des Ehpad ayant répondu à l’enquête selon le niveau du taux d’attaque, Nouvelle-Aquitaine, 2020
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Caractéristiques des Ehpad

En raison des faibles effectifs, la majorité des différences observées ne sont pas statistiquement significatives, mais des tendances sont observées et cohérentes avec les hypothèses a priori et devront être confirmées ultérieurement par des travaux plus exhaustifs.

La proportion moyenne de professionnels âgés de moins de 40 ans était plus élevée pour les clusters à impact élevé avec en moyenne 43% de professionnels de moins de 40 ans contre 39% parmi les clusters à impact modéré (tableau 1).

Le ratio équivalents temps plein (ETP) du personnel paramédical sur le nombre de lits était plus faible pour les clusters à impact élevé (0,32) que pour ceux avec un impact modéré (0,35) (tableau 1).

Tableau 1 : Caractéristiques des Ehpad ayant signalé un cluster (N=42), comparé selon l’impact du cluster,
Nouvelle-Aquitaine, 2020 (source : tableau de performance 2018)
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Le nombre d’ETP médecin coordinateur et infirmier était plus faible dans les établissements ayant un impact élevé (respectivement en moyenne 0,40 et 5,30) par rapport à ceux avec un impact modéré (0,43 et 6,60) (tableau 1). En revanche, durant un cluster, les Ehpad avec des clusters à impact élevé indiquaient un temps médecin coordonnateur plus élevé (0,68 ETP contre 0,54 pour les clusters à impact modéré) (tableau 2). La présence d’infirmiers diplômés d’État coordinateurs (Idec) pendant un cluster était également plus importante pour les clusters à impact élevé (présence d’un Idec dans 7 sur 9 Ehpad avec un cluster ayant un impact élevé contre 3 sur 8 pour ceux ayant un impact modéré). En revanche, le temps moyen Idec (en ETP) et le temps cadre de santé étaient moins importants (tableau 2).

Tableau 2 : Principaux résultats de l’enquête réalisée auprès des Ehpad ayant signalé un cluster (N=17), comparé selon l’impact du cluster, Nouvelle-Aquitaine, 2020 (source : enquête Solen)
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Il y avait en moyenne 89% de chambres individuelles dans les Ehpad avec des clusters à impact élevé contre 86% dans les Ehpad avec des clusters à impact modéré (tableau 1).

Le GIR (groupe iso-ressources) moyen pondéré (GMP), qui illustre le degré de dépendance des résidents (plus il est élevé, moins le résident est autonome), était en moyenne plus faible pour les Ehpad avec clusters à impact élevé (735,6) par rapport aux Ehpad avec clusters d’impact modéré (745,7) (tableau 1).

Globalement, quel que soit le niveau d’impact, lorsque l’on compare les caractéristiques des Ehpad ayant répondu à l’enquête (N=17) à ceux n’ayant pas répondu à l’enquête (N=28), on observe parmi les 17 Ehpad ayant répondu à l’enquête : une proportion de répondants plus importante dans le secteur public rattachés à un établissement de santé ; aucun établissement de petite taille (<50 lits) ; un GMP moyen plus important ; des établissements avec architecture complexe (établissement sur plusieurs sites, ou ayant plusieurs bâtiments).

Mesures préventives mises en place avant la survenue d’un cluster

Les Ehpad avec un cluster d’impact modéré déclaraient tous qu’une formation en hygiène avait été réalisée auprès de leur personnel permanent avec une durée moyenne de 32 heures contre 78% des Ehpad avec un cluster d’impact élevé et avec une moyenne de formation plus courte (19 heures) (tableau 2).

Mesures de contrôles mises en place lors de la survenue d’un cluster

Le délai de signalement était significativement plus élevé pour les Ehpad avec des clusters d’impact élevé (6 jours en moyenne) que pour Ehpad avec des clusters d’impact modéré (0,2 jour en moyenne) (tableau 2). De plus, les taux d’attaque (TA) au moment du signalement étaient également plus élevés pour les clusters avec un impact élevé (TA résidents de 4,7 et TA personnel de 2,1) par rapport aux clusters à impact modéré (respectivement 1,1 et 0,8).

