Enquête IST 2012 en Nouvelle-Calédonie : prévalences et facteurs sociodémographiques associés aux infections à Neisseria gonorrheae, à Chlamydia trachomatis et à Treponema pallidum
// 2012 STI survey in New-Caledonia: prevalence rates and sociodemographic risk factors associated with Chlamydia trachomatis, Neisseria gonorrhea and Treponema pallidum infections
Résumé
Objectifs –
Estimer les prévalences des infections à Neisseria gonorrheae, Chlamydia trachomatis et Treponema pallidum dans la population calédonienne âgée de 18 à 49 ans et identifier les facteurs sociodémographiques associés.
Méthodes –
Étude transversale selon un plan de sondage aléatoire en grappes proportionnel stratifié à trois degrés. L’échantillon a été redressé sur la population cible de l’étude. Les prévalences sont ajustées à l’âge de cette population et les facteurs de risque ont été identifiés par analyse logistique multivariée.
Résultats –
Les prévalences s’établissent à 3,5% (intervalle de confiance (IC) à 95%: [1,9-5,1]) pour Neisseria gonorrheae, 9% [6,6-11,4] pour Chlamydia trachomatis, avec 2,1% [0,8-3,3] de co-infections à ces deux dernières maladies, 0,4% [0,0-0,9] pour la syphilis active et 3% [1,7-4,3] pour la syphilis cicatricielle. Les modèles multivariés ont révélé, selon l’infection considérée, des sur-risques liés à l’âge, au sexe, à l’ethnie, à la province de résidence, au fait de vivre seul et d’avoir un bas niveau d’étude. Une disparité du risque ethnique des Mélanésiens en fonction du lieu de résidence a été identifiée dans la survenue de Chlamydia trachomatis.
Conclusion –
Cette première enquête probabiliste en population générale établit des taux de prévalence importants pour ces trois infections sexuellement transmissibles. Elle met en évidence des facteurs sociodémographiques associés qui permettront d’orienter la future politique de prévention en santé sexuelle de la Nouvelle-Calédonie.
Abstract
Objectives –
To estimate the prevalence of Neisseria gonorrhea, Chlamydia trachomatis and Treponema pallidum infections in the population aged 18 to 49 years, and to identify the sociodemographic risk factors associated with these sexually transmitted infections (STIs).
Methods –
This is a cross-sectional study with a three-stage proportional stratified sample design. The random sample was weighted to produce a representative sample of the general population. Prevalence rates were adjusted to the population aged 18 to 49 years, and the risk factors were identified by a multivariate logistic analysis.
Results –
This study demonstrates a 3.5% (CI95%: [1.9-5.1]) prevalence for Neisseria gonorrhea, 9% [6.6-11.4] for Chlamydia trachomatis, 2.1% [0.8-3.3] for Neisseria gonorrhea and Chlamydia trachomatis co-infection, 0.4% [0.0-0.9] for active syphilis and 3% [1.7-4.3] for scar syphilis. The risk of presenting sexually transmitted infections increases with young age, gender, ethnicity, province of residence, whether individuals live alone, and in those with lower levels of education. The ethnic Melanesian risk of presenting Chlamydia trachomatis varied significantly depending on the province of residence.
Conclusion –
This first probabilistic survey in the general population establishes significant prevalence rates for these three STIs. It highlights sociodemographic risk factors that will guide future policies on sexual health prevention in New Caledonia.
Introduction
Depuis le début des années 2000, la France métropolitaine a enregistré une recrudescence des infections sexuellement transmissibles (IST) à Chlamydia trachomatis (CT), Neisseria gonorrhoeae (NG) et Treponema pallidum (TP) 1,2,3,4. La réapparition de la syphilis, après sa quasi disparition dans les pays industrialisés 5, a motivé la mise en place d’une surveillance non plus basée sur la déclaration obligatoire comme jadis, mais sur un réseau de cliniciens sentinelles, RésIST. Cet accroissement est révélé par des systèmes de surveillance, réseaux de médecins ou de laboratoires volontaires comme Rénachla (Réseau national des chlamydioses) et Rénago (Réseau national des gonocoques) 1,2,3, qui surveillent les infections à CT et NG. Ces réseaux ne peuvent estimer des prévalences populationnelles robustes extrapolables à la population générale. Pour cela, des enquêtes nationales de prévalence sont nécessaires. L’enquête Natchla (enquête nationale de prévalence de l’infection à CT) 6 y a répondu pour CT en 2006 ; elle a mis en évidence des facteurs de risque sociodémographiques de l’infection pour la population métropolitaine.