Les délais de mise en place des mesures de contrôle (délai entre la date de déclaration du 1er cas confirmé et la date de mise en place de la mesure) étaient plus importants pour les clusters avec un impact élevé (tableau 2), en particulier pour le délai du 1er dépistage (8,4 jours en moyenne contre 1,0 jour pour les clusters d’impact modéré ; p<0,05), le délai de demande de soutien (6,5 jours contre 0,6 jour), le délai d’isolement en chambre (3,0 jours contre 0,4 jour) et le délai de surveillance clinique des résidents (7,3 jours contre 0,7 jour).

Les Ehpad ayant eu un cluster avec un impact élevé ont organisé 2 fois plus de dépistages (4,7 en moyenne) et ont fait appel à plus de renfort (5,8 personnes contre 1,6 personne pour les Ehpad ayant eu un cluster avec un impact modéré) (tableau 2).

Au total, 75% des Ehpad (6 sur 8) avec un cluster d’impact modéré et 100% (6 sur 6) avec un cluster d’impact élevé déclaraient avoir eu des difficultés dans la gestion du cluster. Les difficultés étaient de l’ordre des ressources humaines pour 11 Ehpad (91%), d’ordre matériel pour 4 (33%), d’ordre logistique pour 2 (16%) et d’ordre médiatique pour 1 (8%).

Discussion

Malgré le faible effectif des Ehpad ayant contribué à cette enquête, les résultats confirment les hypothèses et les remontées qualitatives sur les facteurs favorisant l’augmentation du nombre de cas rapportée par l’ARS Nouvelle-Aquitaine et certains établissements à savoir : le manque de ressources humaines (en lien avec de l’absentéisme ou un manque d’attractivité), l’architecture du bâtiment, le nombre de résidents pris en charge, la préparation et la réactivité des établissements lors de la survenue des premiers cas.

Sur le plan des ressources humaines, une proportion plus importante de professionnels âgés de moins de 40 ans a été constatée dans les Ehpad avec clusters à impact élevé. C’est en effet chez les 15-44 ans qu’une circulation particulièrement active du virus était observée début septembre 2020 2. Deux études menées aux États-Unis ont montré que la prévalence du virus dans la communauté environnante était un facteur majeur d’introduction du virus dans les établissements de ce type 6,7. Dans les clusters à impact élevé, une proportion de personnel paramédical, un temps de médecin coordinateur et d’infirmier annuel plus faibles étaient observés. Une étude américaine a montré que l’augmentation de la proportion de temps infirmier était associée à une diminution du nombre de cas de Covid-19 8. En effet, la faible proportion de personnel paramédical peut entraîner une gestion plus difficile en termes d’identification des cas, de mise en place rapide des mesures de contrôle et de respect de ces mesures, souvent chronophages (exemple : repas individuel en chambre, nettoyage plus fréquent, rappel des mesures aux résidents, etc.). Ce constat est aggravé, en période de cluster, car les Ehpad doivent faire face à un manque de personnel lié aux arrêts maladie du personnel également malade de la Covid-19 9,10.

Il apparaît également que le personnel permanent était moins bien formé en hygiène dans les Ehpad ayant un cluster à impact élevé. Or, pour que les mesures de contrôle soient appliquées correctement et systématiquement, il est nécessaire d’avoir du personnel bien formé aux règles d’hygiène 10,11. De plus, ces mêmes Ehpad semblent avoir dû faire appel plus souvent à du renfort en personnel. Le personnel en renfort est parfois moins qualifié et la formation d’accueil dans l’établissement est rapide en période de crise.

L’offre de chambres individuelles était moins importante dans les Ehpad ayant un cluster à impact élevé. On peut supposer que cela a rendu plus difficile l’isolement des résidents en chambre individuelle et contribué à la transmission du virus 12.

Concernant le type de résidents pris en charge, l’enquête semble montrer que ceux-ci étaient plus autonomes dans les Ehpad ayant un cluster à impact élevé. Si l’on fait l’hypothèse que des résidents moins dépendants se déplacent davantage, ces derniers sont susceptibles en cas de Covid-19 d’exposer plus de personnes, favorisant ainsi la contamination et donc la circulation du virus au sein de l’établissement.