Pour NG et TP, il n’y a eu aucune enquête probabiliste menée en population générale au cours de la dernière décennie. La surveillance s’est limitée aux différents réseaux et enquêtes ad hoc menées en sous-populations spécifiques, symptomatiques ou non 7,8,9,10,11.
Sur cette même période, la Nouvelle-Calédonie disposait d’un système de surveillance des IST à déclaration obligatoire (1) qui surveille les trois infections 12. Le suivi de leurs incidences annuelles respectives montre les mêmes tendances qu’en métropole. Pour les prévalences, de rares études partagent les choix d’un échantillonnage empirique et d’une population spécifique, des femmes enceintes 13,14. Une enquête a été réalisée sur les trois maladies en 2006 13,15. Elle a montré des prévalences élevées (CT : 23,7% ; IC95%: [17,2-31,3], NG : 7,9% [4,1-13,4] et TP : 3,3% [1.1-7.5]) comparables aux voisins océaniens 13,16,17,18,19.
En 2011, une enquête randomisée en population générale a été décidée par un comité de pilotage qui rassemble les différentes institutions de santé du territoire. Si la taille réduite de la population calédonienne (245 580 habitants (2)) permet d’envisager une telle méthode, l’abord de la sexualité y reste encore tabou. C’est pourquoi, l’investigation a été menée par les médecins de famille, généralistes privés et dispensaires publics (appelés centre médico-sociaux).
L’objectif principal de cette étude était d’établir des prévalences des infections à NG, CT et TP dans la population calédonienne âgée de 18 à 49 ans, et son objectif secondaire d’identifier les caractéristiques sociodémographiques associées aux cas.
Méthode
Échantillonnage
Cette étude transversale a été réalisée selon un plan de sondage aléatoire en grappes proportionnel stratifié à trois degrés. Les unités primaires sont représentées par la stratification de la Nouvelle-Calédonie en cinq zones géographiques, indépendantes du découpage administratif provincial (côtes Est et Ouest de la Grande Terre, Îles Loyauté, ville de Nouméa et son agglomération). Elles délimitent des populations homogènes dans leur mode d’habitat (homogénéité intra-strate). Les unités secondaires ou grappes, au nombre de 91, sont des subdivisions des cinq strates. Elles sont constituées par des communes et des regroupements ou subdivisions de communes en fonction de leur taille afin de circonscrire des nombres d’habitants théoriques égaux. Toutes les grappes sont pourvues d’une offre de soins publique et/ou privée, composée de centres médico-sociaux (CMS) et/ou de cabinet(s) de médecine générale. Ces médecins et leurs consultations constituent l’entrée vers la population. Les individus, unités tertiaires de l’échantillon, y sont alors inclus par tirage systématique (les deux premiers patients du matin et de l’après-midi de chaque demi-journée de consultation) pour pallier le biais de sélection des médecins. Quarante-cinq grappes ont été tirées au sort (6 côte Est, 7 côte Ouest, 3 dans les Îles Loyauté, 18 à Nouméa et 11 dans son agglomération) au sein des cinq strates, qui sont toutes représentées pour traduire l’hétérogénéité inter-strate. Seule une grappe pourvue d’un unique médecin généraliste comme offre de soins a été fermée en raison du refus de ce dernier de participer à l’enquête.
Le nombre de sujets nécessaires a été maximisé (équiprobabilité) et estimé à 600 individus (précision absolue de 4% bilatérale et α=5%). Seul l’effet de grappe, erreur estimée à 2, a été pris en compte, en négligeant l’apport bénéfique de la stratification (<1) dans l’effet du plan de sondage. Le refus des patients a été estimé à 10%. Le nombre de sujets théoriques a donc été de 1 320 puis porté à 1 357 individus (après affectation équilibrée du chiffre n dans les grappes, décimales arrondies à l’entier supérieur).
Phase de terrain
Les médecins tirés au sort et ayant accepté de participer à l’étude sont devenus investigateurs. Ils ont recueilli l’accord et les variables sociodémographiques de leurs patients sélectionnés. Ils ont prélevé le sang et les urines ou ont dirigés leurs patients vers un des laboratoires partenaires, un CMS ou un infirmier libéral de leur choix. Le biologiste coordinateur du réseau de laboratoires partenaires a centralisé les résultats et les a ré-adressés aux investigateurs.
Critères d’inclusion
Les patients, tout-venant, âgés de 18 à 49 ans, consentants, avec une continence urinaire d’au moins 2 heures, ont été sélectionnés selon le plan de sondage à 3 degrés décrit supra.
Durée
Une phase pilote intégrée à l’enquête (10% de l’inclusion) a été réalisée courant juillet 2012. L’étude s’est déroulée du 15 août au 31 décembre 2012. Une relance systématique des individus dirigés vers un centre de prélèvement différent de leur médecin investigateur a été organisée afin de réduire le nombre des perdus de vue.
Techniques d’identification des trois infections
NG et CT ont été recherchés par PCR (Polymerase Chain Reaction) urinaire ou amplification du matériel génétique par Cobas Amplicor Neisseria gonorrhoeae Test® et Cobas Amplicor Chlamydiae trachomatis Test® (Roche Diagnostics). Un prélèvement sanguin unique, sans connaissance de l’antériorité clinico-biologique des patients, ne permettait pas d’explorer la cinétique des anticorps pour la syphilis. La séroprévalence a été explorée par un test tréponémique (TPHA 200®, Bio-Rad) et un test non-tréponémique (test VDRL, RPR 500® de Bio-Rad) complétés, selon les cas, par la recherche d’immunoglobulines M (IgM) par immuno-capture (Captio IgM Capture de Trinity Biotech en collaboration avec le laboratoire Cerba Paris) pour distinguer les infections anciennes des infections récentes ou actives. Trois conclusions étaient alors possibles :
- TPHA et VDRL négatifs : absence de contact avec TP, sérologie négative ;
- TPHA (>640) et VDRL (>4) élevés ou moyens et IgM positives : syphilis active ;
- TPHA et VDRL faibles ou moyens et IgM négatives : syphilis cicatricielle.
Analyse statistique
L’ensemble des analyses a été pondéré pour tenir compte des probabilités d’inclusion dans l’échantillon et redressé par une procédure de raking ratio 20 des variables province, sexe et âge de la population générale calédonienne de 18 à 49 ans pour produire un échantillon représentatif de cette population. Les prévalences des trois IST ont été étudiées à l’aide de régressions logistiques avec les variables sociodémographiques pour une recherche de facteurs associés. Ces variables ont été traitées en facteurs indépendants, sans recherche d’interaction, hormis pour la province et l’ethnie. Un facteur d’interaction a été introduit pour prendre en compte le risque ethnique en fonction de la province de résidence. Seules les variables sociodémographiques non-colinéaires ont été ajoutées aux modèles de régressions. Les analyses ont été réalisées avec le logiciel SAS® 9.3.
Autorisations
Le protocole et le traitement statistique de cette étude ont été validés par le comité d’éthique de la Nouvelle-Calédonie, le Comité consultatif sur le traitement de l'information en matière de recherche dans le domaine de la santé (CCTIRS) et la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil).
Résultats
Composition de l’échantillon
Les médecins ont sollicité 810 participants grâce aux 1 258 kits parvenus indemnes (99 kits cassés ou perdus) dans les centres investigateurs. Sur ces 810 personnes, 134 (16,5%) ont refusé de participer, 46 (5,7%) ne se sont pas rendues au rendez-vous de prélèvement et 22, dont les âges ne correspondaient pas aux critères d’inclusion, ont été exclus. Au final, l’échantillon était composé de 608 individus ayant eu des prélèvements de sang et d’urine, soit 0,5% de la population générale de 18 à 49 ans, estimée à 118 883 personnes par l’Institut de la statistique et des études économique de la Nouvelle-Calédonie.
Description sociodémographique et redressement
La répartition sociodémographique catégorielle de l’échantillon brut ne s’écartait pas significativement de celle de la population générale, selon les classes d’âge (p=0,99). Néanmoins, les bornes inférieures des 4 classes d’âges étudiées, 18, 26, 34 et 42 ans, étaient systématiquement surreprésentées, d’où le choix d’un redressement quantitatif sur l’âge (tableau 1).
Prévalences
Pour la population générale de 18 à 49 ans, les prévalences estimées sont de 3,5% (IC95: [1,9-5,1]) pour NG, 9% [6,6-11,4] pour CT, dont 2,1% [0,8-3,3] de co-infections à ces deux dernières maladies, de 0,4% [0,0-0,9] pour la syphilis active et de 3% [1,7-4,3] pour la syphilis cicatricielle. La prévalence ajustée de syphilis cicatricielle des plus âgés (42-49 ans) s’établit à 7,2% [3,0-11,5] contre en moyenne de 1 à 2% pour les 18-41 ans (tableau 2, tableau 3, tableau 4).