Il est admis que la réactivité dès la survenue du premier cas est essentielle. Il apparaît que pour les Ehpad les plus impactés le signalement a été plus tardif et les délais de mise en place des mesures de contrôle plus importants. Compte-tenu de la contagiosité de la Covid-19, le retard dans la mise en place des mesures de contrôle favorise la propagation du virus 13,14.

Cette étude présente plusieurs limites. Un manque d’adhésion des Ehpad à l’auto-questionnaire de l’enquête Solen et une mauvaise compréhension des questions ont été observés. Les Ehpad sont très sollicités dans ce contexte épidémique afin de répondre à de multiples enquêtes. Il leur a probablement été difficile de dégager du temps pour répondre à cette enquête. De plus, les délais de mise en œuvre de cette étude ont été très courts ce qui ne nous a pas permis de tester et d’adapter au mieux le questionnaire ; ce dernier était probablement trop long avec des questions parfois imprécises. Il en résulte des analyses sur de faibles effectifs. Cette étude manque de puissance statistique et ne permet pas de montrer des différences statistiquement significatives entre les deux groupes (clusters d’impact modéré vs élevé). Il est donc difficile, à partir de cette enquête, de savoir si ce que l’on observe est réel ou seulement lié au hasard de notre échantillon d’établissements non représentatif de l’ensemble des établissements. Cependant, notre sélection d’Ehpad n’avait pas vocation à être représentative, elle a été réalisée dans un contexte d’urgence avec une volonté de l’ARS d’obtenir rapidement des résultats pour la mise en place d’actions.

Il aurait été intéressant d’inclure des Ehpad n’ayant pas connu de situation de cluster (ceux rapportant un ou deux cas seulement). Cependant, cela aurait nécessité un travail, en amont de l’enquête, plus conséquent de vérification des signalements des établissements (en lien avec des évolutions en cluster non déclaré par exemple), non compatible avec la demande urgente de l’ARS. Cette étude doit être considérée comme exploratoire proposant des pistes de réflexion pour d’autres études qui incluront les établissements sans cluster notamment.

Une autre limite repose sur la qualité des données (fiabilité et données manquantes). D’une part, les données du tableau de bord de performance datent de 2018 et des évolutions ont pu avoir lieu en deux ans, notamment sur les effectifs des professionnels ; d’autre part, les contrôles de saisie étaient insuffisants, à la fois dans l’enquête Solen et le Voozanoo Ehpad/EMS. Pour cette dernière source, un travail de rattrapage est réalisé néanmoins quotidiennement en Nouvelle-Aquitaine, directement auprès des établissements, pour améliorer la qualité des données et les valider.

Enfin, notre étude inclut à la fois des clusters de vague 1 et de vague 2. Or, entre la 1re et la 2e vague épidémique, les recommandations faites aux Ehpad ont évolué. Certaines mesures de contrôle peuvent être difficilement comparables entre les deux vagues et entraîner des incohérences dans l’analyse des données.

Malgré ces limites, ce travail a l’avantage d’apporter des premiers éléments chiffrés sur les caractéristiques des établissements favorisant l’apparition de clusters ayant un impact élevé. Devant l’intérêt de l’ARS Nouvelle-Aquitaine pour ces informations, afin d’adapter les mesures de gestion et les recommandations envers les établissements, ce travail va se poursuivre. Il s’agira de reproduire ce descriptif de manière exhaustive à partir des bases de données administratives et des données de surveillance de Santé publique France afin de disposer d’une puissance statistique suffisante.

Remerciements

Les auteurs remercient l’ensemble des Ehpad pour leur participation à l’étude et à la surveillance des clusters en général, ainsi que les équipes de l’Agence régionale de santé et la cellule régionale de Santé publique France Nouvelle-Aquitaine pour les discussions autour de l’étude.

Liens d’intérêt

Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêt au regard du contenu de cet article.

Références

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Citer cet article

Bernadou A, Noury U, Evain S, Hertea A, Binet C, Chatenet J, et al. Description des caractéristiques d’une sélection d’établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et des mesures de contrôle mises en place lors de la survenue de clusters de Covid-19 en région Nouvelle-Aquitaine en 2020. Bull Epidémiol Hebd. 2021;(Cov_9):2-8. http://beh.santepubliquefrance.fr/beh/2021/Cov_9/2021_Cov_9_1.html