Facteurs sociodémographiques associés à NG, CT et à la syphilis active
Les femmes n’ont significativement pas plus de risque que les hommes de présenter une infection à NG contrairement à une infection à CT (odds ratios ajustés aux variables des modèles multivariés : ORa =1,3 (IC95% : [1,3-1,4]). La syphilis active n’a été détectée que chez des femmes (tableau 2, tableau 3, tableau 4).
Les plus jeunes (18-33 ans), et leurs comportements sexuels associés, sont les plus touchés et les plus susceptibles de présenter NG et CT. Les 18 à 25 ans sont fortement à risque pour les trois IST, en particulier CT (ORa=52 [42,9-63,4]. Les deux modèles NG et CT mettent en évidence un gradient de risque décroissant de présenter l’une de ces deux infections avec l’avancée en âge. Le modèle de la syphilis active, moins robuste, identifie également les plus jeunes (et leurs comportements) comme les plus à risque.
Il existe un risque de présenter NG selon l’ethnie qui ne varie significativement pas avec la province de résidence. Les Polynésiens sont les moins à risque de présenter cette infection contrairement aux Européens et métis, qui partagent un risque équivalent. Les Mélanésiens sont les plus à risque (ORa=4,1 [3,6-4,8] et l’ethnie asiatique ne compte aucun cas de NG (tableau 2). De plus, le regroupement binaire des ethnies montre que les Mélanésiens ont 1,6 [1,5-1,7] fois plus de risque que les autres ethnies confondues de présenter NG, toujours sans distinction du lieu de résidence.
Il existe un risque ethnique significatif de présenter CT pour les Mélanésiens, qui varie en fonction de leur province de résidence (tableau 3). Dans un modèle initial (ethnie en 5 modalités), les Polynésiens partagent à nouveau avec les Européens les plus faibles risques de présenter CT (ORa Polynésiens versus Européens=1,15 [1,04-1,28] et ORa Européens=1).
Enfin, les cas de syphilis active ont tous été détectés chez des femmes mélanésiennes.
Les habitants des provinces Sud et Nord ont environ 2 fois plus risque de présenter NG par rapport à ceux des Îles Loyauté. Ces derniers sont en revanche plus à risque de présenter une syphilis active par rapport aux habitants de la province Sud.
Le faible niveau d’étude et le célibat sont deux facteurs qui augmentent significativement les risques pour les trois IST.
Discussion
Notre échantillon pourrait apparaître biaisé par la sélection de « patients » et non d’individus de la population générale. Néanmoins, l’abord de la sexualité ne pouvait se faire qu’à travers les médecins de famille et grâce au climat de confiance que les calédoniens entretiennent avec eux. Les consultations médicales, surtout en tribu, ont lieu en famille. Père, mère et fratrie consultent en même temps. Le tirage au sort systématique des personnes (unités tertiaires) ne s’est donc pas fait sur une patientèle mais sur des consultations familiales, sélectionnant parfois les deux parents. Notre échantillon a de plus été constitué sur une période de forte demande de certificats scolaires, sélectionnant de facto des parents « non-malades », et il a été redressé. Le choix de sondage ne peut totalement éliminer l’existence de « patients » au sein de l’échantillon, mais il ne peut être réduit à cette simple expression.
Notre recrutement pourrait manquer de puissance statistique. La syphilis active a été détectée chez 4 femmes mélanésiennes et il n’y aucun cas asiatique de NG. Cela pourrait traduire un réel facteur de risque de ces femmes à TP et une rareté de TP et NG dans les autres ethnies, notamment chez les Asiatiques pour NG. La faible proportion d’Asiatiques dans la population (3,6%) et dans l’échantillon (1,7%) ainsi que la fluctuation d’échantillonnage pourraient aussi expliquer ce résultat. La prévalence de syphilis active est sans doute sous-estimée (0,4%) en regard de la forme cicatricielle (3%), dont le gradient augmente en fonction de l’âge. Ce dernier pourrait refléter soit une prévalence importante de syphilis actives à un moment donné (qui se transforment avec le temps en forme cicatricielle), soit de fortes incidences cumulées, sans pourvoir conclure sur la réalité de la circulation de syphilis.
En 2009, le réseau Rénachla rapporte en métropole des taux d’infection à CT variant de 3,8% dans les laboratoires qui traitent les prélèvements de médecine libérale à 9,4% dans les Centres de dépistage anonyme et gratuit (CDAG), avec une prévalence globale (parmi des personnes à qui il a été prescrit un test pour le diagnostic de CT) estimée à 5,3% chez les hommes et 5,5% chez les femmes 3. En 2006, l’étude Natchla 6, menée auprès des 18 à 44 ans, établissait des prévalences de 1,4% chez les hommes et 1,6% chez les femmes. Notre étude probabiliste, que nous extrapolons à notre population générale de 18 à 49 ans, s’en rapproche car notre population est proche de la population générale et n’est pas biaisée par la sélection systématique de personnes symptomatiques. Elle identifie une prévalence 6 fois plus élevée qu’en métropole et des facteurs de risque sociodémographiques associés similaires : des âges jeunes, le sexe féminin et l’absence de diplôme. Elle parvient de plus à mettre en évidence un risque ethnique des Mélanésiens, qui diffère en fonction du lieu de résidence (CT).
Entre 2008 et 2009, le réseau Rénago rapportait une progression, sans différence significative selon le sexe, de 52% du nombre moyen de gonocoques isolés/laboratoire/an dans l’ensemble des régions françaises (4,16 à 6,32 Ng/lab/an) 1,2. En 2013, des études métropolitaines ad hoc menées en région ont confirmé cette recrudescence 10,11. L’une d’entre elles, effectuée au niveau des services d’urgence, rapporte 3,7% de NG, majoritairement chez les hommes, comme dans Rénago. Au contraire, notre étude ne met pas en évidence de risque lié au sexe, mais estime une prévalence proche de cette dernière étude (3,5%).
En 2012, 0,06% des donneurs de sang métropolitains auraient été porteurs d’une syphilis active 21. En Nouvelle-Calédonie, entre 2008 et 2011, l’incidence moyenne a été estimée à 5,6/100 000 habitants chez les femmes enceintes admises au centre hospitalier territorial 14. Néanmoins, le système de surveillance des IST à déclaration obligatoire rapportait 15 à 24 cas pour 100 000 habitants de 2008 à 2012 12 alors qu’il sous-estime déjà ces maladies par sous-déclaration. Ces sources sont non représentatives (populations spécifiques) et/ou estiment des incidences. Notre étude établit au contraire, des prévalences probabilistes populationnelles.
Les voisins océaniens rapportent des taux hétérogènes 13,16,17,18,19. En 2005-2006, six États insulaires du Pacifique (Fiji, Kiribati, Samoa, les Îles Salomon, Tonga et Vanuatu) 13 et la Nouvelle-Calédonie 15 ont mené, selon un protocole identique et une méthode des quotas, une enquête de prévalence sur la population spécifique des femmes enceintes de 15 à 44 ans. Notre étude probabiliste établit au contraire, des prévalences 2 à 3 fois moins élevées et inférieures à la moyenne de ces voisins océaniens, hormis la prévalence de NG (3,5% ; IC95%: [1,9-5,1]). Australiens et Néo-Zélandais utilisent également une surveillance de l’incidence et non des études populationnelles de prévalence 16,17,18. Une revue systématique des études ad hoc australiennes 17 identifie néanmoins en 2012 les mêmes facteurs de risque pour CT,TP et NG : les plus jeunes et les populations aborigènes. L’ajustement aux mêmes tranches d’âge que notre étude démontre que la Nouvelle-Calédonie se place en retrait de l’Australie pour les prévalences de CT et de syphilis active, mais pas pour NG, qui est l’un des taux les plus élevés hormis pour la Papouasie Nouvelle-Guinée (chez les travailleurs du sexe) 19.
Conclusion
Cette première enquête probabiliste estime des prévalences en population générale calédonienne bien inférieures aux estimations de 2006 13,15 en population spécifique. Elle identifie des facteurs de risque sociodémographiques associés : la jeunesse, le sexe féminin, l’appartenance à l’ethnie mélanésienne et ce, en fonction du lieu de résidence (pour CT). Ces résultats contribueront à la construction d’une nouvelle politique de prévention mieux ciblée en matière de santé sexuelle.
Remerciements
Cette étude a été financée et menée par l’Agence sanitaire et sociale de la Nouvelle-Calédonie. Un Comité de pilotage, constitué par les différents acteurs de santé du territoire, a approuvé le protocole et l’échantillonnage de cette étude. Nous souhaitons remercier : le Réseau de laboratoires Caledobio pour leur participation et, particulièrement, son coordonnateur biologiste, Virginie Falcot, Patrick Hamm pour la présentation de l’étude auprès des différents médecins investigateurs, Fatou Blot pour l’étude de faisabilité en amont de l’enquête et l’ensemble des médecins investigateurs ayant participé.